Retour à la vie normale? Pas avant… 2030

Le président Emmanuel Macron a cité ‘le manque d’ambition’ et ‘de folie’ comme principales raisons du retard de l’UE dans sa campagne de vaccinations, dans une interview à la télévision grecque mercredi soir.

Un mea culpa intéressant de la part du chef d’un pays qui aime généralement évoquer son ‘exceptionnalisme’. Devant la presse française hier soir à la sortie du Conseil européen, le chef d’État français reprenait d’ailleurs ses vieux réflexes sur la stratégie nationale: ‘Je peux vous affirmer que je n’ai aucun mea culpa à faire, aucun remords, aucun constat d’échec.’

(crédit: Financial Times)

Sur la stratégie européenne, l’échec ne fait aucun doute. Le Financial Times a calculé que l’UE manquait principalement d’investissements en R&D, c’est-à-dire que les fonds publics alloués aux laboratoires de recherche sur les vaccins étaient insuffisants. Nous savions déjà que Bruxelles payait moins cher ses doses que les États-Unis ou le Royaume-Uni. Ce qui explique en partie pourquoi l’Union européenne est servie en dernier. Mais le journal britannique montre également que les États-Unis et le Royaume-Uni ont dépensé respectivement 28 et 29 livres sterling par habitant pour la recherche de vaccins contre le Covid-19. L’Europe a dépensé… 4 livres sterling par personne. Plutôt qu’un vaccin, l’UE devait compter sur un miracle. L’UE a moins dépensé sur tous les tableaux.

Une pandémie doit être combattue au niveau mondial et non régional

Une autre mauvaise nouvelle a été présentée par le professeur Djillali Annane, qui dirige l’unité de soins intensifs de l’hôpital Raymond-Poincaré à Garches (Hauts-de-Seine). Selon une interview accordée à la chaîne française CNews, un retour à la normale ne devrait pas être attendu avant… 2030. La raison ? Une pandémie mondiale doit être combattue au niveau mondial.

Un simple calcul montre que pour se débarrasser vraiment du Covid-19, il faudrait atteindre l’immunité de groupe au niveau mondial. Cela signifie que 75% de la population adulte présente sur Terre doit être vaccinée et que donc 9 milliards de doses de vaccins doivent être injectées. Sachant aujourd’hui que seules 450 millions de doses ont été distribuées, l’immunité de groupe ne sera pas atteinte avant la fin de 2022.

Problème : la distribution du vaccin est très déséquilibrée, ce qui inquiète particulièrement les pays pauvres. Selon Annane, la reprise des voyages relancera bientôt la pandémie.

L’angle mort de la stratégie de vaccination occidentale

En février, l’économiste français Jean Pisani-Ferry a attiré notre attention sur ce qu’il appelle ‘l’angle mort’ de la stratégie de vaccination occidentale.

  1. La mutation constante est la caractéristique la plus importante d’un virus. Les variantes du Covid-19 continueront de proliférer, devenant la principale menace.
  2. Les variants voyagent.
  3. Face à ses faits, deux options existent :
    • Combattre le virus (et ses variants) de manière coordonnée dans le monde ;
    • Fermer toutes les frontières et permettre à chaque pays d’éradiquer le virus sur son propre territoire.
  4. La stratégie actuelle, qui combine ‘nationalisme vaccinal’ et frontières semi-ouvertes, est vouée à l’échec. Les pays seront constamment réinfectés par de nouveaux variants venus des pays pauvres. Parce qu’ils n’auront pas les moyens de vacciner leur population. Dans ce contexte, après la guerre et les réfugiés politiques, il y aura bientôt aussi des réfugiés Covid.

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