Deux sénateurs américains appellent à revoir totalement l’usage des attaques de drones dans la stratégie américaine. Pourtant, le mandat de Joe Biden est déjà marqué par un recours bien moindre aux frappes que sous Trump. Mais la dernière bavure ne passe pas.
Coup dur pour le président Biden et son administration : alors qu’au Congrès, les républicains font feu de tout bois sur les enjeux intérieurs, voilà que les démocrates donnent de la voix sur la question des interventions extérieures. Deux sénateurs démocrates influents, Dick Durbin (Illinois) et Patrick Leahy (Vermont) ont déposé une lettre ouverte appelant à repenser l’usage des drones dans la stratégie militaire des États-Unis.
Favoriser le recrutement terroriste
Un geste qui s’appuie sur une bavure qu’a bien dû reconnaître l’état-major américain, après l’avoir niée dans un premier temps : une frappe menée sur Kaboul et visant des combattants locaux de ISIS-K, le 29 août dernier, a causé la mort de dix civils, dont sept enfants. Pour les deux démocrates, il y a là une douloureuse leçon que le pays doit tirer au plus tôt: « Beaucoup trop de personnes sont désignées à tort comme des cibles sur la base de renseignements défectueux ou inadéquats. Ces échecs alimentent le ressentiment à l’égard des États-Unis et favorisent le recrutement de terroristes, sapant ainsi l’objectif central de la lutte contre le terrorisme à court et à long terme. »
Biden, ou le retour à la « normale »
Cette fronde est un double coup dur pour Biden. D’abord parce qu’elle vient de son propre camp politique alors qu’il a déjà bien assez sur les bras de la part de ses rivaux. Et ensuite, car son entrée en fonction représentait déjà un changement de paradigme dans l’usage de drones d’attaque par rapport à son prédécesseur. Donald Trump avait en effet autorisé les commandants militaires sur le terrain à mener d’eux-mêmes ce genre de frappe. Une décision que Biden a annulée dès son arrivée dans le bureau ovale, retournant ainsi vers la plus classique autorisation présidentielle de mener une attaque dans un ciel étranger. Ce qui a mené de facto a un recours bien moins fréquent aux attaques de drones durant le début de la présidence de Joe Biden, comparé à son prédécesseur. Celui-ci avait mené plus de frappes en Somalie et au Yémen que tous les autres présidents combinés.
20 ans d’hécatombes de civils
Mais pour les deux sénateurs démocrates, le retour à une approche « normale » n’est guère suffisant: ils appellent à « mettre fin au recours à la force meurtrière » en dehors des zones où les États-Unis sont activement engagés dans un conflit armé. Et ils soulignent au passage que le nombre de décès de civils attribués aux frappes américaines dans le monde est estimé à 48.000 personnes depuis 2001.
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