Nous n’y sommes pas encore: et si la première phase de la campagne de vaccination était la partie facile?

De plus en plus de pays qui ont réalisé des progrès précoces dans leurs programmes de vaccination de masse commencent maintenant à rencontrer des difficultés. Et les nations qui sont en train de rattraper leur retard pourraient bientôt être confrontées aux mêmes problèmes…

Mardi dernier, la Maison-Blanche a admis que le pays n’atteindrait pas l’objectif fixé de longue date par l’administration Biden, à savoir administrer au moins une dose de vaccin à 70% des adultes éligibles d’ici le 4 juillet. Les responsables de la santé peinent à persuader les jeunes Américains de se faire vacciner, malgré les tombolas, les cadeaux et autres promotions. Près d’un tiers des Américains n’ont aucune intention de se faire vacciner.

Pendant ce temps, d’autres pays rattrapent leur retard. L’Union européenne a considérablement renforcé son programme de vaccination au mois de mai, procédant désormais à environ 4 millions d’injections par jour – un chiffre bien supérieur à ce que font actuellement les États-Unis. Le Canada, qui a également connu un démarrage lent, est également en train de combler l’écart: 67% des Canadiens sont au moins partiellement vaccinés. Les États-Unis ne détiennent plus non plus le record du nombre de doses administrées, la Chine étant désormais largement en tête après avoir vacciné plus d’un milliard de personnes.

Mais se concentrer sur les chiffres bruts ne permet pas de saisir la complexité de cette période intermédiaire des campagnes de vaccination. L’Union européenne et le Canada, ainsi que d’autres pays qui pratiquent actuellement une bonne campagne, sont également susceptibles de voir leur taux de vaccination quotidien baisser cet été, car ils sont confrontés à des difficultés liées aux citoyens réticents et aux variants, ainsi qu’à des problèmes d’approvisionnement.

Un quart des Européens ne veulent pas du vaccin

Les sondages d’opinion de l’UE montrent que plus du quart des Européens estiment qu’il est peu probable qu’ils se fassent vacciner. En Bulgarie, où l’enquête a révélé que les hésitations à l’égard du vaccin étaient les plus fortes, 61% des personnes interrogées ont déclaré qu’il était peu probable qu’elles se fassent vacciner.

La réticence à l’égard des vaccins est un problème mondial récurrent. Après cinq mois de vaccination et une quantité suffisante de vaccins disponibles, à peine 10% des Russes sont complètement vaccinés. Là encore, la raison en est la méfiance. Même en Inde, malgré une récente flambée dévastatrice du virus, l’hésitation est le principal facteur expliquant la lenteur du déploiement des vaccins. Les médecins disent faire du porte-à-porte pour convaincre les gens… Un processus extrêmement lent.

Et même lorsque les campagnes de vaccination se déroulent bien, le retour à la normale n’est guère facile. La Grande-Bretagne disposait de l’un des programmes les plus réussis de toutes les grandes économies, mais elle a tout de même dû retarder sa réouverture en raison de la menace que représente le variant Delta.

Des chercheurs britanniques comme Oliver Johnson, professeur de théorie de l’information à l’université de Bristol, ont déclaré que les propriétés de propagation rapide du variant Delta, et la capacité quelque peu affaiblie des vaccins à le combattre, montrent que 85% de la population devrait être vaccinée pour obtenir une immunité de groupe.

Israël remet le masque, la Chine s’isole pour une année supplémentaire

En Israël, pays qui a également été salué comme un exemple de réussite en matière de vaccination, les autorités s’interrogent aujourd’hui sur ce qu’elles doivent faire. Une vague de nouveaux cas dans les écoles et les inquiétudes concernant la propagation du variant Delta ont conduit à une nouvelle poussée pour vacciner les adolescents. Selon les données du ministère israélien de la santé, moins de 4% des jeunes de 12 à 15 ans ont été vaccinés depuis qu’ils sont devenus éligibles ce mois-ci, tandis qu’environ trois quarts des adultes ont été vaccinés. Israël a même annoncé qu’il revenait aux exigences relatives au port du masque à l’intérieur.

Israël utilise principalement le vaccin Pfizer, qui est très efficace même contre le variant Delta. Mais de nombreux pays utilisent des vaccins qui le sont moins, et qui n’ont souvent pas été testés contre ce variant. Des pays comme le Bahreïn, la Mongolie et les Seychelles, qui comptaient sur Sinopharm et Sinovac, les vaccins de fabrication chinoise moins efficaces, connaissent aujourd’hui d’importantes vagues d’infection.

C’est peut-être l’une des raisons pour lesquelles la Chine ne veut pas rouvrir dans l’immédiat, malgré sa campagne de vaccination record: Pékin prévoit de maintenir les restrictions aux frontières liées à la pandémie pendant au moins une année supplémentaire, a rapporté mardi le Wall Street Journal.

Cela ne veut pas dire que les vaccins ne fonctionnent pas. Au contraire, ceux-ci offrent toujours une protection importante contre le virus. Mais l’augmentation des cas dans des pays relativement bien vaccinés montre que le développement des vaccins, et même le lancement d’un programme de vaccination réussi, n’est que le début d’un long processus, lent et logistiquement difficile.

Afrique et Amérique du Sud: dramatique

L’alternative, cependant, est bien pire. Les cas de coronavirus sont en augmentation en Afrique, un continent qui a jusqu’à présent été largement épargné par les flambées épidémiques les plus graves, mais qui souffre toujours d’une grave pénurie de doses de vaccin. Au Kenya, les autorités affirment que le variant Delta est l’une des raisons de l’augmentation des cas.

Quant à l’Amérique du Sud, cela fait maintenant de nombreuses semaines que la région est devenue le point chaud de la pandémie au niveau mondial, en grande partie à cause de l’accès limité aux vaccins dans une grande partie du continent. Cela a entraîné une vague de décès sans équivalent dans aucune autre région du globe. Le Paraguay, le Suriname, l’Argentine, l’Uruguay, la Colombie, le Brésil et le Pérou – dans cet ordre – sont tous frappés de plein fouet par le covid-19. Même au Pérou, qui se classe pourtant au septième rang en termes de couverture vaccinale, le taux de mortalité par million est de 9,12, soit plus de trois fois celui de l’Inde.

Ces épidémies régionales posent des risques à l’échelle mondiale, retardant la reprise et laissant entrevoir des variants encore plus inquiétants que Delta.

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