Le programme Starship suspendu après un lancement qui a fait de la casse : retour de flamme pour SpaceX

Après le premier lancement – et l’explosion – de son vaisseau Starship en configuration « full stack » jeudi dernier, Elon Musk a décrété qu’il s’agissait là d’un vrai succès pour son entreprise SpaceX. Il est vrai que la destruction de l’engin était envisagée dès le début. Mais l’impact du lancement sur les environs, et ses conséquences possibles sur environnement et la santé humaine, vont ternir ce bilan très optimiste.

Dans l’actualité : la FAA, l’administration fédérale de l’aviation aux États-Unis, a suspendu tout lancement pour le programme Starship Super Heavy de SpaceX. C’est là un processus standard : il s’agit de réaliser une « enquête sur accident » après la destruction d’un engin, ce qui dans le cas présent n’était pas forcément une surprise. Musk lui-même reconnaissait dès le 16 avril qu’un véhicule doté de 33 moteurs s’apparentait à « une boîte de grenades » et qu’il n’atteindrait sans doute pas l’orbite. Sauf que les dégâts semblent bien plus importants que ce qui était prévu, et surtout tolérable.

Des particules peut-être très toxiques à 10 km de là

  • Tout d’abord la destruction, même partielle, de la base de lancement de l’entreprise n’était pas au programme – si ce n’est peut-être parmi les pires scénarios. Or, avec un cratère géant sous le pas de tir des et blocs de béton projetés à grande distance, l’endroit n’est pas prêt de resservir. En outre, « le béton a été projeté dans l’océan et a risqué de toucher les réservoirs de stockage de carburant, qui sont des silos adjacents à la rampe de lancement » fait remarquer Dave Cortez, directeur de la section Lone Star du Sierra Club, un groupe de défense de l’environnement cité par CNBC.
  • Plus grave encore est la question des particules et autres résidus créés par le lancement et l’explosion. L’évaluation environnementale que SpaceX a dû passer pour obtenir le feu vert de la FAA mentionne « en cas d’anomalie » un champ de débris d’un kilomètre carré autour du site. Or des débris ont été retrouvés aussi loin que South Padre Island et Port Isabel, à près de 10 km de la Starbase.
  • Les habitants de Port Isabel ont signalé des fenêtres brisées, des bâtiments qui ont tremblé, ainsi que des poussières et autres particules recouvrant les voitures et les maisons. Or on n’a aucune idée, à l’heure actuelle, de la dangerosité potentielle de ces résidus pour la santé humaine, pour l’écosystème, ou pour l’état des sols. Les risques ne seront connus qu’une fois ces poussières analysées.

« La possibilité d’un panache d’émissions largement dispersé n’a pas été divulguée par la FAA ou SpaceX, au cours du processus initial d’autorisation et d’approbation environnementale. »

Eric Roesch, ingénieur environnemental

Un désastre environnemental sous le tapis ?

  • Dès avant le lancement, l’une des principales réserves de la FAA par rapport au lancement du Starship portait sur son possible impact sur l’environnement. Car de nombreuses espèces en danger vivent et nichent dans les environs de la base, et le Center for Biological Diversity s’inquiète de l’effet du bruit et des débris sur les populations d’oiseaux comme le pluvier siffleur et le bécasseau maubèche, mais aussi de félins comme les ocelots ou les jaguarondis, ainsi que les tortues marines particulièrement menacées de la baie de Boca Chica.
  • Lavie Ohana, une chroniqueuse de l’industrie qui a suivi le lancement sur place, a écrit que le lancement était également « l’un des plus bruyants » dont elle ait jamais été témoin, « avec des ondes de choc qui donnaient l’impression de recevoir des coups de poing encore et encore » cite le média économique américain.
  • Plus inquiétant encore, les routes menant au site ont été fermées durant et après le lancement, ce qui signifie que les biologistes sur le terrain n’ont pas pu passer immédiatement pour étudier l’ampleur des dommages sur la faune et la flore. Certains chercheurs craignent des tentatives de dissimulation des dégâts de la part de SpaceX. Après tout, Neuralink, une autre entreprise d’Elon Musk, est dans la tourmente pour ne pas avoir respecté des règles de prudence élémentaire dans le maniement de déchets potentiellement dangereux.
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