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L’Occident hors-jeu ? La diplomatie peut très bien se faire sans lui

L’Occident hors-jeu ? La diplomatie peut très bien se faire sans lui
Ebrahim Raïssi, Mohammed ben Salmane, Xi Jinping. | Getty/ Fotojet

Les pays arabes renouent avec l’Iran sans passer par Washington, et le président chinois Xi Jinping arrive à se faire passer pour un émissaire de la paix entre la Russie et l’Ukraine. Le grand jeu diplomatique n’est plus une compétition qui se joue essentiellement de part et d’autre de l’Atlantique-Nord.

Pourquoi est-ce important ?

Le bloc constitué des USA et (dans une moindre mesure) de l'Union européenne pèse encore et toujours très fort sur les relations internationales. Or, c'est précisément ce qu'une bonne partie du reste du monde lui reproche : une vision du monde trop calée sur les intérêts occidentaux, à laquelle d'autres blocs d'influence tentent de proposer des alternatives.

Petits pas vers la paix dans le monde arabo-iranien

Dans l’actualité : l’Arabie saoudite renoue avec la Syrie, les deux pays convenant de la réouverture de leurs ambassades après 10 ans de rupture diplomatique.

  • Selon Reuters, qui cite trois sources distinctes et concordantes, les deux pays auraient convenu de rouvrir leurs représentations diplomatiques après la fête de l’Aïd, soit dans la deuxième quinzaine d’avril. Les Émirats arabes unis avaient déjà sauté le pas en 2018.
  • C’est un pas en avant négligeable, alors que le régime de Bachar al-Assad est relégué parmi les parias internationaux depuis 2011 et le déclenchement de la guerre civile. Mais le régime présidentiel de Damas a, depuis, pu reconquérir l’essentiel du nord du pays avec l’aide de la Russie et de l’Iran.
  • Or, l’Arabie saoudite vient de conclure un accord avec l’Iran, malgré une hostilité politique et religieuse qui court depuis des décennies. Le roi Salmane d’Arabie saoudite a invité le président iranien Ebrahim Raïssi, à se rendre prochainement à Riyad, et des ambassades devraient aussi rouvrir dans les mois à venir.
  • Outre les tensions entre musulmans sunnites et chiites, les deux pays sont en rivalité pour étendre leur influence en Irak, le gouvernement central du pays n’ayant plus de véritable poids depuis l’invasion américaine de 2003 – et l’épisode aussi court que sanglant de l’État islamique n’a fait que jeter à bas ce qui lui restait de légitimité.

Ce sont là des signes avant-coureurs prometteurs, dans une région du monde ravagée par la guerre et les rivalités. En Syrie, mais aussi au Yémen, où Iran et Arabie saoudite soutiennent chacun des camps différents dans la guerre civile. Mais ce qui doit être remarqué, c’est que tout ce processus semble s’enclencher sans que les États-Unis d’Amérique y soient conviés. Comme si les tentatives de Washington de raffermir son influence dans la région depuis la guerre d’Irak de 2003 avaient plutôt mis tout le monde d’accord : on peut discuter sans leur intervention. Un processus qui a pris 20 ans. Ça n’est pas forcément une bonne nouvelle non plus pour Israël, qui voit un allié des USA – l’Arabie saoudite – tendre la main vers son pire ennemi de Téhéran, que l’État hébreu menace régulièrement de frappe préventive.

Et de l’autre côté, il y a la Chine

Avec la visite cette semaine de Xi Jinping à Vladimir Poutine, l’Empire du Milieu a pu se positionner comme un acteur de poids sur l’échiquier mondial – un rôle qu’il a toujours voulu incarner. Et les déclarations du président chinois dans un journal russe étaient limpides : « Il n’existe pas de modèle universel de gouvernement ni d’ordre mondial où la parole décisive appartient à un seul pays. »

  • Le message est clair : Pékin ne veut pas d’une paix ukraino-russe frappée du sceau de Washington. Les rumeurs – non confirmées – d’un entretien dans la foulée entre Xi Jinping et le président ukrainien Volodymir Zelensky vont dans ce sens : si on dresse une table des négociations pour l’après-conflit, la Chine doit y avoir un siège. Au moins à rang égal avec les Occidentaux.
  • C’est bien sûr aussi à son arrière-cour que songe Xi : des USA qui ne seraient plus capables de faire la pluie et le beau temps en Europe perdraient forcément de leur éclat en Asie. Et c’est là que la Chine pousse ses pions, en particulier autour de Taïwan.
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