Les congés flexibles: la pire chose qui soit pour les employés, et la meilleure pour leurs employeurs

Richard Branson, le magnat de l’empire Virgin, vient d’introduire la « non-policy » dans les sites de la compagnie aérienne Virgin aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, un système de gestion des ressources humaines très séduisant, puisqu’il permet aux employés de prendre des congés dès qu’ils le souhaitent, et ce, pour aussi longtemps qu’ils le désirent.

Mais pour Lucy Kellaway du Financial Times, cette formule n’est pas aussi avantageuse pour les salariés qu’elle semble l’être. En effet, cette flexibilité est surtout bénéfique pour l’employeur, tandis que pour les employés, elle risque de se solder par une pression encore accrue.

Branson a bien souligné que ses collaborateurs ne devront profiter de cette liberté dans la détermination de leurs congés que lorsqu’ils auront la certitude que leur absence ne perturbera pas le service, l’activité de l’entreprise, ou leur carrière. Mais Kellaway observe qu’en plusieurs décennies de carrière, elle n’a jamais eu vraiment le sentiment d’avoir achevé son travail, et elle ne doute pas que ce soit toujours vrai pour la grande majorité des employés. Il est donc très difficile de juger quand il est possible de poser ses congés, alors que le problème ne se pose plus quand ceux-ci sont imposés.

En outre, certains employés qui ne sont pas passionnés par leur emploi souhaitent prendre le plus de vacances possible, alors que ceux qui sont les plus motivés ont du mal à s’imposer une pause. Dans les deux cas, les employés auront des difficultés à se montrer raisonnables : ceux qui ne sont pas motivés par leur travail auront tendance à prendre « trop » de vacances, alors que les autres éviteront d’en prendre. Là encore, des congés imposés permettent d’éviter les abus dans un sens ou dans l’autre.

Pour que cette politique « non-policy » fonctionne, il faudrait que les employés aient une notion claire de ce qui est acceptable en termes de quantité de vacances qu’ils peuvent prendre. Mais ils n’en ont pas la moindre idée, car elle dépend non seulement des gens, mais aussi des pays, des professions exercées, et même des entreprises dans lesquelles ils travaillent. Un Européen, et particulièrement un Français, est habitué à bénéficier de plusieurs semaines de vacances par an, mais aux Etats-Unis, les salariés n’ont souvent que 10 jours par an, et il est courant de ne pas tous les prendre.

Finalement, cette flexibilité est le pire arrangement pour les travailleurs, et le meilleur pour leurs employeurs, conclut Kellaway. La productivité grimpe, non pas parce que tout le monde est heureux de jouir de cette liberté, mais parce qu’on ne peut jamais s’arrêter de travailler. Mais cela ne signifie pas que le système de contrôle classique est une panacée. L’idéal serait un système mixte, qui consisterait à imposer un certain nombre de jours de congés aux employés, mais en les laissant gérer eux-mêmes leur calendrier, et en leur accordant une souplesse de quelques jours de congés en plus ou en moins, par exemple. 

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