Le Ministre-Président wallon a fait parler toute son expérience ce matin, dans la matinale de Bel RTL, évitant les pièges tendus pour éteindre tout début de polémique, que ce soit sur la crise de l’asile au fédéral ou sur le MR, parti avec lequel il gouverne dans la majorité wallonne. Par contre, tout comme au niveau fédéral, il est question de budget. Elio Di Rupo promet qu’aucune nouvelle taxe ne sera instaurée pour la confection du budget wallon, ce qui n’est pas le cas un échelon plus haut, où l’on parle de quadrupler la taxe sur les comptes-titres.
Dans l’actu : Elio Di Rupo face à la question du budget wallon.
- Que l’on soit de droite ou de gauche, une chose est sûre : à un an des élections, personne ne souhaite mécontenter ses potentiels électeurs. Ainsi, le Ministre-Président wallon, Elio Di Rupo, assure qu’il n’introduira pas de nouvelles taxes pour sa coalition composée de socialistes, de libéraux et d’écologistes. Côté flamand, cette absence de nouvelles taxes est aussi à noter dans l’accord budgétaire qui vient de tomber, mais sans que de grandes déclarations soient nécessaires : cela n’était même pas envisagé durant les discussions.
- Par ailleurs, la Wallonie ne dispose pas d’une « Déclaration de Septembre » ou d’un « État de l’Union », similaires à ceux du Parlement flamand et de la Chambre. Il s’agit d’un moment solennel où les données financières sont présentées au Parlement en début d’année parlementaire. Pour la Wallonie, cette présentation a lieu plus tard.
- Ce matin, Elio Di Rupo était l’invité de Bel-RTL et il a tout de suite annoncé ses intentions budgétaires : « La première chose que je souhaite dire à nos auditeurs, c’est qu’il n’y aura pas de nouvelles taxes », a affirmé l’ancien Premier ministre socialiste, avec un ton presque libéral. « Je considère que nos citoyens sont déjà suffisamment imposés. »
- Di Rupo se veut optimiste pour la Wallonie. En effet, malgré l’absence de nouvelles recettes, le Ministre-Président a annoncé un « équilibre budgétaire prévu pour 2024 ».
- Cet équilibre est toutefois atteint en excluant certaines dépenses significatives du budget, notamment les mesures de relance post-COVID, les dépenses liées aux inondations, et les coûts engendrés par la guerre en Ukraine. Ces éléments ne sont donc pas comptabilisés par le socialiste, qui distingue « les dépenses one shot » des « dépenses récurrentes ».
- En faisant un parallèle, si le budget flamand affiche un déficit de 3,7 milliards, celui de la Wallonie s’élève à 3 milliards, en suivant les mêmes critères. Mais cela représente un déficit proportionnellement plus important compte tenu de la taille moindre du budget wallon.
- De plus, d’après les données de la Cour des comptes, la dette wallonne a considérablement augmenté, passant de 23 milliards en 2019 à 43 milliards en 2024, ce qui équivaut à près de 300 % des recettes. Malgré cela, Di Rupo minimise les inquiétudes : « Cette dette est soutenable, même si nous devons réduire ce déficit des dépenses récurrentes ». Mais les économies qu’il envisage ne sont pas des plus audacieuses : « Nous avons consulté des experts qui nous ont conseillé d’économiser 150 millions de manière structurelle chaque année. Il nous reste à économiser environ 50 millions pour cette année, et nous le ferons. »
- Elio Di Rupo et son gouvernement ne combleront donc pas ce trou de 50 millions d’euros par de nouvelles taxes. Mais cette annonce fera sans doute rire jaune plus d’un Wallon, alors que la réforme sur la taxe de mise en circulation a été adoptée au Parlement wallon le 6 septembre dernier, pour une entrée en vigueur le 1er janvier 2025. Rappelons que cette taxe qui pénalisera les véhicules polluants, lourds et puissants pourra aller jusqu’à 9.000 euros dans la situation la plus extrême. Mais en pénalisant le poids, la réforme s’attaque aussi aux véhicules électriques qui sont plus lourds. La taxe de mise en circulation d’une Tesla dépassera par exemple les 1.500 euros. Cela contraste avec la prime de 5.000 euros que vient de mettre en place le gouvernement flamand pour l’achat d’une voiture électrique. Les poches du nord du pays sont tout simplement plus pleines.
