Principaux renseignements
- Malgré les sanctions, l’économie russe a fait preuve de résilience, les chiffres officiels suggérant une croissance supérieure à celle de tous les pays du G7 en 2024.
- Cependant, l’inflation persistante, la flambée des taux d’intérêt et les pénuries de main-d’œuvre posent d’importants défis à la Russie, qui s’inquiète d’une éventuelle récession ou d’un effondrement de son économie.
- Le rouble russe est devenu la monnaie la plus performante au monde cette année, s’appréciant de plus de 40 pour cent, mais cet optimisme est tempéré par des inquiétudes concernant la stagnation.
La résistance économique de la Russie face aux sanctions
Malgré les sanctions sans précédent prises à la suite de l’invasion de l’Ukraine en 2022, l’économie russe a fait preuve d’une résilience surprenante. Les chiffres officiels suggèrent que la croissance économique de la Russie en 2024 a dépassé celle de tous les pays du G7, grâce à d’importantes dépenses militaires et à une réorientation des exportations de pétrole vers des marchés tels que la Chine et l’Inde. Une flotte secrète de pétroliers a permis à Moscou de contourner les sanctions.
Le rouble russe est devenu la monnaie la plus performante au monde cette année, s’appréciant de plus de 40 pour cent selon la Bank of America. Toutefois, à l’approche de 2026, un changement de perspectives économiques se dessine. L’inflation persistante, la flambée des taux d’intérêt dépassant les 20 pour cent et les pénuries de main-d’œuvre posent d’importants défis à la Russie.
Alors que le marché mondial du pétrole a connu un ralentissement au début de l’année avant que le récent conflit israélo-iranien ne déclenche une flambée des prix, des inquiétudes concernant une récession potentielle sont apparues. Le ministre russe de l’économie a averti que le pays était « au bord » d’une récession en raison d’une surchauffe économique. Certains analystes prédisent même un possible effondrement économique.
L’économiste Evgeny Nadorshin, basé à Moscou, pense que le ralentissement sera « léger » et rejette les suggestions d’un effondrement économique comme des « mensonges ». Il souligne le taux de chômage record de 2,3 pour cent en Russie, qui devrait culminer à 3,5 pour cent l’année prochaine, et le compare au taux de chômage de 4,6 pour cent au Royaume-Uni.
Inquiétudes croissantes concernant l’inflation
Malgré cet optimisme, les craintes de stagnation persistent. Un taux d’inflation de 9,9 pour cent en avril, dû en partie aux sanctions et aux pénuries de main-d’œuvre qui font grimper les salaires, reste une source d’inquiétude. Un déficit de main-d’œuvre d’environ 2,6 millions de travailleurs à la fin de 2024, dû en grande partie au fait que les hommes rejoignent l’armée ou fuient à l’étranger, exacerbe la situation.
Les taux d’intérêt record de la banque centrale visant à juguler l’inflation font qu’il est plus coûteux pour les entreprises d’obtenir des capitaux pour leurs investissements. Parallèlement, la baisse des recettes pétrolières et gazières due aux sanctions et à la chute des prix a contribué à creuser le déficit budgétaire, limitant les dépenses du gouvernement en matière d’infrastructures et de services publics.
L’analyste politique András Tóth-Czifra souligne la réaffectation des fonds de projets d’investissement vitaux dans des domaines tels que les transports et les services publics en raison des énormes dépenses militaires, ce qui entraîne une détérioration de la qualité des services.
Si la Russie a mieux résisté que prévu aux sanctions, leur impact continue de peser lourdement sur l’économie. Les entreprises ont du mal à importer les technologies nécessaires, ce qui affecte gravement des secteurs comme la construction automobile. L’interdiction par l’UE des importations de charbon russe et son retrait progressif du gaz russe d’ici 2027 réduisent encore les perspectives économiques de la Russie.
Les conséquences à long terme
Le Kremlin minimise ces inquiétudes en mettant l’accent sur la « stabilité macroéconomique » et la « force sous-jacente » de l’économie russe. Toutefois, les conséquences à long terme de la guerre restent floues. Un accord de paix pourrait alléger la pression exercée sur Moscou, ouvrant potentiellement la voie à une normalisation des relations avec les États-Unis.
L’Europe pourrait maintenir ses sanctions même en cas de paix. Il est peu probable que l’Europe recommence à acheter du pétrole et du gaz russes, bien qu’une augmentation modeste des importations de gaz reste possible. Néanmoins, ce scénario brosse un tableau économique sombre pour la Russie. Bien qu’elle ait réorienté ses exportations de pétrole en les éloignant de l’Europe, il est plus difficile de reproduire ce changement pour le gaz.
En fin de compte, les coûts à long terme de la guerre pour la Russie sont indéniables, et le Kremlin est à court d’options pour les atténuer.