Comme prévu, la Russie se retire de la rive droite du fleuve Dniepr. L’arme russe fait maintenant tout son possible pour arrêter les Ukrainiens au bord du cours d’eau.
La Russie se retire de Kherson : quel impact cela aura-t-il sur la guerre ?

Pourquoi est-ce important ?
La reprise de Kherson était dans l'air depuis des semaines, mais reste une victoire majeure pour l'Ukraine. Les forces russes sont ainsi repoussées de plus en plus loin dans l'arrière-pays. La Crimée est désormais dans leur ligne de mire.Les faits : Le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, et le commandant en chef de l’offensive en Ukraine, Sergueï Sourovikine, ordonnent le retrait des troupes à Kherson.
- Les soldats de l’autre côté du Dniepr étaient condamnés depuis longtemps. Les forces ukrainiennes ont avancé lentement, mais sûrement, tout en bombardant les ponts sur la rivière, les rendant inutilisables. Quelque 20.000 soldats ont été abandonnés à leur sort.
- Dans un message vidéo (mal interprété), Sourovikine laisse entrendre qu’il serait préférable de se replier sur la rive gauche du fleuve et de la défendre. Il présente le retrait sous une forme positive : « Nous sauverons la vie de nos soldats et leur aptitude au combat. De plus, une partie des troupes sera libérée, que nous pourrons utiliser sur d’autres fronts. »
- Beaucoup de mots pour couvrir la défaite. Sergei Markov, ancien proche conseiller du dictateur russe Vladimir Poutine, a qualifié ce retrait de « plus grande perte géopolitique de la Russie depuis l’éclatement de l’Union soviétique ».
- Du côté ukrainien, le mot « retrait » est particulièrement nuancé : « L’armée russe ne quitte pas Kherson. Elle a été chassée de Kherson par les forces armées ukrainiennes », a écrit sur Twitter Oleksii Arestovych, conseiller du président ukrainien Volodymyr Zelensky.
L’essentiel : la défaite russe pourrait faire basculer la guerre. En même temps, la prudence est de mise.
- Maintenant que Kherson est tombée, la voie est ouverte vers la Crimée. Du moins, si l’Ukraine parvient à traverser le Dniepr. Le défi est de toute façon difficile à relever : la Russie menace de faire sauter le barrage de Nova Kakhovka, ce qui devrait créer une sorte de plaine de fer sur le Dniepr. En outre, la traversée d’une rivière est toujours un défi difficile à relever pour une troupe de l’armée, comme l’a prouvé la Russie au début de cette année. Toutefois, la reconquête de Kherson permet à l’Ukraine de placer des systèmes de missiles tels que le HIMARS plus loin, voire de bombarder les routes d’accès de la Crimée.
- L’Ukraine devrait libérer des troupes près de Kherson pour lancer une nouvelle offensive, à partir de Zaporizhzhya. Cela devrait impliquer la prise de Melitopol, divisant ainsi les forces russes en deux.
- Dans le même temps, Melitopol sert désormais de principale plaque tournante pour l’approvisionnement des soldats russes en Crimée et dans le sud de l’Ukraine. Le pont de Crimée devrait rester en grande partie inutilisé jusqu’en septembre prochain. La conquête de Melitopol isolerait donc et mettrait à genoux une grande partie des forces russes.
- Mais l’Ukraine se garde bien d’avancer trop vite. On soupçonne que la Russie laissera beaucoup de matériel derrière elle lorsqu’elle se retirera, sous forme de mines ou de pièges. Il est également toujours possible que la Russie mente au sujet du retrait et que les troupes soient simplement retranchées dans la ville pour y mener des combats de rue.
- Geert Jan Hahn, journaliste à la BNR, a également soulevé ce dernier point. « Si Choïgou fait cela après une proposition de Sourovikine, alors je m’inquiète pour l’état de Kherson », a-t-il déclaré. « Sourovikine a également laissé Alep en un seul morceau », a écrit, ironiquement, Hahn sur Twitter. En effet, Sourovikine est le général qui a ordonné le bombardement complet de la ville syrienne d’Alep en 2016, dans lequel 440 civils, dont 90 enfants, sont morts.
(JM)