Ce que le Premier ministre Alexander De Croo (Open VLD) voulait éviter à tout prix se répète sous ses yeux. Le Comité de concertation est sous le feu des projecteurs, mais ce n’était pas le plan de départ. Jusqu’au changement de nom (Conseil national de sécurité), le libéral a voulu tirer les leçons du grand théâtre orchestré par sa prédécesseure, Sophie Wilmès (MR). Mais les pressions politiques sont là et se font sur la place publique. On pouvait s’y attendre. Mais ce à quoi le Premier ministre ne s’attendait peut-être pas, c’est que ces pressions proviennent de sa majorité, et même de sa propre famille politique.
On le sait, la France a une grande influence sur la Belgique, francophone en tout cas. Et le déconfinement des commerces non essentiels annoncé par le président Macron est venu alimenter une ritournelle politique jouée par le MR depuis un certain temps: se mettre du côté des commerçants, de l’assouplissement des mesures, et non forcément du côté des experts.
C’est assez logique a priori. Chacun prêche pour sa paroisse. Mais c’est aussi faire preuve de peu de solidarité et de retenue au sein de la majorité Vivaldi.
Il y a quelques semaines, Georges-Louis Bouchez était sorti dans la presse pour y maintenir un espoir de fêtes de fin d’année en famille. Ce n’était pas le discours du ministre de la Santé Frank, Vandenbroucke (sp.a), qui préférait écouter religieusement les experts, flamands pour beaucoup d’entre eux. Une sortie moyennement appréciée à l’époque.
Ce mercredi, le président des libéraux francophones remet le couvert. Au vu de l’ouverture autorisée des commerces dans nos pays voisins – ce qui est une réalité – il demande à la Belgique de ne pas se mettre dans la position ‘d’une enclave’.
Il rejoint une sortie du ministre des indépendants et des PME ce matin sur les antennes de La Première et de LN24, David Clarinval : ‘La Belgique ne peut rester sur son île’, a affirmé le libéral.
Si cette double sortie n’est pas le fruit du hasard, et vise peut-être à première vue les socialistes, les libéraux francophones mettent de facto la pression sur les épaules du Premier ministre, issu de la même famille politique.
Pour l’heure, pas d’échanges de coups trop prononcés dans la majorité. Mais certaines accusations ‘d’irresponsabilité et de manque loyauté’ commencent à fleurir du côté socialiste.
Le CD&V s’y met aussi
Le MR n’est pas le seul à exercer une pression sur la réunion désormais cruciale de vendredi. Le Vice-Premier ministre Vincent Van Peteghem (CD&V), constatant les bons chiffres sanitaires en baisse, a lui aussi ouvert la porte à une sortie des mesures strictes sur Radio 1 : ‘Avec des estimations correctes, il devrait être possible de donner un peu d’oxygène, comme l’ouverture de magasins non essentiels, dans des conditions strictes.’
Ce week-end, le ministre des Finances plaidait lui aussi pour des fêtes de Noël en famille: ‘Personnellement, je pense qu’il est très important, en cette période sombre, avec beaucoup de solitude, de s’assurer que personne n’ait à fêter Noël seul’, a-t-il plaidé.
Les chiffres ne sont pourtant pas ce qu’ils étaient le 6 mai dernier, quand le gouvernement Wilmès a décidé d’entamer le déconfinement de la première vague. Ils sont même encore 2 à 3 fois supérieurs.
En coulisse, il est toutefois évoqué une ouverture des commerces sur rendez-vous. A des conditions de distance de sécurité strictes. Ce qui devait être à la base une réunion de présentation du nouveau baromètre se recentre autour d’un déconfinement effectif.
De Croo et son ministre de la Santé sous pression
Ce week-end, sur le plateau de C’est pas tous les jours Dimanche sur RTL TVI, le Premier ministre a pourtant répété qu’il ne pourrait rien garantir à si long terme. Alexander De Croo veut éviter à tout prix une 3e vague.
Il veut également échapper à la cacophonie qui ressortait de chaque Conseil national de sécurité. En transférant les discussions vers l’organe plus politique du Comité de concertation, il espérait que les discussions se feraient davantage en interne. Afin de déterminer une position claire le vendredi, sans dissonance. Car chaque dissonance politique donne des arguments aux détracteurs des mesures et stimule la division des citoyens. Soit l’une des critiques les plus vives du rédacteur en chef de The Lancet, qui a fait une audition pas plus tard que la semaine dernière à la Chambre.
Le Premier ministre et son ministre de la Santé Vandenbroucke céderont-ils à la pression? Réponse ce vendredi. Tout le monde aimerait rouvrir les commerces, mais est-ce que les chiffres le permettent? Clarinval, GLB et Van Peteghem ne seront pas en première ligne si ça tourne mal.