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Pétrole : la liaison Russie-Inde navigue de record en record

Pétrole : la liaison Russie-Inde navigue de record en record
Le président russe Vladimir Poutine, le Premier ministre indien Narendra Modi et un navire transportant du pétrole russe. ( T.Narayan/Bloomberg via Getty Images, Andrey Rudakov/Bloomberg via Getty Images)

Depuis début décembre et l’embargo européen sur son pétrole, la Russie ne cesse d’augmenter ses livraisons à destination de l’Inde. Les exportations atteignent des niveaux records.

Pourquoi est-ce important ?

En instaurant un embargo maritime sur le pétrole brut russe, l'Union européenne a voulu porter un gros coup au trésor énergétique du Kremlin. Et ce afin de saper son entreprise guerrière en Ukraine.

Dans l’actu : la ligne Russie-Inde fonctionne parfaitement.

  • Ce n’est plus un secret pour personne : depuis que la guerre en Ukraine a éclaté, la Russie a largement augmenté ses exportations de pétrole vers l’Asie, et en particulier vers ses deux plus grands pays.
  • Avec le début de l’embargo européen, les livraisons vers l’Inde ont atteint de nouveaux sommets.

Le détail : record en décembre, record en janvier ?

  • Selon les données de la société d’analyse énergétique Vortexa rapportées par Business Insider, l’Inde a importé 1,2 million de barils de pétrole russe par jour durant le mois de décembre.
    • C’est un record… et il pourrait bien vite être battu.
  • Au cours des deux premières semaines du mois de janvier, 1,3 million de barils de brut russe ont été expédiés vers l’Inde.
  • Le brut russe représente désormais 60% des importations de pétrole de l’Inde, contre 48% en décembre, estime Vortexa.

Métamorphose du commerce pétrolier mondial

Les explications : l’Inde remplace l’Europe.

  • Cette augmentation du nombre de livraisons de pétrole russe vers l’Inde est directement liée à l’embargo européen entré en vigueur début décembre.
  • Avec cette mesure, les importations de brut russe en Europe par voie maritime ont été proscrites.
    • Ce sont environ 90% des importations européennes de pétrole russe qui ont ainsi été arrêtées.
    • La Bulgarie a bénéficié d’un délai plus long pour appliquer cet embargo.
    • Les livraisons par oléoduc restent autorisées, ce qui permet à des pays enclavés comme la Hongrie ou la République tchèque de continuer à recevoir du brut russe.
  • « Depuis que l’interdiction de l’UE est entrée en vigueur […], le remaniement du brut russe s’est fait beaucoup plus en douceur que ce que de nombreux acteurs du marché avaient prévu », a commenté Serena Huang, responsable de l’analyse Asie-Pacifique de Vortexa. « La Russie a bien réussi à séduire les raffineurs indiens pour qu’ils augmentent leurs achats de son brut alors que l’UE pivote. »
  • Le 5 février prochain, une mesure similaire entrera en vigueur pour les produits pétroliers raffinés (diesel, essence, kérosène, …) russes.

La question : à quel prix ?

  • Si la Russie réussit à limiter la casse en augmentant ses livraisons vers l’Asie, cela ne signifie pas que les sanctions occidentales sont sans effet.
  • En effet, outre un embargo, l’UE (avec le G7 et l’Australie) a mis en place un plafond de prix sur le brut russe, à 60 dollars le baril.
    • La grande majorité des pétroliers utilisés pour le transport du pétrole russe vers l’Asie étant liés à des assureurs occidentaux, la Russie n’a d’autre choix que de se plier au plafond.
    • En raison de ces sanctions, la Russie perdrait environ 160 millions d’euros par jour, ont calculé des chercheurs finlandais début janvier.

Cette situation est-elle tenable ?

Et maintenant : la flotte fantôme ?

  • Peu après l’annonce d’un accord sur un plafond du prix du brut russe, certains médias ont annoncé que la mesure deviendrait vite inefficace… car la Russie parviendrait à l’esquiver.
  • Depuis quelques mois, le Kremlin serait en train de mettre sur pied une « flotte fantôme« .
    • Via toute une série de subterfuges, ces pétroliers réussiraient à passer sous les radars et à écouler du pétrole à un prix plus élevé que le plafond.
      • Les techniques utilisées vont de l’extinction du système de navigation et de suivi à l’échange de pétrole d’un navire à l’autre en pleine mer en passant par la falsification de documents et des propriétaires basés dans des pays aux règles de navigation plus souples (Panama, Libéria, Iles Marshall, …).
    • Ces parades seraient d’autant plus prisées qu’elles offriraient un win-win à leurs acteurs : la Russie peut vendre plus cher aux acheteurs et les propriétaires des navires y gagnent… tout en n’ayant pas grand-chose à craindre.
    • Selon Erik Broekhuizen, analyste chez Poten & Partners, une société de courtage et de conseil spécialisée dans l’énergie et le transport maritime, la Russie aurait déjà constitué une flotte fantôme composée de 200 à 300 navires.
    • « Ils ne font que ce qu’ont fait le Venezuela et l’Iran avant eux », résume-t-il auprès de NPR.
  • Il semble toutefois peu probable que cette flotte fantôme permette à la Russie de maintenir le niveau d’exportations qui était le sien avant les sanctions occidentales.

Dernière donnée notable : le Kremlin a annoncé qu’à partir du 1er février, il interdira les exportations de pétrole (brut et produits raffinés) par voie maritime dès que le contrat stipulera le plafond de prix occidental. La mesure est censée durée cinq mois.

  • Jusqu’à présent, le prix du pétrole russe est resté inférieur au plafond. Mais cela pourrait changer.
  • Se posera alors une question : la Russie diminuera-t-elle sa production… ou se résignera-t-elle à réduire ses prix ?
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