Cette semaine, la Russie a mis les bouchées doubles dans ses diminutions de livraisons de gaz à l’Europe. Après un léger regain d’optimisme, les inquiétudes sont de retour pour l’approvisionnement du bloc en vue de l’hiver prochain. Pour le groupe d’analyse britannique Wood Mackenzie, les objectifs de stockage sont en danger.
Fin avril, la Russie a stoppé toutes ses livraisons de gaz vers la Pologne et la Bulgarie, expliquant que les deux pays n’avaient pas répondu à sa demande de payer en roubles. Peu après, le Danemark et les Pays-Bas ont suivi. Cette semaine, l’Allemagne, l’Italie, l’Autriche et la France ont signalé des livraisons moins élevées que prévu. Pire, ce vendredi, nos voisins d’outre-Quiévrain ont annoncé que la Russie venait de couper toutes ses livraisons par gazoduc (Nord Stream 1).
Face à ces multiples diminutions, la crainte que la Russie stoppe définitivement l’ensemble de ses livraisons vers l’Europe via Nord Stream 1 (le gazoduc qui passe par l’Allemagne) se fait de plus en plus présente. Selon une analyse de Wood Mackenzie citée par Bloomberg, cette décision aurait de lourdes conséquences.
Remplir les réserves à 80%, impossible sans Nord Stream 1
Pour le 1er novembre prochain, l’Europe vise un taux de remplissage de ses stocks de gaz d’au minimum 80%. Ces dernières semaines, les stocks se redressaient, rendant cet objectif clairement envisageable. Mais avec les récentes diminutions, les inquiétudes refont surface.
D’après les calculs de Wood Mackenzie, en cas d’arrêt complet des flux via Nord Stream 1; les niveaux de stockage de l’Europe ne seraient que de 59% pour le 1er novembre. Si le gazoduc continue de fonctionner à seulement 40% de sa capacité (le chiffre qu’elle a annoncé cette semaine en raison, selon Gazprom, de problèmes techniques causés par les sanctions internationales), les niveaux de stockage pourraient atteindre 67% pour cette échéance. En cas de reprise du fonctionnement normal de Nord Stream 1, il n’y aurait bien sûr pas de problème à atteindre les 80%, malgré les gros problèmes rencontrés dans une importante usine de GNL américaine.
« Le GNL ne suffira pas »
Dans son analyse, Wood Mackenzie prend bien sûr en compte les alternatives au gaz russe, dont le GNL, dont les importations vont quoi qu’il arrive continuer d’augmenter dans les mois à venir. Mais si la Russie ferme les vannes de Nord Stream 1, cela ne permettra pas d’éviter des rationnements, les capacités d’importations n’étant pas infinies.
« Même en envisageant des contre-mesures, il pourrait être inévitable qu’un certain rationnement de la demande doive avoir lieu », a ainsi averti Massimo Di Odoardo, vice-président de la recherche sur le gaz et le GNL dans le groupe d’analyse.
Tout dépendra de la météo, bien sûr, mais Wood Mackenzie estime que l’Europe risquera d’épuiser ses stocks de gaz naturel au milieu du pic de la demande hivernale en cas d’arrêt total de Nord Stream 1, et à la fin de l’hiver en cas de fonctionnement à 40% du gazoduc.