Dans l’actu : Shou Zi Chew entendu par les législateurs américains.

• Ce jeudi, le patron de TikTok a été amené à s’expliquer devant les législateurs du comité de l’énergie et du commerce de la Chambre des représentants américaine.
• Les législateurs lui reprochent essentiellement deux choses : les liens de ByteDance avec le gouvernement chinois et les effets de son application sur la santé (mentale) des jeunes Américains.

Seul contre tous

Les attaques : vives.

• « Bienvenue au comité le plus bipartite du Congrès ». Dès l’ouverture des débats, le ton a été donné par le représentant Buddy Carter. Et il ne s’est pas trompé. Républicains et démocrates n’ont pas ménagé Shou Zi Chew durant une audition qui a duré cinq heures.
  • « Chew a fait un travail crédible en se défendant ainsi que son application devant une salle de législateurs largement hostiles qui avaient l’intention de remettre en question chacun de ses mots, l’empêchant même de répondre à plusieurs reprises », commente ainsi Bloomberg.
• D’une part, les législateurs ont reproché à TikTok et à ses algorithmes particulièrement redoutables leurs conséquences très néfastes sur ses (jeunes) utilisateurs. À savoir un fort potentiel addictif et des propensions à générer des pensées suicidaires.
  • Pour appuyer ses propos, un représentant républicain a diffusé une compilation de vidéos TikTok sur le suicide. Musique dramatique comprise.
• D’autre part, les membres du Congrès ont dit être très inquiets des liens entre la société mère de TikTok, ByteDance, et les autorités chinoises.
  • Ils ont notamment interrogé Shou Zi Chew sur la capacité des employés de TikTok basés en Chine à accéder aux données américaines. On parle bien là de soupçons d’espionnage.
  • Se demandant si l’application était en mesure de défendre les valeurs américaines, ils ont également prié le patron de s’exprimer sur ses affinités avec le Parti communiste chinois.
  • Le débat est allé jusqu’à la brûlante question des Ouïghours. Un représentant a même demandé à Shou Zi Chew si TikTok soutenait le « génocide » dont ils étaient victimes en Chine.

La défense : désespérée ?

• Face à ces questions, Shou Zi Chew a parfois paru désemparé, mais il a proposé une défense plutôt cohérente, de l’avis des médias américains.
• Globalement, le CEO singapourien de TikTok a semblé vouloir faire preuve d’ouverture au débat.
• Pour ce qui est des dégâts causés par l’application sur la santé mentale des plus jeunes, il a par exemple reconnu que lui-même n’autorisait pas ses enfants à utiliser l’application.
• Quant à la protection des données, il a rappelé que TikTok travaillait sur le projet Texas, un plan destiné à faire montre d’une plus grande transparence vis-à-vis des États-Unis.
  • Annoncé il y a quelques semaines, le projet Texas vise à créer une entreprise dotée d’un comité de direction en lien direct avec l’administration américaine, afin de s’assurer que les données américaines restent sur des serveurs américains et ne tombent ainsi pas dans les mains des autorités chinoises.
  • Lorsqu’on lui a demandé de garantir que Tiktok  « ne garde pas, n’a jamais gardé et ne gardera jamais de données personnelles », Shou Zi Chew n’a toutefois pas pu répondre par l’affirmative. “Aujourd’hui, il y a encore des données que nous devons supprimer” a-t-il reconnu.

L’épée de Damoclès plane plus que jamais au-dessus de TikTok

Le résultat : pas convaincant.

• La plupart des législateurs semblent ne pas avoir été convaincus par la défense de Shou Zi Chew.
• « Je n’ai été rassuré par rien de ce que vous avez dit jusqu’à présent et je pense très franchement que votre témoignage a soulevé plus de questions pour moi que de réponses », a notamment déploré une représentante démocrate, dans des propos rapportés par CNBC.
• Le sénateur républicain Mark Rubio, qui n’a pas participé à la discussion, a de son côté dénoncé les « mensonges et omissions » du patron de TikTok. Selon lui, l’élan pour bannir l’application du territoire américain en est ressorti renforcé.

Et après : vers une interdiction totale ?

• Suite à cette audience, rien n’a changé dans l’esprit des législateurs qui souhaitaient déjà interdire totalement TikTok aux Etats-Unis. Pour ce faire, plusieurs options sont à l’étude.
  • Par exemple, la loi bipartisane RESTRICT présentée au Sénat permettrait au secrétaire au Commerce d’examiner la technologie des pays étrangers adversaires et de recommander au président d’interdire ladite technologie si les risques ne peuvent pas être atténués de manière appropriée.
• Une autre possibilité étudiée jusqu’il y a peu était d’entreprendre une vente forcée de TikTok aux Etats-Unis. Mais, peu avant l’ouverture de l’audience, un responsable du gouvernement chinois a dit que Pékin s’y opposerait « fermement ».
• Visiblement peu réjouie par la tournure des événements, TikTok a réagi via un communiqué.
  • « Shou s’est préparé à répondre aux questions du Congrès, mais, malheureusement, la journée a été dominée par la démagogie politique qui n’a pas reconnu les vraies solutions déjà en cours grâce au projet Texas ni abordé de manière productive les problèmes de sécurité des jeunes à l’échelle de l’industrie », a déclaré la porte-parole de l’entreprise, Brooke Oberwetter.
• Près de 150 millions d’Américains, soit pratiquement un sur deux, sont actuellement inscrits sur TikTok.