Au fédéral : c’est déjà la grande foire aux propositions, et aux nouvelles taxes…
- Ce weekend va marquer le début du marathon de négociations pour le tout dernier conclave budgétaire de la Vivaldi, en tout cas sous cette législature. Un nouvel effort doit être consenti.
- Le Comité de monitoring a refait les calculs : le déficit de « l’entité I », c’est-à-dire le niveau fédéral et la Sécu, serait de 3,1% l’année prochaine. Ce qui correspond à 18,6 milliards d’euros. C’est légèrement mieux que le déficit de cette année, qui devrait se clôturer à 3,5 %.
- Pour respecter les engagements européens et faire passer le déficit en dessous des 3%, un effort de 800 millions d’euros est donc nécessaire. Mais en mars, il a été décidé qu’une réduction du déficit de 1,2 milliard d’euros ou 0,2 % du PIB serait entrepris. La secrétaire d’État au Budget, Alexia Bertrand (Open VLD), a confirmé cette ambition au niveau fédéral.
- Il reste à voir où trouver l’argent. Traditionnellement, c’est la règle des 3 tiers qui prévaut : un tiers doit provenir des économies, un tiers des nouvelles taxes, et un tiers d’autres mesures, soit 400 millions d’euros chacun.
- Concernant les taxes, les socialistes interrogés par La Libre ont déjà leur idée : « En quadruplant le taux, on obtient 1,2 milliard”, propose l’un d’eux. « En la triplant, on obtient 800 millions d’euros. » Précisons qu’il s’agit ici de la taxe sur les comptes-titres (0,15%) pour les portefeuilles de plus de 1 million d’euros.
- On peut déjà l’écrire : ce rêve socialiste ne deviendra pas réalité, à moins d’énormes concessions. Sur la limitation des allocations de chômage proposée par le MR, par exemple. En outre, cette taxe sur les comptes-titres (de 0,15% à 0,30%) figurait dans la réforme fiscale du ministre des Finances Vincent Van Peteghem, qui est désormais morte et enterrée sous cette législature. La proposition socialiste équivaudrait à ajouter une nouvelle taxe sans les éventuels bénéfices d’une réforme fiscale pour le portefeuille des contribuables.
- Lancer des propositions avant les négociations est un grand classique de la rue de la Loi. Une technique qui consiste à se tester et à éventuellement concéder au plus haut. En faisant des propositions très ambitieuses, vous en retirerez peut-être quelque chose d’acceptable, qui pourra être ensuite brandi comme une victoire.
À suivre : Tensions chez les écologistes concernant Nicole de Moor (cd&v).
- Vendredi dernier, le Premier ministre De Croo a de nouveau abordé la question de « l’asile et la migration » lors du Conseil des ministres, mais il ne s’agissait pas d’une discussion de fond, seules les questions financières étaient abordées.
- Cependant, le sujet continue de préoccuper les partenaires écologistes au gouvernement. Le même matin, Jean-Marc Nollet (Ecolo) a vivement critiqué la Vivaldi : « Il est inacceptable que le gouvernement fédéral tolère que la secrétaire d’État De Moor agisse de façon illégale et persiste avec sa ligne politique de refuser l’accueil aux hommes seuls qui sont demandeurs d’asile. Elle a posé seule une instruction à son administration, elle s’est mise seule hors-la-loi. Cette décision n’est pas celle du gouvernement, pas celle du Kern, cette décision est le fait de Madame de Moor toute seule et elle s’est mise dans l’illégalité. »
- Ecolo essaie donc de se démarquer de la politique gouvernementale sur cette question. Pour les Verts, il est particulièrement difficile à entendre que de Moor dise ouvertement qu’elle ne peut suivre la loi sur l’asile, qui stipule pourtant qu’un hébergement doit être prévu pour chaque demandeur d’asile.
- Dimanche, le président de Groen, Jeremie Vaneeckhout, a fait des déclarations encore plus audacieuses. Il a évoqué explicitement la possibilité de « quitter le gouvernement », peut-être pas le mouvement le plus stratégique s’il n’envisage pas réellement de le faire. « Les traités internationaux sont pour nous une ligne de base, contrairement à presque tous les autres partis, apparemment. Grâce à Groen, de nouveaux lieux d’accueil sont mis en place. Mais nous nous demandons tous les jours s’il serait préférable pour nous de quitter le gouvernement », a-t-il déclaré dans « De Zevende Dag« .
