Que se passerait-il si l’énergie nucléaire s’arrêtait en hiver ? La France en fait l’expérience aujourd’hui

Juste au moment où le gouvernement belge débat de la sortie du nucléaire, un exemple pratique intéressant se déroule en France. L’exploitant EDF a dû arrêter quatre réacteurs nucléaires de manière inattendue, ce qui met immédiatement sous pression la sécurité d’approvisionnement.

La France compte 56 réacteurs nucléaires répartis dans 19 centrales, qui assurent ensemble 70 % de la production d’électricité française. Le pays est donc encore plus dépendant de l’énergie nucléaire que la Belgique (40 à 50 %).

Lors d’une inspection des deux réacteurs de Civaux, EDF a constaté des défauts techniques dans le système de refroidissement et a décidé la semaine dernière de ne pas les redémarrer et d’arrêter également deux autres réacteurs similaires de Chooz, près de la frontière belge. Les quatre représentent ensemble 10 à 15 % de la capacité nucléaire de la France.

En conséquence, 16 des 56 réacteurs nucléaires français sont aujourd’hui à l’arrêt pour réparation ou maintenance, et ce, alors que les semaines les plus froides, et donc les plus fortes consommations de chauffage, approchent. Les experts en énergie soulignent un deuxième phénomène important: il y a peu de vent en ce moment en France, ce qui signifie qu’il y a peu d’électricité à tirer des éoliennes.

Pour les opposants au nucléaire, ces arrêts forcés sont la preuve que les centrales nucléaires ne sont pas fiables et que la France en est trop dépendante.

Les partisans affirment que la capacité de production est structurellement trop faible et que davantage de centrales nucléaires sont en fait nécessaires, notamment au vu de la généralisation des voitures électriques qui semble se produire dans toute l’Europe. Le président français Emmanuel Macron a annoncé plus tôt cette année des investissements dans des petites centrales électriques de nouvelle génération (SMR ou petits réacteurs modulaires ).

Blackout

Mais le gouvernement français se concentre d’abord sur le problème le plus aigu: assurer la sécurité d’approvisionnement pour les mois d’hiver de janvier et février. Une panne d’électricité à quelques mois des élections présidentielles serait un scénario catastrophe pour Macron.

Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, demande à EDF d’accélérer les travaux de maintenance et de les poursuivre pendant les vacances de Noël, afin que certains réacteurs nucléaires puissent être remis en service à la mi-janvier. En cas de réelle pénurie, les grandes entreprises devront se contenter de moins d’électricité pendant un certain temps et recevront une compensation en contrepartie, comme le prévoient leurs contrats de flexibilité.

En attendant, l’importation d’électricité de l’étranger devra répondre aux besoins les plus urgents. Toutefois, cela a un prix élevé. Les prix de l’électricité en Europe ont grimpé en flèche la semaine dernière, immédiatement après l’annonce d’EDF.

Indépendance énergétique

Pompili a également annoncé un audit indépendant de l’ensemble du parc nucléaire français.

Si la France veut conserver son indépendance énergétique, il est urgent de construire des centrales supplémentaires capables de garantir un approvisionnement stable, quel que soit le temps, estime l’expert Maxence Cordier dans le journal économique Les Echos.

Compter sur les importations de pays voisins amis est risqué, affirme-t-il, car de nombreux éléments indiquent que la capacité libre disponible en Europe occidentale va diminuer plutôt qu’augmenter dans les années à venir. C’est un scénario futur qui sera sans doute aussi sur la table dans les négociations du gouvernement belge sur la sortie du nucléaire.

Avec les froides journées d’hiver qui s’annoncent, la France n’a guère d’autre choix que d’importer de l’électricité des centrales à gaz allemandes ou des… centrales nucléaires belges.

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