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La Russie gagne encore plus d’un demi-milliard d’euros chaque jour grâce à ses combustibles fossiles, et c’est principalement grâce à l’Europe

La Russie gagne encore plus d’un demi-milliard d’euros chaque jour grâce à ses combustibles fossiles, et c’est principalement grâce à l’Europe
Le président russe Vladimir Poutine, un tanker transportant du GNL russe vers la France, et gazoduc Russie-Europe Brotherhood. (MAKSIM BLINOV/SPUTNIK/AFP via Getty Images, OIC VENANCE/AFP via Getty Images, Vincent Mundy/Bloomberg via Getty Images)

Criblée par les sanctions occidentales depuis près d’un an suite à sa tentative d’invasion de l’Ukraine, la Russie est surtout parvenue à garder la tête hors de l’eau grâce à ses revenus énergétiques. Et force est de constater que les acheteurs et transporteurs européens jouent toujours un rôle majeur dans ces opérations.

Pourquoi est-ce important ?

Dans les mois qui ont suivi le début de la guerre en Ukraine, les pays européens et leurs alliés occidentaux ont instauré une multitude de mesures à l'encontre de la Russie. Objectif : diminuer les revenus du Kremlin pour le pousser à stopper son offensive. Jugées trop peu sévères, et parfois même contournées, ces mesures n'empêchent pas la Russie de continuer à engranger d'énormes revenus grâce à ses exportations de combustibles fossiles.

Dans l’actu : la Russie gagne encore un demi-milliard d’euros par jour grâce à ses combustibles fossiles.

  • Selon un rapport du Center for Research on Energy and Clean Air (CREA), la Russie engrange actuellement 560 millions d’euros par jour via ses exportations de combustibles fossiles (gaz, pétrole et charbon).

Les chiffres :

  • 560 millions d’euros par jour, c’est énorme, mais c’est tout de même la moitié de ce que la Russie gagnait en mars 2022, peu après le début de la guerre (1.130 millions).
  • Ces 560 millions d’euros se décomposent comme ceci :
    • 280 millions via les ventes de pétrole brut.
    • 120 via les produits dérivés du pétrole.
    • 60 via le gaz naturel envoyé par pipeline.
    • 60 via le charbon.
    • 40 via le gaz naturel liquéfié (GNL), envoyé par navire.
  • Une bonne partie de ces revenus sont toujours réalisés grâce à l’Europe. Elle occupe encore la deuxième place au niveau des importations… et la première en ce qui concerne le transport.

Analyse

Les transporteurs européens : toujours les premiers collaborateurs de la Russie.

  • Le CREA constate que les navires détenus ou assurés dans des pays de l’Union européenne ou au Royaume-Uni transportent toujours pour 310 millions d’euros de combustibles fossiles russes chaque jour. Soit 65% du montant quotidien total des exportations maritimes.
  • Depuis début décembre, l’UE, le G7 (dont fait partie le Royaume-Uni) et l’Australie ont introduit un plafond sur le prix du pétrole brut russe, à 60 dollars le baril. Les navires dépendant de ces pays ne peuvent donc plus opérer au transport que si ce plafond est respecté.
  • Depuis début février, un plafond similaire a été mis en place autour des produits pétroliers russes, à 45 dollars le baril pour les produits peu raffinés (comme le mazout) et 100 dollars pour les produits d’une plus haute valeur ajoutée (comme le diesel).
  • Selon le rapport, pour le brut, le Kremlin laisse 15 dollars par baril aux producteurs et encaisse le reste, soit 45 dollars.
  • Le CREA qualifie ces plafonds « d’excessivement élevés » et souligne qu’il y a, en plus, des lacunes dans leur application. Ainsi, des navires européens continueraient d’aider à l’exportation de brut depuis l’Extrême-Orient russe (principalement vers la Chine) à des prix atteignant les 75 dollars le baril.
(Center for Research on Energy and Clean air)

Les acheteurs européens : deuxièmes.

  • En ce qui concerne les destinations de ces combustibles fossiles russes, c’est la Chine qui est désormais première. Elle n’a pourtant ni diminué ni augmenté ses achats.
  • La Chine doit cette première place à la baisse des importations européennes.
    • L’UE a arrêté d’importer du charbon russe à partir d’août 2022. Un embargo a suivi sur le pétrole brut transporté par voie maritime en décembre 2022, puis sur les produits pétroliers début février.
    • De son côté, la Russie a très fortement réduit ses livraisons en gaz par pipeline.
    • En revanche, en ce qui concerne le GNL, il n’y a quasiment pas de différence par rapport à la situation d’avant-guerre.
  • Alors que l’UE envoyait encore 700 millions d’euros par jour à la Russie pour ses combustibles fossiles en mars 2022, ce chiffre a chuté à 100 millions aujourd’hui. Il se décompose comme suit :
    • 30 millions pour le gaz naturel par pipeline.
    • 30 millions pour le pétrole brut.
    • 30 millions pour les produits pétroliers.
    • 10 millions pour le GNL.
  • Cela n’empêche pas l’UE de rester la deuxième acheteuse de combustibles fossiles russes, devant l’Inde, qui n’a cessé d’augmenter ses achats depuis que la guerre a commencé et que la Russie a cherché de nouveaux débouchés.
(Center for Research on Energy and Clean Air)

Diminuer les plafonds ?

Et maintenant : que faire ?

  • Dans ses conclusions, le CREA propose des solutions pour diminuer davantage les revenus tirés par Moscou des exportations de combustibles russes. Car si l’étude montre que l’Europe est l’un des acteurs majeurs de ces opérations, cela prouve aussi qu’elle a les cartes en main pour faire mal aux caisses du Kremlin.
  • L’institut, basé à Helsinki, préconise de baisser les plafonds sur le brut russe à 25-35 dollars le baril et à 35 dollars le baril pour les produits pétroliers de haute valeur.
    • Cela réduirait les revenus de la Russie d’environ 150 millions de dollars par jour. Et cela ne la pousserait pas à (trop) réduire sa production – et donc à ne pas perturber l’approvisionnement mondial.
  • Le CREA invite également l’UE à resserrer la vis pour s’assurer que les plafonds sont bien respectés par tous les navires européens.
  • Un plafonnement des prix pourrait aussi être instauré autour du pétrole et du gaz de Russie transportés par pipeline et du GNL russe.
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