Les médicaments semblent fonctionner moins bien sur vous ? Blâmez vos ancêtres néandertaliens

Nous ne réagissons pas tous exactement de la même manière à la prise d’un médicament, le fait est connu des scientifiques et peut avoir de nombreux facteurs pour origine, qui vont de vos habitudes alimentaires à votre patrimoine génétique. Et à l’échelle du génome, ce sont vos ancêtres qui influent directement sur votre santé. Et ce jusqu’à l’aube de l’humanité comme nous la connaissons, il y a de cela des dizaines de milliers d’années.

C’est un fait maintenant admis par la communauté scientifique : notre espèce, Homo sapiens, était interféconde avec Homo neandertalensis, son très proche cousin disparu il y a environ 30.000 ans, et elle ne s’est pas privée de faire sa connaissance. De nos jours encore, nous possédons, peu ou prou, une certaine quantité de gènes qui nous ont été transmis par des ancêtres néandertaliens, ainsi d’ailleurs que d’autres espèces humaines éteintes, comme le mystérieux Dénisovien. Cette proportion peut varier de 1 à 3% selon les individus, et dépend en général de l’origine géographique, les personnes d’origine eurasienne en présentant ainsi une part plus importante.

Des gènes anciens toujours influents

Or, cette proportion plus ou moins importante de gènes anciens peut affecter votre santé de nos jours, selon nouvelle étude publiée dans The Pharmacogenomics Journal. La présence de gènes néandertaliens dans le génome humain moderne pourrait compromettre la capacité de certains individus à métaboliser en toute sécurité des médicaments courants.

Quand on consomme des médicaments, notre corps doit bien à un moment donné les assimiler, ce qui est le rôle d’une famille de catalyseurs connus sous le nom d’enzymes du cytochrome P450. Or, les gènes qui codent ces enzymes existent en plusieurs versions ; la plus courante est connue sous le nom de CYP2C9*1 et est portée par environ 88 % des Européens modernes. Les 12 % restants sont porteurs d’un allèle appelé CYP2C92, qui diffère du CYP2C91 par un seul nucléotide, mais qui est environ 70 % moins efficace pour décomposer des médicaments tels des anticoagulants ou des antiépileptiques courants. Selon les auteurs de l’étude, les porteurs du CYP2C9*2 sont classés comme « métaboliseurs lents » et peuvent donc avoir besoin de doses plus faibles de certains produits pharmaceutiques que les non-porteurs.

Conséquences d’amours préhistoriques

Or, selon les auteurs de l’étude, cette particularité pourrait bien venir des néandertaliens, qui présentaient des structures génétiques plutôt similaires. Pour en avoir le cœur net, ils ont obtenu des séquences génétiques prélevées sur des personnes appartenant à 146 familles différentes et les ont comparées à une base de données de génomes d’hominidés modernes et anciens. Les résultats indiquent que ces deux variantes génétiques sont effectivement dérivées de l’ADN de l’homme de Néandertal et se sont retrouvées dans notre génome à la suite de relations intimes, et fécondes, entre nos ancêtres et ces cousins disparus.

Selon les auteurs de l’étude, cet échange génétique entre les deux lignées a commencé il y a environ 60.000 ans, et aurait donc encore des conséquences jusqu’à maintenant. « C’est un cas où le mélange avec les Néandertaliens a un impact direct en clinique », résume l’auteur de l’étude, Hugo Zeberg. Dans ce cas-ci, pas vraiment à notre avantage. Mais la prise de conscience de ce mécanisme grâce aux travaux génétiques permettra de le prendre en compte pour l’élaboration de nouveaux traitements. Tout en ayant, au passage, une pensée pour de lointains ancêtres qui n’ont certainement jamais imaginé que leur vie amoureuse aurait ce genre de conséquences un jour.

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