Les sanctions envers l’économie russe ont été drastiques, mais l’UE se voit tentée d’entrouvrir la porte, afin de garantir le maintien des accords d’exportation de céréales via la mer Noire. L’enjeu n’est autre que l’approvisionnement alimentaire mondial, et cela reste une belle carte dans la manche de Vladimir Poutine.
Quand l’UE envisage de faire des concessions : une banque russe de retour sur SWIFT contre un accord sur les céréales

Pourquoi est-ce important ?
C'était l'une des premières grandes sanctions prises à l'encontre de la Russie, et l'une des plus radicales : l'exclusion des principales banques du pays du système de messagerie interbancaire, SWIFT, ce qui faisait de Moscou un véritable paria de l'économie mondiale. Une mesure contre laquelle le Kremlin a voulu opposer un système alternatif, mais il semblerait qu'un an et demi plus tard, l'UE soit prête à remettre l'accès à SWIFT dans la balance.Entrouvrir le SWIFT
Dans l’actualité : selon le Financial Times, l’UE serait prête à laisser une grande banque russe se connecter à nouveau à SWIFT, si cela peut garantir la pérennité de l’accord sur l’exportation des céréales ukrainiennes via la mer Noire.
- Cinq sources différentes qui ont voulu garder l’anonymat confirment que l’idée serait que la Banque agricole russe se créerait une filiale chargée des paiements liés aux exportations de céréales, et qui serait autorisée à se connecter au système de messagerie interbancaire.
- Cette idée a été discutée par les 27 chefs d’État et de gouvernement de l’UE la semaine dernière, selon le quotidien, alors que l’enjeu consiste à convaincre Moscou de maintenir ouverte la voie maritime via la mer Noire, qui a été âprement négociée par l’ONU l’année passée, mais dont l’accord arrive à son terme le 17 juillet prochain.
- Or cette voie est essentielle pour que l’Ukraine puisse exporter sa production agricole et donc renflouer quelque peu ses caisses, mais aussi et surtout fournir une bonne partie du monde en denrées de première nécessité. Car l’Ukraine est un grenier à blé, maïs, et tournesol, et un rouage essentiel de l’approvisionnement alimentaire mondial.
- L’année dernière, la guerre avait provoqué des troubles dans différents pays d’Afrique et du Moyen-Orient alors que les prix des aliments de base montaient en flèche. Un début de crise frumentaire que Moscou n’a pas manqué d’instrumentaliser en blâmant les pays occidentaux, alors que le gouvernement russe en est le seul vrai responsable.
La « moins pire » des concessions
Pour l’UE, cet accord sur les céréales doit être préservé à tout prix, et les Russes le savent et haussent le ton. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a déclaré la semaine dernière que Moscou ne voyait aucune raison d’accepter une prolongation de l’accord.
- Une ouverture du SWIFT serait considérée comme la « moins pire » des concessions, mais le débat reste vif. D’autant que la Banque agricole russe est 100% publique, donc contrôlée depuis le Kremlin. Son ancien directeur général, Dmitry Patrushev, est l’actuel ministre de l’Agriculture, note le Financial Times.
- Les pays de la frange orientale de l’UE, les Baltes et les Polonais en tête, sont opposés à toute concession. Mais l’enjeu de cette décision ne porte pas que sur l’Ukraine ou les caisses du Kremlin : il s’agit d’éviter une nouvelle déstabilisation des pays dépendants des importations alimentaires.