« OK boomers, nous ne sommes pas votre colonie »: quand le président du Salvador recadre des sénateurs américains qui craignent le bitcoin

Face aux multiples achats de bitcoins du Salvador – et à la crainte que des pays voisins n’en fassent de même -, trois sénateurs américains ont rédigé un projet de loi visant à atténuer les risques financiers de ce phénomène sur l’économie des Etats-Unis. Une initiative qui n’a pas du tout plu à Nayib Bukele, le président salvadorien.

Ce mercredi, les sénateurs républicains Jim Risch et Bill Cassidy et le démocrate Bob Menendez ont présenté une proposition de loi, demandant au département d’Etat des Etats-Unis de faire un rapport sur la politique du Salvador en matière de cryptomonnaie. Une initiative qui fait écho aux avertissements du FMI et des agences de notation financière, qui ne cessent de répéter voir de grands dangers dans la politique monétaire salvadorienne. Pas plus tard que la semaine dernière, Fitch Ratings a ainsi fait passer la note de défaut émetteur à long terme du Salvador de B- à CCC. Une décision prise en raison de l’imprévisibilité des politiques économiques du pays.

« L’adoption par le Salvador du bitcoin comme monnaie légale soulève des préoccupations importantes quant à la stabilité économique et à l’intégrité financière d’un partenaire commercial américain vulnérable en Amérique centrale », a expliqué M. Risch dans un communiqué.

« Cette nouvelle politique a le potentiel d’affaiblir la politique de sanctions des États-Unis, en donnant du pouvoir à des acteurs malveillants comme la Chine et les organisations criminelles organisées. Notre législation bipartisane cherche à obtenir une plus grande clarté sur la politique du Salvador », a-t-il ajouté.

Selon le M. Cassidy, « si les États-Unis souhaitent lutter contre le blanchiment d’argent et préserver le rôle du dollar en tant que monnaie de réserve mondiale », ils doivent « s’attaquer de front à cette question ».

« Land of the free »

Il n’a pas fallu attendre longtemps avant que Nayib Bukele ne dégaine son téléphone et n’attaque les trois sénateurs sur Twitter.

« OK boomers… Vous n’avez aucune juridiction sur une nation souveraine et indépendante. Nous ne sommes pas votre colonie, votre arrière-cour ou votre avant-cour. Restez en dehors de nos affaires internes. N’essayez pas de contrôler quelque chose que vous ne pouvez pas contrôler », leur a-t-il asséné.

Quelques heures plus tard, le président salvadorien a tweeté « Land of the free », accompagné du drapeau de son pays et d’un hashtag dédié au bitcoin.

Dégradation des relations

Il s’agit en réalité d’un nouvel épisode d’une série qui voit les relations entre le Salvador et les Etats-Unis se dégrader. Le pays possède 1.801 bitcoins, et ce n’est pas la chute que la cryptomonnaie a subie en janvier qui décourage son président de poursuivre ses achats, bien au contraire. Le mois dernier, M. Bukele en acheté quelques centaines de bitcoins supplémentaires, profitant de la baisse de leur prix.

Le bitcoin est devenu une monnaie légale au Salvador en septembre 2021, sous l’impulsion de son président. Celui-ci n’a cesse d’être vilipendé par de nombreux économistes – et par l’opposition – pour son refus de rendre des comptes dans le processus d’achat et de gestion des fonds.

Les Etats-Unis sont particulièrement remontés contre M. Bukele, l’accusant de manœuvres anti-démocratiques effectuées dans le but de renforcer continuellement son pouvoir. Des accusations auxquelles il a répondues à l’automne dernier en s’auto-proclamant « dictateur le plus cool du monde« .

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