Abattre des drones coûte cher à l’Ukraine, la Belgique pourrait l’aider mais refuse de le faire pour le moment

Les missiles utilisés pour abattre les drones suicide russes coûtent cher. La Belgique pourrait avancer une partie de la solution, mais la volonté politique d’aider fait défaut pour le moment.

L’essentiel : les chars antiaériens Gepard fournis par l’Allemagne sont un moyen particulièrement efficace et moins coûteux pour descendre les drones kamikazes et les munitions rôdeuses Shahed-136.

  • La meilleure défense consiste en des systèmes antiaériens, tels que les systèmes NASAMS ou Patriot, qui utilisent un radar puissant et des missiles pour abattre les projectiles. Ils fonctionnent extrêmement bien, et les missiles utilisés sont détenus en grande quantité par plusieurs États membres de l’OTAN. L’Ukraine utilise également des systèmes S-300, qui datent de l’époque soviétique.
  • Le gros problème : ces missiles sont assez chers. Pour chaque exemplaire tiré, le coût est d’environ 140.000 dollars ; les missiles d’un système NASAMS peuvent coûter jusqu’à un demi-million de dollars. C’est énorme, d’autant plus qu’un drone Shahed ne coûte qu’environ 20.000 dollars.
  • Il existe cependant une alternative moins coûteuse : l’Allemagne a déjà fourni 30 blindés antiaériens Gepard, qui n’utilisent pas de missiles, mais deux canons particulièrement puissants capables de tirer 1.100 obus de 35 mm par minute. « Le Gepard est efficace contre les drones et les missiles de croisière, mais cela ne suffit pas », explique Iouri Ihnat, le porte-parole des forces aériennes ukrainiennes, cité par Politico
  • En plus de ceux qui ont été livrés, l’Allemagne a promis d’en livrer sept autres. La Belgique pourrait faire de même : 38 Gepard prennent la poussière dans les hangars de l’OIP, une société privée basée à Audenarde qui achète, modernise et revend des véhicules blindés. Les appareils proviennent des stocks de l’armée belge, qui s’en est débarrassée après une énième série de réductions de coûts.

Soutien belge : Une livraison n’est pas prévue pour le moment.

  • Des sources au sein de l’OIP confirment qu’il y a bien eu un contact avec le gouvernement belge, pour racheter les Gepard et les donner à l’Ukraine. La ministre de la Défense Ludivine Dedonder (PS) a déclaré à La Libre en novembre qu’elle n’avait pas l’intention de racheter ces engins.

Ces équipements étaient vendus à l’époque pour 15.000 à 20.000 euros pièce, les véhicules étaient en fin de vie. Des travaux ont été effectués pour les remettre en état, mais l’entreprise facture désormais jusqu’à 500.000 euros par véhicule. Je comprends que le travail n’est pas gratuit, mais la marge est excessive. Les entreprises doivent aussi faire un effort dans cette guerre.

Ministre de la Défense Ludivine Dedonder (PS)
  • En outre, les engins eux-mêmes ne pourraient plus être rendus opérationnels. L’électronique des Gepard serait trop vieille pour les rendre opérationnels, ont confirmé des sources proches du dossier à notre rédaction début décembre. Pourtant, ces appareils pourraient s’avérer utiles, ne serait-ce que pour servir de pièces de rechange pour réparer ceux fournis par l’Allemagne.

Problème sous-jacent : Les Gepard sont confrontés à un problème plus grave, à savoir le manque de munitions.

  • Comme les Gepard n’ont été construits qu’en nombre limité et que leurs canons Oerlikon utilisent un type de munitions bien particulier, la gestion des stocks est cruciale. L’Allemagne possède des obus, mais a besoin de l’approbation de la Suisse pour les exporter. Et la Confédération helvétique y met son veto.
  • Le problème, c’est que les munitions étaient à l’origine fabriquées en Suisse, par la société Oerlikon-Bührle, aujourd’hui rachetée. Selon les termes du contrat, la Suisse peut opposer son veto si les projectiles de 35 millimètres sont revendus ou cédés. La demande de la ministre allemande de la Défense, Christine Lambrecht, de faire don des obus à l’Ukraine n’a pas eu l’approbation de Berne.
  • Tout est lié à la neutralité de la Suisse. Depuis 1815, le traité de Paris stipule que la Suisse ne participera pas aux conflits. Cette ligne s’étend également au soutien des conflits, comme c’est le cas actuellement en Ukraine. Une situation similaire s’est produite en mai dernier, lorsque le Danemark a voulu fournir 25 véhicules blindés de combat Mowag Piranha IIC à l’Ukraine. Mowag est également une société suisse, et le gouvernement a stoppé la livraison.
  • Seule une poignée d’autres pays possèdent des Gepard et il est difficile de trouver des munitions de 35 mm. Il est peu probable que des pays comme la Jordanie ou le Qatar viennent à la rescousse de sitôt. La Grèce aurait encore des obus de 35 mm en stock, mais ça s’arrête là.
  • Il y a un petit point positif : la société norvégienne Nammo fabrique toujours les bonnes munitions et est également prête à les fournir. Cependant, l’entreprise n’est pas en mesure d’augmenter rapidement sa production, auparavant limitée, de ce produit.

(CP)

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