- Cependant, face à la réaction de de Moor, tant ses amis que ses détracteurs ont constaté ces dernières semaines que les partis de la gauche de la Vivaldi, notamment le PS, n’ont pas l’intention de faire de la crise de l’accueil une crise de gouvernement. « Une crise gouvernementale, voire une sortie du gouvernement sur la question de l’accueil des demandeurs d’asile ? Non, merci », c’est l’analyse des socialistes francophones. Vooruit avec Conner Rousseau partage ce point de vue.
- Ironiquement, on a suggéré du côté socialiste dans « Le Soir » la semaine dernière qu’Ecolo « devrait peut-être aussi, par l’intermédiaire de Bénédicte Linard (Ecolo), ministre de la Jeunesse de la Communauté française, créer des places, comme l’a fait Benjamin Dalle (cd&v) du côté flamand ? »
- Cela conduit les écologistes à avancer un raisonnement quelque peu tordu pour justifier qu’ils « restent en place » dans la Vivaldi : selon eux, en réalité, quatre partis s’opposent à l’approche de la secrétaire d’État Nicole de Moor, et « il est donc préférable de rester au gouvernement et d’influencer l’approche de l’intérieur ».
- De Moor essaie quant à elle d’apaiser la situation et s’est rendue lundi matin à la RTBF avec un message plutôt modéré. Reste à savoir si cela suffira pour les écologistes :
- « Nous avons déjà créé des milliers de nouvelles places pour les demandeurs d’asile dans de nouveaux centres à travers tout le pays et nous cherchons toujours des places supplémentaires pour pouvoir accueillir tout le monde. »
- « Et comme le dit le Conseil d’État : ‘Toute personne demandant l’asile en Belgique a le droit d’être accueillie’. Je ne conteste pas cela, je ne néglige pas la décision du Conseil d’État, moi aussi je veux que la loi soit respectée. »
- « Mais il y a aussi une réalité sur le terrain. Le nombre de demandeurs d’asile arrivés ces deux dernières années est si élevé que même avec tous ces nouveaux centres, nous ne pouvons accueillir tout le monde. »
- Elle a également inclus De Croo dans sa déclaration : « Ce n’est pas une situation facile, ce n’est pas une situation que je souhaite, que le Premier ministre souhaite. Il a également clairement indiqué qu’il souhaite que la loi soit respectée, qu’il veut suivre la décision du Conseil d’État, mais qu’il ne peut pas le faire actuellement. »
Une Affaire déconcertante : Une échevine de Saint-Josse recourt à ses indemnités pour s’offrir de la lingerie et des cigarettes.
- La scène politique bruxelloise ne manque pas de petits scandales. Ce mardi, le journal « La Dernière Heure » a mis en lumière les indemnités de frais du collège des échevins de Saint-Josse-ten-Noode, où règne la liste d’Emir Kir, ancien membre du PS. Pour l’échevine Dorah Illunga, également ancienne du PS, certains achats, censés couvrir des frais de représentation, interpellent.
- Chaque échevin dispose d’un budget de 1.784 euros par an à cet effet. Or, selon les informations du journal ayant eu accès aux justificatifs, Mme Illunga ne s’est pas limitée à l’achat de parfum, de maquillage ou de vêtements. Elle a aussi acquis de la lingerie fine : des porte-jarretelles et des bas en dentelle, sans oublier des pyjamas. Parmi les dépenses figurent aussi des Marlboro Gold, quelques bananes et un nombre conséquent de tickets de fast-food.
- Face à cette révélation, Illunga se défend : « Ces frais de représentation ont fait l’objet de contrôles à deux niveaux : administrativement par le receveur de la commune et par le collège des échevins ». Le parti Ecolo, quant à lui, s’insurge contre cette situation.
- Cette affaire gênante tombe alors que la majorité bruxelloise (PS-Ecolo-DéFI) a approuvé cet été une hausse de 7 % du traitement annuel brut des échevins et bourgmestres pour la prochaine législature. Le salaire des échevins devrait ainsi grimper à 68.063 euros par an en 2024, dans la commune de Saint-Josse-Ten-Noode. Sans compter les frais de représentation. Notons qu’à Bruxelles-Ville, le salaire d’un échevin grimpera à 130.000 euros par an et à 173.000 euros par an pour le bourgmestre.