Sa rémunération, le capitalisme et la Corée du Nord: le réalisateur de Squid Game en 3 déclarations très modestes (voire trop)

Personne n’a pu échapper au phénomène Squid Game, rapidement devenue la série la plus populaire de Netflix. Son réalisateur, Hwang Dong-hyeok, a livré un long entretien au quotidien britannique The Guardian. L’occasion de faire quelques déclarations plus ou moins maîtrisées sur une poignée de sujets glissants.

1. Ce qu’il a gagné

« Le vainqueur de Squid Game a gagné 45,6 milliards de wons (33 millions d’euros, ndlr) ? Moi, je ne suis pas si riche. Mais j’en ai assez. J’en ai assez pour mettre de la nourriture sur la table. Et ce n’est pas comme si Netflix me versait un bonus. Netflix m’a payé selon le contrat initial. »

Grâce à Squid Game, Netflix a enregistré l’arrivée de 4,4 millions nouveaux abonnés. Soit environ 77 millions d’euros supplémentaires. Les rentrées totales vont bien sûr bien au-delà de ces abonnements. Au total, d’après les estimations de Bloomberg, la série pourrait générer plus de 760 millions d’euros en « valeur d’impact » pour Netflix. Mais visiblement, cet incroyable succès ne se répercutera pas sur les finances de Hwang Dong-hyeok, qui n’a pas pensé à ajouter une clause liée à la performance de sa série dans son contrat.

Ne vous inquiétez toutefois pas pour lui. Si Squid Game l’a propulsé sur la scène internationale, le réalisateur de 50 ans avait déjà connu un joli succès en Corée du Sud. Sa fortune n’est pas connue, mais bon nombre de sites spécialisés estiment qu’il est potentiellement déjà millionnaire.

Le cinéaste n’a toutefois pas toujours vécu dans l’opulence. Il a raconté au Guardian que sa famille avait été touchée de plein fouet par la crise financière mondiale de 2018. « J’étais très démuni financièrement car ma mère a pris sa retraite de l’entreprise pour laquelle elle travaillait. Je travaillais sur un film, mais nous n’avons pas obtenu de financement. Je n’ai donc pas pu travailler pendant environ un an. Nous avons dû contracter des prêts – ma mère, moi-même et ma grand-mère », a-t-il confié.

Notons que le salaire perçu par les acteurs phares de la série a récemment été dévoilé. Lee Jung-jae, qui joue le rôle principal de Seong Gi-hun, a ainsi palpé près de 2 millions d’euros pour sa participation à la série. Park Hae-soo, qui campait le finaliste malheureux Cho Sang-woo, a quant à lui perçu 279.000 euros. Les autres acteurs phares de Squid Game n’ont pas tous été logés à la même enseigne, l’acteur indien Anupam Tripathi, qui jouait lAbdul Ali, n’ayant été payé qu’entre 60 et 300 euros par épisode.

2. Sur le capitalisme

Bon nombre d’analystes voient dans Squid Game une grave critique du système capitaliste. La série fait participer 456 personnes ruinées à des jeux mortels, où elles sont toutes mises sur un même pied d’égalité. Le survivant en ressort multimillionnaire. Bien sûr, cette lecture est pertinente, et Hwang Dong-hyeok la confirme. Mais il ne faut pas aller trop loin pour autant.

« Ce n’est pas profond ! C’est très simple ! Je crois vraiment que l’ordre économique mondial global est inégal et qu’environ 90% des gens pensent que c’est injuste. Pendant la pandémie, les pays les plus pauvres ne peuvent pas faire vacciner leurs habitants. Ils contractent des virus dans la rue et en meurent, même. J’ai donc essayé de faire passer un message sur le capitalisme moderne. Comme je l’ai dit, ce n’est pas profond », a-t-il expliqué au Guardian.

Quant aux détracteurs qui voient de l’hypocrisie dans ce pacte passé avec le géant du divertissement Netflix, le réalisateur répond tout aussi simplement.

« Netflix est une entreprise mondiale, mais je ne pense pas qu’elle aggrave les inégalités. Je ne pense pas qu’il y ait de contradiction. Lorsque je travaillais sur le projet, l’objectif était de se classer numéro 1 dans le classement de Netflix US pendant au moins un jour. Mais il a fini par avoir beaucoup plus de succès, devenant la série la plus regardée de tous les temps sur Netflix. C’est très surprenant. Cela montre que le public mondial est en résonance avec le message que je voulais refléter », s’est-il félicité.

3. Sur la Corée du Nord

L’une des protagonistes de la série, Kang Sae-byeok, est une transfuge nord-coréenne. Elle participe aux jeux pour gagner de l’argent en vue d’aider son jeune frère et sa mère, capturée après voir tenté de quitter son pays natal. Hwang Dong-hyeok a donc été invité à s’exprimer sur les relations entre les deux Corées. Et il est plutôt optimiste.

« [Les transfuges nord-coréens] sont probablement la plus grande minorité en Corée du Sud aujourd’hui. Cela ne fera qu’augmenter. Je pense que les échanges entre les deux Corées vont se développer. Nous allons arriver à la réunification à un moment donné. Je l’espère », a-t-il déclaré.

Pas sûr que ce discours pacifiste fasse changer d’avis Pyongyang au sujet de la série. Arirang Meari l’un des rares sites Web ouvertement hébergés en Corée du Nord, – et qui sert de pure plate-forme de propagande au régime dominé par Kim Jong-un – a livré une opinion incendiaire au sujet de Squid Game.

Selon le site, la série reflète « la réalité du système capitaliste, un système qui traite les êtres humains comme autant de pions dans une partie d’échecs ». « Squid Game fait prendre conscience de la triste réalité d’une société sud-coréenne bestiale, dans laquelle les êtres humains sont poussés à la compétition extrême, et leur humanité est anéantie. »

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