‘Craignez l’inégalité, pas les robots’: les conclusions du MIT après trois années de recherche sur l’avenir du travail

Une étude très attendue a été publiée mardi dernier: des scientifiques du Massachusetts Institute of Technology (MIT) ont passé trois ans à étudier comment le progrès technologique allait modifier le marché du travail et quel impact il avait déjà eu sur les travailleurs. La recherche s’est principalement concentrée sur les États-Unis, mais de nombreuses idées peuvent être rapportées au marché du travail européen. Vous pouvez déjà pousser un ouf de soulagement : nous ne devons pas avoir peur des robots, estiment les chercheurs du MIT.

Les scientifiques affirment que la technologie a toujours eu un impact sur les emplois, tout au long de l’histoire: certains disparaissent, d’autres doivent être adaptés. Mais elle a toujours créé de nouveaux emplois. Et elle a, en général, permis d’augmenter le nombre global d’emplois.

La rapidité du progrès technologique

Un facteur qui n’a pas joué de rôle ‘tout au long de l’histoire’, c’est le fait que le progrès technologique numérique connaît une croissance exponentielle. Par rapport aux années 1960, les voitures d’aujourd’hui sont environ deux fois plus rapides. Selon l’entreprise NVIDIA, les ordinateurs actuels sont environ 1.000 milliards de fois plus puissants que ceux de l’époque.

Dans ce contexte, ne se pourrait-il pas que les robots et l’intelligence artificielle s’améliorent si rapidement que les humains ne finissent par devenir superflu au travail ?

Sur base de trois années de recherche de terrain dans presque tous les secteurs de l’économie – du commerce de détail aux bureaux d’assurance en passant par la fabrication de pneus – les scientifiques du MIT concluent que, malgré la rapidité de l’évolution technologique, son impact sur les employés est plutôt progressif et non révolutionnaire. Ils donnent l’exemple d’Amazon, qui est à la pointe de la recherche sur les voitures autonomes et la logistique automatisée. Leurs entrepôts fonctionnent tout de même grâce au travail humain, et cela continuera à être le cas pendant des années.

Les conditions de travail éprouvantes et les bas salaires dans les centres logistiques de ce genre de multinationales, en particulier aux États-Unis, ne sont certainement pas exemplaires. Mais, selon le rapport, ce n’est pas une conséquence du progrès technologique: ‘Nos institutions sont très mauvaises à cet égard’, écrit l’un des principaux auteurs de l’étude.

Des spécificités humaines indispensables

De plus, les robots n’ont toujours pas la flexibilité et l’agilité des humains. La performance des robots, mais aussi de ce que nous appelons l’IA, est toujours, en fin de compte, le résultat de la programmation et de la répétition. De ce que leurs programmateurs leur donnent à manger, en d’autres termes. Les systèmes peuvent devenir très bons dans une ou plusieurs tâche(s), mais cela s’arrête généralement là.

Une main humaine peut s’occuper d’une multitude de tâches, sans avoir besoin d’y être formée. Ainsi, un bras robotique extrêmement coûteux peut mettre des beignets dans une boîte sans les endommager. Mais s’il doit emballer un concombre, il doit être complètement reprogrammé. Pareil pour le lancement d’une balle de tennis, qui n’est pas une option pour la plupart des bras robotisés industriels.

En outre, le coût élevé de la robotique et l’expertise qu’elle requiert sont un frein à sa propagation à grande échelle. Par exemple, les chercheurs ont trouvé très peu de robots au sein des PME américaines. Celles-ci représentent pourtant 98 % des entreprises du secteur de la production.

La productivité augmente, mais l’inégalité aussi

Selon les recherches, les dangers de l’automatisation sont donc exagérés. Les scientifiques mettent par contre en garde contre les décisions politiques qui ont permis aux plus riches de conquérir une part de plus en plus inégale de la croissance économique.

L’équipe de recherche a constaté que la productivité a fortement augmenté au cours des 50 dernières années, mais que, proportionnellement, les revenus n’ont pas suivi. Cela n’est pas dû à la technologie, mais à un ‘marché du travail fondamentalement déficient’.

Entre 1948 et 1978, la productivité et les salaires moyens des travailleurs ont augmenté de façon à peu près proportionnelle. Depuis, les salaires ont stagné, tandis que la productivité (en raison de la technologie) a continué à augmenter à un rythme toujours plus rapide.

Le danger de l’automatisation ne réside donc pas dans le manque d’emplois. Le danger est que le travail soit sous-payé et qu’il ne permette pas l’épanouissement. Selon les chercheurs, la solution à ce problème ne réside pas dans la technologie, mais dans la politique.

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