L’interdiction européenne des moteurs à combustion sème la zizanie au sein du gouvernement allemand

L’introduction d’une interdiction de la vente de nouvelles voitures à moteur à combustion au milieu de la prochaine décennie, que vient de décider le Parlement européen, est trop ambitieuse et coûteuse. En outre, la mesure va à l’encontre du marché et désavantagera les citoyens de l’Union européenne. C’est ce qu’a déclaré l’Association allemande de l’industrie automobile (VDA), la fédération de l’industrie automobile allemande, dans une réaction à cette décision. La fédération allemande a également été soutenue dans sa protestation par un certain nombre d’autres organisations.

L’interdiction de la vente de nouvelles voitures équipées de moteurs à combustion est un élément essentiel de l’objectif à long terme de la Commission européenne, qui est de parvenir à la neutralité climatique d’ici le milieu du siècle.

Jusqu’à présent, le secteur des transports était l’un des secteurs à la traîne dans la lutte contre le changement climatique. Après le vote de l’interdiction au Parlement européen, le secteur automobile a réagi rapidement. En Allemagne notamment, qui se caractérise par un secteur automobile puissant, les protestations sont fortes.

Un frein à l’innovation ?

« L’interdiction imposée aux moteurs à combustion interne par le Parlement européen causera des dommages considérables au secteur automobile et à la population », a fait valoir Hildegard Müller, présidente de l’Association de l’industrie automobile allemande. « En outre, l’interdiction bloquera également les développements innovants et les technologies modernes. »

Mme Müller a également souligné que l’infrastructure de recharge des voitures électriques en Europe n’est pas prête à faire face à l’interdiction des moteurs à combustion interne. « Il est donc encore beaucoup trop tôt pour aller de l’avant avec une telle mesure », a prévenu Mme Müller. « Les conducteurs devront faire face à des coûts plus élevés et l’interdiction aura également un impact négatif sur la confiance des consommateurs. »

Mme Müller a été soutenue dans sa critique par l’Association des constructeurs européens d’automobiles (Acea). « Compte tenu de la volatilité et de l’incertitude qui règnent quotidiennement dans le monde, il n’est pas approprié de regarder au-delà de la fin de cette décennie pour faire des choix », a souligné Oliver Zipse, président de l’association européenne de l’industrie et directeur général du constructeur automobile allemand BMW Group.

L’Allgemeine Deutsche Automobil-Club (Adac), l’association allemande des automobilistes, s’est également jointe aux critiques, soulignant qu’il ne sera pas possible d’atteindre les objectifs ambitieux de protection du climat dans le domaine des transports uniquement grâce à l’électromobilité.

Lobbying

On s’attend toutefois à ce que les lobbyistes tentent de saper la décision du Parlement européen. Après tout, les États membres de l’Union européenne doivent encore essayer de trouver une position commune au sein du Conseil européen avant d’entamer les négociations avec le Parlement européen.

Karsten Schulze, directeur technique d’Adac, déclare qu’il appellera le Conseil européen à garantir l’ouverture technologique et à trouver un compromis viable.

Selon les analystes, le gouvernement allemand en particulier, qui a toujours défendu les intérêts de son secteur automobile auprès de la Commission européenne, risque d’être une cible privilégiée dans ce processus. « Les membres du gouvernement allemand sont fortement divisés sur la question », notent les analystes.

« Les membres du parti écologiste Die Linke soutiennent ouvertement l’introduction de l’interdiction, tandis que leurs collègues du Sozialdemokratische Partei Deutschlands (SPD) et du Freie Demokratische Partei (FDP) sont plus susceptibles de soutenir la position de l’industrie automobile. Après tout, ces groupes, respectivement, veulent surtout sauver des emplois et protéger l’esprit de la neutralité technologique. »

Volker Wissing, le ministre allemand des Transports, s’est déjà prononcé contre cette interdiction. Wissing (FDP) a fait valoir que de nombreux emplois dépendent du moteur à combustion interne et a promis de se battre pour faire passer une exception à l’interdiction pour les moteurs utilisant des carburants synthétiques.

Son collègue de parti Christian Lindner, ministre allemand des Finances, a pour sa part souligné que le gouvernement allemand doit faire des efforts pour changer les plans européens.

(JM)

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