Environ la moitié de l’argent que l’Italie a reçu du budget de l’UE entre 2015 et 2020 est tombé entre les mains de la mafia. C’est en tous cas ce qu’affirme le criminologue Vincenzo Musacchio au média EUobserver. Il s’agirait d’un montant pouvant atteindre les 35 milliards d’euros.
Vincenzo Musacchio est professeur de criminologie au Rutgers Institute on Anti-Corruption Studies (RIACS) à Newark. Il note ‘qu’entre 2015 et 2020, l’UE a alloué environ 70 milliards d’euros à l’Italie sous la forme de fonds structurels et d’investissement. La moitié de ces fonds ont fini dans les mains du crime organisé’.
Lui et d’autres experts mettent en garde contre la possibilité que ‘les nouveaux flux d’argent provenant du plan de relance Corona de 750 milliards d’euros se traduisent par une injection financière supplémentaire pour la mafia’, rapporte l’éditeur Elsevier. Avec 209 milliards d’euros, l’Italie est le pays qui reçoit le plus d’argent issu de ce fonds.
Corruption locale
Les différents clans mafieux n’ont pas besoin de recourir à la violence pour s’emparer des fonds européens. La corruption est la méthode la plus courante, par exemple au sein des administrations publiques locales. ‘Et c’est ce qui va se passer avec le fonds de relance’, prédit Stefania Pellegrini, professeur à la faculté de droit de l’université de Bologne.
De manière générale, la mafia exploite le chaos provoqué par l’urgence Covid-19 pour s’infiltrer encore plus profondément dans les secteurs où elle est déjà présente, comme les soins de santé, les services mortuaires ou l’élimination des déchets (médicaux et non-médicaux).
‘Toutes les grandes entreprises doivent s’impliquer dans la gestion des déchets. En confiant cette tâche à la mafia, on peut réaliser des économies de 90% par rapport aux systèmes officiels et légaux d’élimination des déchets’, ajoute Pellegrini.
Échelle européenne
La question se pose à l’échelle européenne: les organisations mafieuses italiennes ont tendance à blanchir leur argent dans des pays européens autres que l’Italie, comme l’Espagne, l’Allemagne (où la ‘ndrangheta calabraise est très forte), les Pays-Bas et le Royaume-Uni (post-Brexit donc).
L’argent de Bruxelles a aussi traditionnellement fait saliver les dirigeants d’Europe de l’Est. Dans la Bulgarie du Premier ministre Bojko Borissov, ‘1 km d’autoroute coûte trois fois plus cher qu’en Norvège’, explique Krassen Stanchev, professeur bulgare d’analyse macroéconomique à l’université de Sofia. Début avril, il a écrit un article sur le site brusselsreport.eu avec le titre suivant: ‘En Bulgarie, le « système Borissov » est maintenu en vie grâce aux fonds européens’.
Les contrôles sur l’argent de l’UE en Europe de l’Est sont pratiquement inexistants. Et le système clientéliste y prospère.
Belgique
Selon les dernières données de Statista, la Belgique contribue au budget de l’UE à hauteur de 3,86 milliards d’euros. Cela place notre pays à la huitième place dans la liste des contributeurs.
Les Pays-Bas apportent la plus grande contribution nette par citoyen au budget annuel de 145 milliards d’euros de l’UE. Si le fonds de relance Corona de 750 milliards d’euros est approuvé, ce chiffre sera encore plus élevé.
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