Le 7 avril, on estimait à 65% les maisons de repos bruxelloises touchées par le coronavirus, malgré des chiffres incomplets. En Flandre, cette proportion n’atteignait que la moitié. Un nouveau rapport délivré par le ministre bruxellois de la Santé ce vendredi soir vient éclaircir la situation dans la capitale. Et il noircit encore un peu plus le tableau: 80% des maisons de repos sont affectées par le covid-19.
116 maisons de repos et de soins bruxelloises sur 146 sont touchées par le covid-19, a communiqué ce vendredi soir Alain Maron (Ecolo), ministre bruxellois de la Santé.
Depuis le début du décompte, 190 résidents sont décédés des causes du coronavirus. Il faut ajouter à cela 254 décès suspects, ce qui porterait le total à 444.
Dans ce triste bilan, on compte aussi 568 travailleurs malades ou absents sur les 7.000 que compte le secteur (public et privé).
La situation dans les maisons de repos est très préoccupante en Belgique. Des initiatives conjointes en Régions et au fédéral ont libéré des moyens ainsi que du personnel supplémentaire. En ce compris du matériel pour ‘tester l’ensemble des résidents et du personnel de ces maisons de repos’, mais qui est à ce jour ‘clairement insuffisant’, a expliqué le ministre par communiqué.
Bruxelles décolle et la Flandre se stabilise
Au niveau des Régions, on déplore une importante disparité entre Bruxelles d’un côté, et la Wallonie et la Flandre de l’autre.
Un rapport du 7 avril indiquait qu’à Bruxelles, le nombre de maisons de repos avec au moins un cas de Covid-19 avait augmenté de 17 % entre le 31 mars et le 6 avril. Le nombre de maisons de repos avec deux cas ou plus avait lui augmenté de 20 % en une semaine.
En Flandre, la situation est plus stable, le nombre de centres de soins résidentiels avec deux cas ou plus a augmenté de 4 % du 31 mars au 6 avril, tandis que celui avec un cas ou plus est resté presque inchangé.
En Wallonie, on constate une légère augmentation du nombre de cas de Covid-19 dans les maisons de repos, mais là encore, loin du niveau bruxellois.
Participation
Comment expliquer cette disparité ? Il faut d’abord savoir que les chiffres à Bruxelles étaient jusqu’au rapport de ce vendredi soir incomplets. Ceux de la Wallonie le sont encore, ce qui rend difficiles les comparaisons.
Il existe 822 centres d’hébergement flamands, 762 wallons et 146 bruxellois, dont la plupart sont des maisons de repos. Ces centres de soins résidentiels (MR et MRS) transmettent quotidiennement leurs chiffres à l’Agence de soins et de santé pour la Flandre et à l’AVIQ en ce qui concerne la Wallonie. Ces chiffres sont ensuite résumés et transmis à Sciensano, qui fait son rapport quotidien. Au niveau bruxellois, l’Institut doit rechercher les chiffres par ses propres moyens, comme il le fait pour la communauté germanophone.
Cette lasagne bien belge complique les choses depuis le début du recensement. En Flandre et en Wallonie, des chiffres sont disponibles depuis le 18 mars et le 20 mars respectivement. Pour Bruxelles par contre, les premiers chiffres ne sont disponibles qu’à partir du 25 mars.
Il faut ajouter à cela de sérieuses différences dans le taux de participation des différentes régions (les maisons de repos où les chiffres sont disponibles). En Flandre, par exemple, on constate régulièrement un taux de participation supérieur à 90 %. Mais en Wallonie, les chiffres disponibles varient fortement: dans le meilleur cas, on y connaît 86 % des chiffres, mais dans le pire, seuls 69 % des données sont disponibles.
La situation était encore plus délicate à Bruxelles, où l’on n’y connait qu’un maximum de 82 % des chiffres des maisons de repos, et seuls 50 % des données dans le pire cas. La cause: il n’existait pas de ligne d’assistance téléphonique centrale dans la capitale comme c’est le cas en Flandre ou en Wallonie.
Ce manque d’informations a eu des conséquences graves en termes de décès. Sans comprendre et déterminer l’impact de l’épidémie dans les maisons de repos, impossible de prendre les bonnes mesures. Il faut aussi déplorer le manque de masques et de tests disponibles, les deux péchés originels de cette crise sanitaire.
Les autorités tentent de corriger le tir. En Wallonie, l’armée a été appelée en renforts et a fait un appel à tous les bénévoles liés aux soins de santé. Le gouvernement bruxellois a fait la demande jeudi soir au gouvernement fédéral pour un renfort de l’armée, en plus des 200 volontaires issus des soins de santé (médecins, infirmiers et aides-soignants). Un numéro de garde est aussi disponible pour signaler tous les nouveaux problèmes.
Les décès
Une question reste toutefois latente. Sur le total des décès annoncés par Sciensano en Belgique, combien sont issus des maisons de repos ? Là encore, c’est l’incertitude, car les tests étant insuffisants, il est pour l’heure impossible de déterminer précisément les décès liés au covid-19. Comme vu plus haut dans le rapport d’Alain Maron, il y a des cas suspects.
‘Les décès suspects concernent des patients qui n’ont pas été testés pour le COVID-19, mais qui répondaient aux critères cliniques de la maladie selon le médecin. C’est le cas de la grande majorité des personnes qui décèdent en dehors du cadre hospitalier’, précise le site du SPF Santé publique. Impossible donc d’avoir une certitude sur le bilan.
Sur le total de 3.019 décès survenus en Belgique depuis le début de l’épidémie, Sciensano estime toutefois que 40 % ont été enregistrés en maison de repos.
Assurément, suite à la stabilisation des chiffres dans les hôpitaux, les maisons de retraite deviennent dorénavant le centre des préoccupations.
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