Les Ukrainiens interceptent de plus en plus de missiles ultramodernes des Russes, vraisemblablement grâce aux systèmes Patriot qui leur ont été livrés. De plus ils reçoivent enfin eux aussi des armes à longue portée. Ce sont deux nouvelles victoires symboliques.
Vers un retournement de situation dans la « guerre des missiles » entre Russes et Ukrainiens ?
Pourquoi est-ce important ?
Depuis l'hiver dernier, l'armée russe a opté pour une campagne de bombardement à outrance sur les villes et les infrastructures d'Ukraine, en ciblant intentionnellement les populations civiles. Mais la campagne est coûteuse en précieux missiles, d'autant que les Ukrainiens semblent mettre au point des contre-mesures de plus en plus efficaces.Dans l’actualité : 27 missiles russes tirés sur l’Ukraine ont été abattus dans la nuit du 16 au 17 mai, selon Kiev. Parmi eux, on compterait 6 missiles hypersoniques Kinjal, apparemment la totalité de la vague qui avait été tirée. Alors que ces engins étaient réputés quasiment impossibles à intercepter.
Une arme pas si absolue
- Le Kinjal est à l’origine un missile antinavire, tiré depuis un avion MiG-31K et capable de manœuvrer en vol, tout en atteignant des vitesses hypersoniques, jusqu’à Mach 10, soit 3.400 m/s. Il est par conséquent tellement rapide et imprévisible que le détecter, puis l’intercepter, paraissait quasiment impossible. La Russie présentait d’ailleurs ce missile – qui peut emporter une tête nucléaire tactique – comme une arme miracle.
- Paraissait, car l’Ukraine a réussi à en intercepter un premier en vol le 6 mai dernier. Au temps pour le mythe de l’arme invincible, d’autant que depuis, 6 autres Kinjal auraient été abattus en vol, selon les déclarations de Kiev. Les tirs russes auraient toutefois endommagé une des batteries de missiles intercepteurs Patriot de l’Ukraine.
- Ça n’était déjà pas une victoire pour la Russie d’utiliser ce genre de bijou de haute technologie pour bombarder des cibles civiles, alors qu’ils ont été conçus pour chasser le porte-avions.
- Les vagues de tirs des Russes semblent d’ailleurs moins nourries par rapport à l’hiver dernier, bien que ceux-ci s’adaptent en saturant d’abord les défenses de drones low cost qui partent en avant des missiles destinés à causer des dommages et à tuer. Mais visiblement, les Ukrainiens aussi s’adaptent, et bénéficient de nouvelles batteries de défense de conception américaine.
Côté offensif, les Ukrainiens reçoivent aussi du nouveau matériel : le Royaume-Uni s’est engagé la semaine dernière à leur livrer des missiles à longue portée Storm Shadow, de conception franco-britannique.
Double victoire (symbolique)
- Il ne s’agit cette fois pas d’un engin à la conception révolutionnaire, et encore moins hypersonique : le Storm Shadow n’atteint « que » les 1.000 km/h, soit Mach 0,8 à 0,95 selon son altitude. Mais il évolue à très basse altitude, seulement 30 à 40 m, ce qui est une autre manière de se rendre difficilement détectable.
- Lui aussi lancé depuis un avion, il a l’avantage de frapper loin : jusqu’à 560 km une fois qu’il a quitté son vecteur, à comparer toutefois avec les 2.000 km supposés du Kinjal. C’est le premier système d’arme à longue portée livré en Ukraine par les Occidentaux, qui avaient longtemps estimé qu’il s’agissait-là d’un risque de surenchère à éviter. Même les systèmes de lancement HIMARS (portée : 80 km avec les 6 missiles sol-sol guidés habituels) avaient longtemps été pesés dans la balance.
- Reste à l’adapter aux avions ukrainiens, vraisemblablement des Su-24, 25 ou 27 et des MiG-29. Cela n’aurait rien d’insurmontable, et cela signifie aussi que ceux-ci vont peut-être se montrer plus actifs dans le ciel. Quitte à s’exposer, mais aussi à contraindre les Russes à faire de même. Il semblerait que certains de ces missiles aient déjà été tirés.
- Ce sont en tout cas là deux victoires symboliques des Ukrainiens : l’une sur les menaces sur leurs villes, et l’autre face aux frilosités occidentales à leur donner des armes capables de porter jusqu’en Russie.
- La conséquence logique serait que, face à la menace, les Russes doivent éloigner leurs bases hors de portée, rallongeant d’autant une logistique qui a été leur point faible par le passé.