Web Analytics

L’un des plus grands pollueurs au monde promet d’enfin se pencher sur le problème des fuites de méthane

L’un des plus grands pollueurs au monde promet d’enfin se pencher sur le problème des fuites de méthane
Le président Serdar Berdimuhamedow a promis d’agir. | Getty / Fotojet

Le Turkménistan possède les cinquièmes plus grandes réserves de gaz au monde, ce qui en fait un pays bien placé pour incarner le nouvel espoir d’une Europe qui veut se sevrer de la source russe – quand bien même, il s’agit d’une dictature post-soviétique. Mais ce gaz fuit dans des quantités difficilement imaginables, classant le pays parmi les plus gros pollueurs.

Dans l’actualité : le président turkmène Serdar Berdimuhamedow, qui a succédé à son père l’année dernière (celui-ci régnait sans partage depuis 2006) a ratifié deux initiatives visant à réduire les émissions pharamineuses de méthane de son industrie pétrochimique, relève The Guardian.

Des fuites visibles depuis l’ISS

  • Le pays va ainsi rejoindre les 150 autres qui font partie de l’initiative « Global Methane Pledge », qui vise à réduire les émissions mondiales de méthane de 30 % d’ici à 2030.
  • Il va aussi, à l’échelle nationale, mettre en place une commission interdépartementale dont la seule mission sera la réduction des émissions, largement dues d’ailleurs à des fuites dans le réseau turkmène. Le président Serdar Berdimuhamedov a approuvé la feuille de route sur le méthane pour 2023-2024 lors d’une réunion du cabinet le 10 juin. Les mesures comprennent l’amélioration de la législation nationale et la coopération avec des partenaires étrangers et les Nations unies.

Or ces fuites tiennent plutôt du tsunami gazier : en octobre dernier, l’installation d’un spectromètre sur la Station spatiale internationale a mis en évidence les super-émetteurs de la planète, même si ça n’était pas sa fonction première. Et il a découvert 12 panaches de gaz autour des installations d’extraction turkmène, parfois larges de 32 km. Pour ce genre de situation, on parle de « super-émetteurs ». Et s’il y en a d’autres, c’est souvent pour citer le Turkménistan.

  • Plus tôt dans l’année, des chercheurs européens avaient mis en évidence, grâce à l’imagerie satellite, l’impact des fuites sur nos émissions de gaz à effet de serre. Ils ont découvert des fuites partout, qui n’ont rien d’événements exceptionnels.
  • Or, ces émanations représentent un terrible manque à gagner tout en pouvant être facilement colmatées pour la plupart. Selon les scientifiques, si les fuites connues étaient réparées, les USA pourraient économiser 1,6 milliard dollars, la Russie 4 milliards et le Turkménistan 6 milliards.
  • C’est probablement un argument qui a fait mouche auprès du nouveau président turkmène, en plus de l’occasion de redorer l’image de son pays sur la scène internationale, alors qu’on pourrait justement avoir bien besoin de son gaz.
  • Le pays espère aussi probablement attirer l’aide étrangère sous le prétexte de colmater ses fuites, note The Guardian, qui rappelle qu’en 2022, les fuites de méthane provenant des deux principaux gisements de combustibles fossiles du pays émettaient plus que l’ensemble du Royaume-Uni.
  • La rencontre le 2 juin dernier entre Berdimuhamedow et John Kerry, l’envoyé spécial des États-Unis pour le climat, peut avoir débouché sur des promesses aptes à motiver le monde politique turkmène.

Il est temps de s’y mettre

« Il est très encourageant de constater qu’un effort mondial est en cours pour aider le Turkménistan à réduire ses émissions de méthane et que les autorités locales sont réceptives. Mais après les annonces, le vrai travail commence pour réduire réellement les émissions. Les opérateurs au Turkménistan doivent effectuer des mesures sur chacun de leurs actifs, rendre compte de manière transparente et atténuer les émissions de manière efficace. »

Manfredi Caltagirone, directeur de l’Observatoire international des émissions de méthane des Nations-unies
Plus
04:00