La Banque centrale européenne (BCE) n’a pas relevé ses taux d’intérêt la semaine dernière. Cette décision n’est pas une surprise. Cependant, un autre élément change : la banque centrale va accélérer la réduction de son bilan à partir de la mi-2024. Qu’est-ce que cela signifie exactement ?
La BCE accélère la réduction de son bilan : cela impacte-t-il votre argent ?

Pourquoi est-ce important ?
La BCE dispose de plusieurs outils pour ralentir ou simplement alimenter l'inflation. Elle peut notamment modifier les taux d'intérêt à court terme. En outre, l'institution monétaire peut vendre des titres de créance (resserrement quantitatif) ou en acheter (assouplissement quantitatif), afin d'injecter plus ou moins d'argent dans l'économie réelle. Cela a également un impact sur les taux d'intérêt à long terme.Contexte : la BCE a mené une politique monétaire accommodante pendant une longue période avant de changer son fusil d’épaule à l’été 2022.
- Pendant cette période, le taux de dépôt – la commission que les banques perçoivent sur l’argent qu’elles déposent auprès de la banque centrale – a été de -0,5 % pendant un certain temps. Les institutions financières ont donc dû payer un « taux d’intérêt punitif » sur les dépôts d’épargne excédentaires. Entre-temps, les taux d’intérêt ont augmenté de 450 points de base pour atteindre 4 %, un niveau record.
- En outre, la BCE a acheté des quantités massives de dette depuis 2015. Au total, elle a accumulé près de 5.000 milliards d’euros d’obligations.
Qu’est-ce qui a changé ? Outre les hausses de taux d’intérêt, la banque centrale a également commencé à réduire légèrement son bilan.
- L’institution monétaire avait déjà commencé à réduire son portefeuille APP (asset purchase programme) en ne réinvestissant plus entièrement le produit des obligations arrivant à échéance dans de nouveaux titres.
- Elle fera de même pour son portefeuille PEPP (programme d’achat d’urgence en cas de pandémie) à partir de la mi-2024. L’objectif est de réduire ce portefeuille de 7,5 milliards d’euros par mois en moyenne. Jusqu’à présent, la BCE prévoyait de réinvestir intégralement les obligations arrivant à échéance au moins jusqu’à la fin de 2024. Ce programme prend donc fin plus tôt que prévu.
Impact sur vos finances
Clarification : le désendettement, également appelé resserrement quantitatif (QT), entraîne une hausse des taux d’intérêt à long terme (en théorie). En effet, davantage de titres de créance entrent sur le marché, ce qui entraîne une baisse des prix et donc une hausse des rendements. Les banques basent la tarification de leurs crédits hypothécaires (à taux fixe), entre autres, sur les taux d’intérêt à long terme. Ces prêts vont-ils devenir plus chers ?
- Les taux d’intérêt à long terme ne devraient pas monter en flèche. Après tout, il s’agit d’un modeste désendettement du bilan.
- Le taux d’intérêt à dix ans de la Belgique oscille aujourd’hui autour de 2,7 %. Johan Van Gompel, économiste immobilier à la KBC, s’attend à ce qu’il atteigne 3,2 % d’ici la fin de l’année, avant de redescendre légèrement à 3,1 % d’ici la fin de l’année 2024.
- « Pour les taux hypothécaires, cela signifie qu’en dehors du fait commercial, nous ne devons pas craindre une nouvelle hausse des taux d’intérêt. Mais il ne faut pas non plus s’attendre à une chute brutale des taux d’intérêt », a-t-il déclaré à De Tijd.
- Selon John Romain d’Immotheker, les taux hypothécaires peuvent encore augmenter légèrement, mais nous sommes très proches d’un pic. Il ajoute que les tensions géopolitiques, telles que la guerre entre l’Ukraine et la Russie, pourraient affecter les taux d’intérêt à long terme.
À noter : Les hausses de taux des banques centrales ont poussé les taux à court terme plus haut que les taux à long terme. Le taux belge à un an est actuellement légèrement supérieur à 3,5 %, soit plus de 80 points de base de plus que le taux à 10 ans.
- Par conséquent, les prêts variables sont actuellement plus chers que les prêts fixes. Selon le baromètre des taux d’intérêt d’Immotheker, vous payez aujourd’hui 3,35 % pour un crédit logement fixe sur 20 ans. Si vous optez pour une formule de même durée dont le taux d’intérêt est adapté annuellement, le taux passe à 4,06 %.
Et votre épargne ?
Les taux d’épargne suivent l’évolution des taux d’intérêt à court terme, qui sont influencés par la politique de taux d’intérêt de la BCE. La semaine dernière encore, l’institution monétaire a appuyé sur le bouton pause. Par conséquent, le fait qu’elle accélère la réduction de son bilan n’aura pas d’impact direct sur les taux d’épargne.
- Si les taux hypothécaires restent encore longtemps à des niveaux élevés, les banques verront leurs bénéfices augmenter. Peu à peu, elles pourront remplacer les prêts bon marché qu’elles ont contractés pendant la politique monétaire accommodante par des contrats plus lucratifs.
- Ces crédits immobiliers bon marché, selon les banques traditionnelles, sont l’une des raisons pour lesquelles elles ne peuvent pas augmenter trop fortement les taux d’épargne, car les marges bénéficiaires seraient mises sous pression. Les résultats trimestriels de cette année ont déjà montré que les marges d’intérêt ont fortement augmenté.
- Il n’est donc pas exclu que les institutions financières puissent encore augmenter les taux d’épargne lorsque ces prêts immobiliers bon marché disparaîtront de leur portefeuille. Bien entendu, il ne s’agit pas d’une garantie. En outre, elles prennent également en compte d’autres facteurs, notamment les taux des concurrents.
(JM)