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Cathie Wood revient à la charge: les Etats-Unis seraient bel et bien en récession. Elle s’appuie sur les nouveaux chiffres du marché de l’emploi, mais lui donnent-ils raison?

Cathie Wood revient à la charge: les Etats-Unis seraient bel et bien en récession. Elle s’appuie sur les nouveaux chiffres du marché de l’emploi, mais lui donnent-ils raison?
Cathie Wood – (Photo by Patrick T. FALLON / AFP) (Photo by PATRICK T. FALLON/AFP via Getty Images)

Il y a eu 300.000 emplois en plus dans l’économie américaine au mois de juin, annonçait le Bureau des statistiques vendredi. Mais ce n’est qu’un côté de la médaille, avertit Cathie Wood : il y a eu 300.000 emplois en moins du côté des ménages. Voilà, pour l’investisseuse, un signe que les petits commerces sentent déjà la récession, et que les grandes entreprises vont suivre. Analyse.

Il y a dix jours, la célèbre investisseuse avertissait que les Etats-Unis « étaient déjà en récession« . Ce vendredi soir, les données sur les créations d’emplois du mois de juin aux Etats-Unis ont été publiés. Cathie Wood y voit un signe de plus que les Etats-Unis sont déjà en récession.

« Alors que les chiffres de l’emploi non agricole d’aujourd’hui (vendredi, NDLR) étaient plus élevés que prévu, à +300.000, corrigés des révisions, le chiffre de l’emploi dans les ménages, plus large et moins communiqué, était de -300.000, confirmant que l’économie est en récession », décortique-t-elle sur Twitter.

Ce chiffre reprend une plus large population statistique. Le premier, aussi appelé establishment employment, se base sur les fiches de paie des entreprises et des différentes institutions publiques. Le deuxième, aussi appélé household employment, reprend quant à lui les données des petits commerces (sous différentes formes que le premier), des travailleurs agricoles, des indépendants, des aidants proches, et ainsi de suite. Ces données reprennent aussi les personnes qui sont en congé sans solde, alors que le premier chiffre ne le fait pas. Et cette deuxième catégorie serait le vers dans la pomme.

« Sauver leur rentabilité »

« L’enquête sur l’emploi des ménages comprend davantage de petites entreprises – la plus grande source de création d’emplois – que la mesure de l’emploi basée sur les salaires non agricoles. Les grandes entreprises semblent embaucher – peut-être en accumulant de la main-d’œuvre – pour compenser les pénuries de main-d’œuvre passées », continue Cathie Wood. « Selon nous, les petites entreprises tentent de sauver leur rentabilité dans ce qu’elles perçoivent comme une récession. Si elles ont raison, et nous le pensons, les marges bénéficiaires des grandes entreprises qui accumulent la main-d’œuvre souffriront de l’effondrement de leur productivité. »

En résumé, lorsque des entreprises engagent moins, ou se séparent d’employés, pour garantir leur rentabilité, cela est un mauvais signe pour l’économie. Cela veut dire qu’elles font face à plus de frais et de coûts (par exemple à cause de la crise des prix de l’énergie), et/ou à moins d’entrées financières (par exemple à cause de l’impact de l’inflation sur le portefeuille des consommateurs, qui vont éviter certaines dépenses). On parle alors d’un recul de l’activité économique, ce qui peut être un signe de la récession.

Le marché du travail américain et l’inflation

Le marché du travail aux Etats-Unis connaît une situation de pénurie de main-d’oeuvre aigüe. Cela facilite ce qu’on appelle la « grande démission » : il est facile de trouver un (autre) emploi, car il y a plus de poste à pourvoir que de demandeurs d’emploi (jusqu’à deux fois plus, par moment). Pour garder leurs talents, ou attirer de nouveaux candidats, les entreprises doivent mettre la main au portefeuille et augmenter les salaires. Cette situation existe aussi en Europe, mais de manière moins prononcée. Aux Etats-Unis en tout cas, elle alimente, en partie, l’inflation.

Selon des économistes, un retour à une situation plus normale pour le marché du travail aide à ralentir l’inflation. La Fed notamment mise là-dessus pour combattre l’inflation, mais son président Jerome Powell dit que l’institution doit en même temps éviter de trop freiner ce marché du travail, qui est pour lui une jauge importante pour estimer si l’économie supportera les hausses des taux d’intérêt. Un trop fort ralentissement serait, pour Jerome Powell aussi, un élément qui prouve la récession.

Pour d’autres, comme Cathie Wood, un ralentissement de ce marché est un signe clair de récession. Pour la CEO d’Ark Invest, la Fed se base donc sur des « indicateurs lacunaires », et fait des erreurs dans ses politiques monétaires. Mais un changement de cap serait en vue : « bientôt, la Fed assouplira (les hausses des taux d’intérêt, NDLR) en réponse à des indicateurs économiques et d’inflation beaucoup plus faibles », conclut-elle son analyse.

Récession, oui ou non?

Les Etats-Unis sont-ils (ou vont-ils tomber) en récession, oui ou non? De nombreux analystes donnent des estimations différentes. Quel pourcentage de chance pour que cela arrive? A partir de quand? Pour combien de temps? A quel taux de décroissance?

La définition d’une récession est une baisse du PIB pendant (au moins) deux trimestres consécutifs. Or, lors du premier trimestre, l’économie américaine s’est contractée de 1,6%. Les premières données pour le deuxième trimestre seront publiées ce lundi, et certains analystes s’attendent déjà à une baisse de 2%. Dans ce cas, l’économie serait dans une situation de récession appelée technique. Mais l’organe qui décrète que l’économie est en situation de récession est le Bureau des statistiques américain, qui se base sur d’autres critères également.

Au-delà du pur chiffre de la baisse du PIB, les économistes observent aussi des éléments plus structurels, comme notamment l’évolution du marché du travail et de l’emploi. Reste alors à voir si la baisse des emplois ménagers que souligne Cathie Wood est effectivement le signe prémonitoire d’une récession sévère, ou s’il s’agit d’une normalisation plus anodine.

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