Ils sont sans doute des milliers à vivre dans la peur que les talibans ne découvrent leur implication avec les occidentaux. Ou à simplement tenter d’obtenir un autre son de cloche sur la situation du pays. Pour ces Afghans qui tentent de s’échapper, WhatsApp était un dernier fil d’Ariane vers une chance de salut. Hier, la grande panne leur a fait penser que tout était perdu.
En occident, ce fut une soirée pour le moins surréaliste que celle de ce 4 octobre. Confrontés à la panne générale des réseaux sociaux et des messageries appartenant au groupe Facebook, les internautes se sont rabattus sur les concurrents encore fonctionnels, comme Twitter, ou les réseaux alternatifs tels que Discord ou Telegram. Certains ont tout simplement opté pour un bon bouquin. Et si la crainte que tout ne soit pas de retour le lendemain était présente, cette parenthèse a globalement été prise comme une bonne occasion de se moquer de la firme de Mark Zuckerberg.
Un dernier lien avec le reste du monde
Mais dans d’autres pays, cette coupure inopinée des réseaux avait véritablement de quoi provoquer un vent de panique. Et c’est particulièrement le cas en Afghanistan, où la messagerie cryptée WhatsApp est devenue, pour beaucoup de personnes, le seul lien sûr avec le monde extérieur. De nombreux Afghans menacés par le nouveau régime des Talibans et qui n’ont pas pu évacuer le pays dans le pont aérien improvisé d’août dernier se retrouvent avec ce dernier fil d’Ariane pour espérer de l’aide. Et de véritables réseaux d’exfiltration tentent de maintenir ces lignes, comme Human First Coalition, une association qui s’est créée dès qu’il est apparu clair que des dizaines de milliers d’Afghans ayant, d’une manière ou d’une autre, aidé les armées occidentales seraient abandonnés à la vengeance des talibans.
Son fondateur, Safi Rauf, a lui-même servi comme linguiste et conseiller culturel pour les forces spéciales américaines en Afghanistan. Grâce à WhatsApp, il a pu maintenir le contact avec près de 2.500 personnes menacées. Jusqu’à hier soir: « Des personnes dans tout l’Afghanistan essaient de communiquer avec moi via WhatsApp et je n’arrive pas à les joindre, c’est un vrai cauchemar » confiait-il hier soir à Military Times, un média spécialisé dans l’actualité liée de près ou de loin aux engagements américains.
Dépendance à un réseau unique
Après 6h de chaos, les réseaux du groupe Facebook sont progressivement redevenus fonctionnels, au soulagement général. Mais cette histoire met en évidence à quel point nous sommes dépendants du fonctionnement d’un seul réseau, celui de Mark Zuckerberg, alors que des alternatives existent. Or si pour beaucoup de gens, une coupure comme celle d’hier est très pénible, elle fait office de catastrophe pour les gens pour qui ces messageries sont vitales. D’autant que, sans information extérieure, ils ne peuvent savoir s’il s’agit là d’un problème global d’une ampleur inédite, ou si des organisations telles que les talibans sont soudainement capables de pirater les réseaux.
« Des coupures comme celle-là affectent notre capacité à obtenir des informations de la part de nos Afghans » confirme Mike Jason, colonel à la retraite et directeur de Allied Airlift 21, une ONG qui a fait évacuer auprès de 700 personnes d’Afghanistan. « Cependant nous avions établi d’autres plates-formes de communication et elles sont toujours disponibles. » On en dira pas plus, tant ces autres fils d’Ariane ne doivent pas être découverts.
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