Au milieu de la cacophonie de ce débat indigne d’une campagne présidentielle, Donald Trump a refusé de condamner les suprémacistes blancs et autres groupuscules d’extrême droite. Plus que cela, il les a qualifiés de ‘Proud Boys’, leur demandant ‘de se tenir prêt’ pour contrer ‘les gauchistes’. Si on connait la capacité du président à provoquer continuellement, sa réaction a suscité un tollé.
Au milieu des accusations mutuelles et des pugilats, Donald Trump a été questionné sur la violence des suprémacistes blancs, dont les méfaits ont connu une résurgence au moment du mouvement Black Lives Matter, ces derniers mois. Le modérateur du débat, Chris Wallace, un démocrate travaillant sur la chaine conservatrice Fox News, a visé en particulier des milices privées armées, qui soutiennent ouvertement le président.
Donald Trump a balayé la question d’un revers de la main, préférant qualifier ces individus de ‘Proud Boys’, du nom d’un groupuscule nationaliste d’extrême droite, connu pour ses attaques contre des militants de gauche. ‘Laissez-moi vous dire quelque chose: quelqu’un doit faire quelque chose pour contrer les antifa et l’extrême gauche’. Le compte officiel du groupuscule a directement réagi sur Telegram, ne s’attendant pas à un tel soutien direct.
Consternation
Les déclarations de Donald Trump ont fait froncer de nombreux sourcils. ‘Un tel feu vert est catastrophique’ a déploré Kathleen Belew, experte des mouvements suprémacistes blancs à la prestigieuse université de Stanford. ‘Trump doit à l’Amérique des excuses’, a commenté Jonathan Greenblatt de l’Anti-Defamation League (ADL). Il s’agit d’une organisation non gouvernementale internationale juive qui cartographie les groupes extrémistes.
Les réactions des démocrates ne sont pas plus tendres. Au premier rang, la députée Alexandria Ocasio-Cortez, peu connue pour faire dans la demi-mesure : ‘Donald Trump est un suprémaciste blanc’, a-t-elle tweeté. Pour la députée Rashida Tlaib, ce soutien ‘montre une nouvelle fois à quel point le président est dangereux’.
Kamala Harris, la colistière de Biden, n’a pas manqué de condamner les propos présidentiels : ‘Le président des États-Unis en 2020 refuse de condamner les suprémacistes blancs.’
Qui sont-ils ?
Créé en 2016, ce groupuscule est réservé aux garçons. Il a été fondé par Gavin McInnes, l’un des cofondateurs du magazine ‘Vice’, qui a pris aujourd’hui une tout autre tournure. McInnes décrit alors le groupe comme un club privé pour les ‘chauvinistes occidentaux qui refusent de s’excuser d’avoir créé un monde moderne’. Il s’agit aujourd’hui d’un mouvement qui ne veut pas ‘s’excuser d’être blanc’, qui glorifie l’entrepreneuriat et vénère la femme au foyer. Il s’oppose par essence à la cancel culture de ces dernières années.
Officiellement, le groupe dit ne faire aucune discrimination quant à la couleur de peau, la religion, l’origine ou l’orientation politique. Une rhétorique que l’on retrouve aussi dans des mouvements ici en Europe comme le Schild & Vrienden belge, lui-même inspiré par le Génération identitaire français. Comme souvent, la réalité dépasse les intentions et les postures: les membres aiment à balancer injures et mèmes racistes sur les réseaux sociaux en ciblant plusieurs communautés. Sans surprise, les musulmans sont visés. Là encore, les points communs avec les groupuscules d’extrême droite européens sont flagrants.
Ce groupe, dans lequel on rentre suite à bizutage violent (ex: réciter 5 marques de céréales en se faisant tabasser), a déjà été banni de Facebook et Instagram pour ses contenus haineux.
Aujourd’hui, Gavin McInnes ne fait plus partie du groupuscule (il l’a quitté en 2018). Mais la créature a échappé au maitre. Il a beau justifié, qu’à la base, ce groupuscule n’était pas lié à l’alt-right américaine, c’est maintenant un fait. Un rapport du FBI concluait déjà en 2018 que le groupe ‘a contribué à l’escalade récente de la violence lors de rassemblements politiques organisés sur les campus universitaires et dans des villes comme Charlottesville, Virginie, Portland, Oregon et Seattle, Washington’, rapporte le Guardian.
Un constat qui vaut aussi ces derniers mois, suite au mouvement Black Lives Matter, dans une Amérique plus divisée que jamais.