Vers un 4e dépassement de l’indice pivot en 9 mois: l’indexation de trop pour les employeurs ?

Août 2021, décembre 2021, février 2022 et sans doute avril 2022. Le Bureau du Plan envisage un nouveau dépassement de l’indice pivot conséquent à une inflation qui grimpe encore. Un dépassement de l’indice pivot signifie une indexation automatique des salaires des fonctionnaires et des allocations. Ce qui serait certainement très mal perçu par les employeurs qui demandaient récemment un saut d’index, sans être entendus.

  • L’inflation a grimpé à 7,6% ce mois de janvier, un record depuis 1983. Une autre époque. Elle pourrait même frôler les 8% le mois prochain, selon les prévisions du Bureau fédéral du plan.
  • Sur base annuelle, l’inflation devrait être de 5,8% en 2022 et de 0,8% en 2023, pour 2,44% en 2021 et 0,74% en 2020.
  • La bonne nouvelle pour notre portefeuille, c’est que le Bureau du plan estime comme la BCE que l’inflation est temporaire et devrait finir par se calmer en cours d’année.
Bureau fédéral du plan
  • Mais en attendant, ce sont les employeurs qui s’inquiètent. Le dépassement de l’indice pivot de décembre dernier mène à une hausse des allocations et des salaires de 2% respectivement en janvier et en février 2022.
  • Dans sa précédente analyse, le Bureau du plan envisageait un nouveau dépassement de l’indice pivot en février 2022, ce qu’il confirme encore une fois. L’indexation de 2% devrait s’opérer en mars et en avril.
  • La nouveauté, c’est ce 4e dépassement en moins d’un an pour le mois d’avril 2022 qui engendrerait une nouvelle indexation de 2% des allocations et des salaires dans la fonction publique en mai et en juin.
  • Ce qui fait une hausse de 8% en moins de 12 mois. Si l’indexation commence par les fonctionnaires, la tradition veut que le secteur public suive ensuite, ce qui fait frémir la FEB.
  • L’organisation patronale mettait en garde le mois dernier contre « l’explosion des coûts » qui conduirait la Belgique à devenir « le malade de l’Europe », l’indexation automatique des salaires étant presque unique sur le continent (mis à part le Luxembourg chez nos voisins directs).
  • Lors de sa précédente analyse, la FEB estimait déjà qu’une indexation de 6% entre 2021-2022 handicaperait la compétitivité de nos entreprises de 2 à 3%. Or, elle estime notre handicap salarial entre 10 à 11% par rapport à l’Allemagne, les Pays-Bas et la France.
  • En Flandre, le Voka tablait lui avant ce rapport sur une indexation de 7% en 2021-2022: « Pour le secteur privé, cela signifie un coût supplémentaire d’au moins 10,5 milliards d’euros ». « À cause de l’indexation automatique des salaires, les entreprises recevront cette facture plus rapidement et plus directement que dans les pays voisins où ce système n’existe pas. Cela met une pression immense sur la compétitivité de nos entreprises. »
  • Les deux organisations plaidaient donc déjà pour un saut d’index, ce qui leur a été refusé par la Vivaldi. Tous les partis ont été unanimes le mois dernier. Mais la pression la plus importante émane certainement du PS qui a déjà dit qu’il ne tolèrerait pas de saut d’index tant que le parti serait au pouvoir.
  • Le saut d’index est symboliquement rattaché au gouvernement Michel et à la suédoise. Un saut d’index a eu lieu en juin 2015 malgré la grogne des syndicats. Le même Premier ministre a dû ensuite renoncer à un autre saut d’index en 2018 face à la pression sociale.
  • Le PS ne peut se permettre de se mettre à dos les organisations des travailleurs, dans un contexte de concurrence avec le PTB dans le sud du pays.

Le détail: les nouvelles mesures énergies vont-elles éviter l’indexation ?

  • L’inflation est intimement liée aux prix de l’énergie, particulièrement en Belgique. Dès lors, le Bureau fédéral du plan n’écarte pas la possibilité que les nouvelles mesures envisagées par la Vivaldi pour soulager la facture des ménages parviennent à éviter le nouveau dépassement d’avril. Une nouvelle analyse doit être réalisée ce 17 février.
  • Mais pourquoi donc notre pays est-il plus touché par l’inflation que chez nos voisins ? C’est lié au coût de l’énergie. Notre pays dépend plus qu’ailleurs de la fluctuation des prix. C’est particulièrement vrai pour le gaz qui pèse pour 50% dans la facture d’énergie. Il n’existe pas d’accises sur le gaz qui peuvent servir de tampon quand les prix fluctuent.
  • Ensuite, nous sommes dans un marché totalement libéralisé, au contraire de la France qui est propriétaire d’EDF. Chez nos voisins, le gouvernement a bloqué les prix jusqu’au mois d’avril. Le risque est supporté par l’État et pas par les acteurs privés, moins enclins à faire des cadeaux.
  • Or, il y a un gros trou dans les 3 mesures décidées par la Vivaldi: la classe moyenne qui se chauffe au gaz ou au mazout. Ces personnes qui sont « trop riches » que pour bénéficier du tarif social, mais qui sont « trop pauvres » que pour ne pas ressentir l’augmentation du coût de l’énergie.
  • Car la baisse de la TVA ne concerne que l’électricité. Un moyen pour la Vivaldi de ne pas subventionner de l’énergie fossile, se défend-elle. En tout, les différentes mesures (hors tarif social) devraient rapporter 150 à 165 euros pour chaque famille du pays. Sera-ce suffisant ?
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