Défendre des ambitions climatiques n’a rien de « woke » pour le patron de BlackRock: c’est avant tout une question de profits

Dans sa lettre annuelle aux entreprises dans lesquelles le gestionnaire d’actifs BlackRock investit, le PDG Larry Fink écrit que les entreprises qui ne prévoient pas un avenir « sans carbone » prennent du retard. La stratégie verte d’investissement de BlackRock n’a pas de base idéologique, mais une base capitaliste, affirme M. Fink. « Le capitalisme des parties prenantes n’est pas de la politique. Il ne s’agit pas d’un programme social ou idéologique. Ce n’est pas de la blague », clame-t-il.

Pourquoi est-ce important ?

BlackRock, fondé par Larry Fink en 1988, est le plus grand gestionnaire d'actifs au monde. La société holding gagne de l'argent en investissant le capital d'autres personnes (comme des particuliers fortunés, des compagnies d'assurance et des fonds de pension). Les investissements sous la gestion de BlackRock ont atteint 8.680 milliards de dollars (7.620 milliards d'euros) en 2020. En comparaison, le produit intérieur brut (PIB) de la Belgique en 2020 était d'environ 515 milliards de dollars (452 milliards d'euros).

Les efforts déployés par Larry Fink pour inciter les entreprises à adopter des politiques respectueuses du climat ont amené certains à le qualifier de militant pur et dur. C’est ce qu’écrit le Wall Street Journal, qui fait autorité en la matière. Le PDG et président de BlackRock, entre autres l’un des plus gros actionnaires d’Apple, préfère une autre étiquette : capitaliste. La recherche de rendements à long terme, et non la politique, est ce qui motive le gestionnaire d’actifs, du moins selon son épître.

Le débat sur le climat dans les milieux de l’investissement

Le débat sur le climat s’intensifie dans les milieux de l’investissement aux États-Unis. Par exemple, le trésorier de Virginie occidentale a déclaré en début de semaine que le programme d’investissement de l’État ne souhaitait plus utiliser les fonds BlackRock. Le gestionnaire d’actifs avait exhorté les entreprises à réduire leurs émissions à un niveau net zéro d’ici 2050, ce qui était préjudiciable à l’économie, selon le trésorier de l’État américain.

En juin dernier, l’État du Texas a adopté une loi obligeant les entités publiques, telles que les fonds de pension, à se distancer des entreprises qui boycottent l’industrie des combustibles fossiles. Bien que la manière dont la loi sera finalement appliquée ne soit pas claire, beaucoup y ont vu un coup dur pour BlackRock, qui risque ainsi de perdre des milliards de dollars de pensions texanes sous sa gestion.

La plupart des actifs de BlackRock sont placés dans des fonds qui suivent des listes d’actions sélectionnées. Mais comme ces suiveurs d’indices ne peuvent pas simplement vendre des actions d’entreprises s’ils ne sont pas satisfaits de leurs performances ou de leur leadership, les groupes d’investissement (comme BlackRock) tentent d’influencer les entreprises qu’ils ont dans leur portefeuille par d’autres moyens.

Le géant de l’investissement a fait sensation au printemps dernier en votant le remplacement de trois dirigeants d’ExxonMobil « en raison du manque de volonté du géant pétrolier de passer rapidement à des sources d’énergie plus propres ». Le soutien de BlackRock à « un écologiste mineur » chez Exxon a incité les critiques à accuser la société de s’aligner sur les causes progressistes, rapporte le WSJ.

« Aucun côté du spectre politique »

Dans sa lettre, M. Fink tente de rappeler aux chefs d’entreprise que BlackRock ne se situe pas d’un côté ou de l’autre de l’échiquier politique américain. Fixer des objectifs aux entreprises pour réduire leurs émissions, note-t-il, est « essentiel pour les intérêts économiques à long terme de vos actionnaires ».

« Nous nous concentrons sur la durabilité non pas parce que nous sommes des écologistes, mais parce que nous sommes des capitalistes et des propriétaires d’entreprises pour nos clients », explique M. Fink.

Les entreprises doivent continuer à évoluer, sinon elles risquent d’être remplacées par des concurrents plus adaptables. Selon lui, la transition vers un monde sans émission de gaz à effet de serre va bouleverser tous les secteurs.

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