‘Nous risquons une crise alimentaire imminente si des mesures ne sont pas prises rapidement’

Avec la main d’oeuvre bien moins disponible et la chaîne d’approvisionnement perturbée, la crise sanitaire engendrée par le coronavirus pourrait également engendrer une crise alimentaire globale, prévient l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).

Les conséquences du coronavirus sont multiples. D’abord sanitaires, vu le nombre de patients et de décès qui augmentent de jour en jour. Économiques ensuite, vu l’impact sur de nombreux secteurs et des millions de personnes mises en chômage temporaire. Et elles pourraient bientôt devenir également alimentaires.

‘Nous risquons une crise alimentaire imminente si des mesures ne sont pas prises rapidement pour protéger les plus vulnérables, préserver les chaînes d’approvisionnement alimentaire mondiales et atténuer les effets de la pandémie sur l’ensemble du système alimentaire’, alerte l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture sur son site web. Ces perturbations sont à prévoir en avril et mai, ajoute-t-elle.

Produits agricoles

Les produits issus de l’agriculture sont particulièrement menacés, la ‘faute’ surtout aux restrictions de mouvements et aux ‘comportements d’aversion de base’ des travailleurs, selon la FAO, soit les craintes de contagion qui ‘pourraient exacerber l’effet sur la consommation alimentaire, en réduisant les visites sur les marchés alimentaires’.

‘Nous constatons cependant déjà des difficultés en termes de logistique impliquant le transport des aliments, et l’impact de la pandémie sur le secteur de l’élevage en raison de l’accès réduit aux aliments pour animaux et de la capacité réduite des abattoirs, comme ce fut le cas en Chine’, indique l’organisation.

Si nous sommes encore éloignés de telles perturbations grâce aux approvisionnements assurés, la viande et les denrées périssables pourraient dans un futur proche subir des pics de prix en raison de leur plus grande valeur. L’huile de palme est également sévèrement menacée par une pénurie. La FAO estime que ce ne sera pas le cas pour les principaux produits de base qui sont toujours en quantité suffisante.

Restrictions

Cependant, les restrictions prises par les pays pour réserver des approvisionnements stratégiques augmenteraient les risques de pénurie. ‘Certains pays pourraient recourir à des restrictions commerciales ou à un stockage agressif dans le but de préserver la sécurité alimentaire, ce qui pourrait rapidement faire grimper et soutenir les prix des céréales et des oléagineux’, indique l’entreprise d’analyse Fitch Solutions.

Ces pays, ce sont surtout le Vietnam, qui a freiné les exportations de riz, et la Russie, qui a cessé les exportations de céréales transformées. Les pays du Moyen-Orient, la Chine, le Japon et la Corée du Sud font par ailleurs partie des plus exposés à une hausse des prix alimentaires, en raison de leurs importantes importations en nourriture.

Une pénurie en Belgique?

Chez nous, de telles perturbations ne sont pas à l’ordre du jour, malgré les images de supermarchés envahis ou vidés. ‘Il y a des millions et des millions d’articles de nourriture en stock’, déclarait il y a deux semaines la Première ministre Sophie Wilmès. Entre-temps, la situation a changé et de nouvelles mesures de confinement ont été adoptées. Mais les magasins alimentaires restent ouverts.

À l’échelle européenne, la Commission tente de fluidifier au maximum les échanges intra-communautaires de produits agricoles, indique le Sillon belge. Le secteur est pourtant inquiet et demande à l’institution de prendre ‘toutes les mesures possibles pour éviter une rupture d’approvisionnement et une flambée des prix’.

Exemple d’une inflation qui menace: les rayons des pâtes sont souvent pris d’assaut dans les magasins, victimes des acheteurs frénétiques. Alors que le prix du blé est effectivement en train de flamber. Bloomberg affirme par ailleurs que ‘de Huelva à Hambourg, de Newcastle à Naples, les agriculteurs européens ont des difficultés pour trouver des personnes prêtes à venir récolter des fruits et des légumes dans une fenêtre de quelques jours’.

‘Pour le moment, les rayons des supermarchés sont toujours bien fournis mais nous pouvons déjà voir que des pressions commencent à avoir un impact sur les chaînes d’approvisionnement’, affirme l’économiste en chef de la FAO.

L’organisation propose des solutions pour contrer cette crise, telles que la poursuite du commerce alimentaire mondial, garder les réseaux liés aux chaînes d’approvisionnement ‘intacts et efficaces’, assurer la sécurité des travailleurs impliqués dans les systèmes alimentaires… Et, surtout, éviter les politiques protectionnistes. À bon entendeur…

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