Le sommet du G20 a été une excellente occasion pour le Premier ministre chinois Xi Jinping de dépoussiérer ses ambitions internationales après plus de deux ans de troubles intérieurs. Le pays veut faire davantage d’affaires par le biais de ses propres systèmes de paiement et dans sa propre monnaie. Et cela joue en la faveur du renminbi.
Sur les marchés des devises, la récente chute brutale du dollar retient toute l’attention. Après les chiffres de l’inflation américaine, meilleurs que prévu, la monnaie a fortement chuté par rapport à presque toutes les autres devises.
Il était temps, d’ailleurs, car le dollar avait été quasiment inarrêtable au cours des 12 mois précédents. Le gain de change par rapport à l’euro a même dépassé 20 % au cours de cette période. Les pays émergents, en particulier, ont beaucoup souffert de la cherté du dollar. Exprimés en monnaies locales, ils ont perdu davantage sur tous les biens importés échangés dans la monnaie américaine et sur les paiements d’intérêts et les remboursements de prêts en dollars. L’Argentine, l’Éthiopie, le Ghana et le Salvador, entre autres, ont eu de gros problèmes à cause de cela.
Importations sans dollar
Cette douleur est une excellente occasion pour la Chine d’accroître considérablement la sphère d’influence du renminbi. Il y a quelques années, c’était même un objectif stratégique au sein du parti communiste chinois. Bien que le pays ne cherche plus à faire tomber le dollar de son trône, il est inévitable que le renminbi joue un rôle plus important sur les marchés des devises.
Selon le groupe de réflexion britannique Enodo Economics, la Chine travaille à une situation dans laquelle elle pourra acheter tout ce dont elle a besoin à d’autres pays, en réglant dans sa propre monnaie par le biais de ses propres systèmes de paiement.
Actuellement, cela se fait encore très souvent en dollars. Pas moins de 85 % de toutes les transactions de change dans le monde se font encore dans la monnaie américaine.
Préférer faire des affaires en renminbi
Au cours de l’année écoulée, le douloureux dollar a considérablement abaissé le seuil permettant aux pays émergents de faire plus d’affaires en renminbi. Cela aide que la Chine investisse des dizaines de milliards chaque année depuis 2013 dans des projets d’infrastructure en Afrique, en Asie et en Europe de l’Est, entre autres, dans le cadre de la soi-disant Nouvelle route de la soie.
Récemment, cependant, ces investissements ont été à un niveau plus bas. En effet, les développements intérieurs ont absorbé une grande partie de l’attention de Jinping et de son parti. Le contrôle de la pandémie de coronavirus en particulier a demandé beaucoup d’efforts. Dans le cadre de la politique « Zéro Covid », des mesures de confinement sont toujours en place dans certaines villes et régions. En outre, Jinping a eu fort à faire pour obtenir un nouveau mandat présidentiel lors du congrès du parti qui s’est tenu en octobre.
L’espace pour bouger plutôt que forcer
La façon dont Jinping a attiré l’attention sur lui lors du sommet du G20 suggère que son attention se porte désormais sur la scène internationale. Il s’est longuement entretenu avec le président américain Joe Biden et a réprimandé Justin Trudeau après que son homologue canadien a divulgué à la presse le contenu d’une conversation entre eux. La Chine pousse ainsi la politique géopolitique avec des mots fermes.
Mais un rôle plus important pour le renminbi ne doit pas nécessairement passer par une monnaie plus puissante et plus chère.
Au lieu de cela, le pays est susceptible de donner au renminbi une plus grande marge de manœuvre par rapport au dollar. Et d’ailleurs, ce dernier ne donne guère de signes de vigueur : face à l’euro, la monnaie chinoise a récemment atteint son taux le plus bas de l’année.
Joost Derks est un spécialiste des devises chez iBanFirst. Il a plus de 20 ans d’expérience dans le monde de la monnaie. Cette chronique reflète son opinion personnelle et ne constitue pas un conseil professionnel (d’investissement).