COP28 : un accord déconnecté de la réalité, alors que des sommes énormes sont encore investies dans le pétrole et le charbon

Mercredi matin, la COP28, la conférence internationale dédiée au changement climatique, s’est félicitée pour son immense bond en avant. Après de longues hésitations, elle a enfin inscrit l’abandon des énergies fossiles dans son accord final. Sauf que ce bout de papier n’a aucune valeur contraignante, en l’état.

Les investissements dans les filières énergétiques les plus délétères pour notre planète ne sont pas sur le point de cesser, y compris au sein des pays signataires. Pendant que les représentants du monde (presque) entier vantent leur accord, les industries pétrolières continuent à se frotter les mains et à investir dans leur production.

Une COP28 déconnectée ?

  • Ce lundi, Occidental Petroleum a déclaré qu’elle paierait 12 milliards de dollars en espèces et en actions pour acheter le producteur de pétrole de schiste américain CrownRock. L’extraction de ce pétrole, qui imbibe des roches poreuses, implique de passer par la fracturation hydraulique, une méthode très controversée tant elle est destructrice. Elle peut compromettre la stabilité des sols et des cas de contamination des nappes phréatiques ont été observés.
  • Et ça n’est pas une exception : Big Oil se porte très bien et voit l’avenir avec des billets verts dans les yeux, titre CNN. ExxonMobil a conclu en octobre dernier un accord à 60 milliards de dollars pour acquérir le foreur de schiste Pioneer Natural Resources. De même pour Chevron, qui a mis 53 milliards sur la table pour acquérir une entreprise spécialisée dans la fracturation. Les grands pétroliers estiment que le forage a encore de l’avenir, donc que la demande d’or noir sera toujours là, fût-il particulièrement sale.

Des États hypocrites qui aiment le pétrole

Le paysage pétrolier se retrouve changé ces dernières années, avec l’arrivée de nouveaux acteurs sur la carte de la production de gros, hors du cercle très fermé de l’OPEP et de ses alliés de l’OPEP+, qui a d’ailleurs été rejoint récemment – sur la pointe des pieds – par le Brésil. Des États comme le Guyana, et surtout les États-Unis, livrent leur or noir sur le marché en dehors des directives et des quotas des producteurs traditionnels, ce qui fait d’ailleurs baisser les prix. Le Canada et l’Australie forent aussi, avec 50 milliards d’investissements de la part d’Exon dans ce dernier pays.

  • Avec de telles sommes en jeu pour continuer à pomper du pétrole, on se demande bien ce que vaut la signature des pays concernés durant la COP28. Le texte, de toute manière, reste vague et n’est aucunement contraignant.
  • Il évoque bien le triplement des capacités installées en énergies renouvelables d’ici 2030. Mais l’Inde, au hasard, compte justement doubler sa production de charbon d’ici la même échéance.
  • Et ça n’est pas qu’une opposition entre un « Nord global » donneur de leçon et n’aidant pas un « Sud global » à se lancer dans une croissance plus propre. Les anciennes métropoles ne font pas mieux : la Grande-Bretagne, juste après avoir inauguré la plus grande ferme à vent en service au monde, veut relancer aussi ses forages pétroliers en mer du Nord.
  • Selon un récent rapport du Programme des Nations Unies pour l’environnement, la production mondiale de combustibles fossiles en 2030 sera toujours le double de ce qu’elle devrait être pour permettre au monde de ne subir « que » 1,5°C de réchauffement moyen. Et on ne peut pas dire qu’on tente vraiment tout pour inverser la vapeur.
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