Récupérer le CO2 émis lors de la production d’acier pour créer du carburant de synthèse, proposent Engie et l’américain Infinium avec ArcelorMittal. Un projet qui devra capter 300.000 tonnes par an sur le site de Dunkerque, dès 2026, s’il est confirmé. La capture du carbone n’en est aujourd’hui qu’encore à ses balbutiements, et des projets en cours rencontrent de nombreuses critiques.
La sidérurgie, après l’énergie, est le secteur qui pollue le plus. Il pollue tellement, qu’on peut même en profiter pour utiliser le CO2 émis. C’est le pari que lancent Engie et Infinium avec ArcelorMittal.
Le but est de capter le carbone de l’usine sidérurgique d’ArcelorMittal à Dunkerque, le plus grand site d’Europe, et de le mélanger à de l’hydrogène (obtenu par électrolyse de l’eau, via de l’énergie verte) pour le transformer en carburant de synthèse, ou aussi appelé electro-carburant. Ce carburant, quoique coûteux, sera alors utilisé dans l’aviation ou dans le transport maritime. Il pourrait également être utilisé pour la production de plastic.
« Si nous pouvons donner une valeur au CO2, cela créerait une économie du CO2 au lieu de le voir uniquement comme une source d’émission », se réjouit un responsable du projet, M. Schluelzle, qui voit le CO2 devenir un produit.
Ainsi, 300.000 tonnes de CO2 pourraient être captées tous les ans, contribuant donc à la décarbonisation du site. Engie installera également un électrolyseur à 400 MW pour produire l’hydrogène nécessaire à la transformation. La production de carburant devrait commencer en 2026, et l’installation devrait coûter dans les 500.000 euros, estime Sébastien Arbola, directeur général adjoint d’Engie, cité par les médias français. Fin 2023, Engie et Infinium devraient communiquer « leur décision finale sur l’investissement ».
Capter le carbone, une idée illusoire?
Pour éviter que la température augmente au-delà d’un degré et demi, il faut réduire les gaz à effet de serre – sur ce point tout le monde est d’accord. Mais sur le how to, les avis divergent. D’un côté, des personnes estiment qu’il faut réduire toutes les émissions possibles, et d’un autre côté, des personnes estiment que la technologie permettra de continuer notre mode de vie tout en réduisant les émissions, car les machines (avions, voitures, usines, etc.) deviendront moins polluantes, et que des technologies permettent de capter le carbone restant, puis de le transformer ou de l’enfouir. En résumé.
Ainsi, les projets de captage du carbone se multiplient ces dernières années. Mais une récente étude a montré que beaucoup moins de carbone est capté que ce que l’on pensait. Dans l’Alberta au Canada, Shell possède une usine de production d’hydrogène – non par électrolyse avec des énergies renouvelables, mais par échauffement du méthane pour séparer l’hydrogène et le dioxyde de carbone, et récupérer les deux éléments. En théorie, cela sonne comme une solution miracle, mais dans les faits, des quantités énormes de CO2 ont tout de même été rejetées dans l’atmosphère. Depuis 2015, cinq millions de tonnes ont été captées sur le site, et 7,5 millions de tonnes sont parties dans l’air, trouve une étude. Comme la consommation, tous les ans, de 1,2 million de voitures.
Un captage de 48%, voire 39% si on inclut d’autres activités sur le site, alors que l’industrie promet que 90% du CO2 sont « aspirés ». Shell dit au gouvernement que 80% des émissions sont captées, met ne donne qu’une partie des chiffres, concernant une partie de la production de l’hydrogène.
D’un autre côté, les défenseurs de la technologie vont avancer qu’elle n’est aujourd’hui qu’encore à ses balbutiements, et que moyennant plus de recherche, elle pourra être améliorée et capter plus de carbone, de manière plus efficiente.
Finalement, ce qui n’est pas dit dans le projet d’Engie, est la quantité de dioxyde de carbone que le carburant de synthèse, une fois consommé par les avions, émettra. Là aussi, une critique pourrait être que dans la balance générale, les émissions baissent, mais que dans les faits, les avions continuent à polluer.