La question du remplacement du gaz russe est loin d’être résolue: les chantiers navals n’ont plus de places pour la construction de nouveaux méthaniers

Les carnets de commandes du géant des méthaniers, KSOE, sont remplis jusqu’en 2025. Il ne reste que très peu de créneaux pour la construction de nouveaux navires, à l’heure où l’Europe veut s’appuyer sur le gaz naturel liquéfié pour remplacer le gaz russe. Cela pourrait mettre à mal les approvisionnements, alors que la demande explose. Les prix du transport, sur les méthaniers disponibles, augmentent en conséquence.

Pour se défaire du gaz russe, l’Europe veut importer (beaucoup) de gaz naturel liquéfié (GNL). Les États-Unis ont déjà promis d’augmenter leurs livraisons, et d’autres pays pourraient suivre (moyennant certaines conditions). Remplacer les 150 milliards de mètres cubes de gaz russe importé tous les ans est un véritable casse-tête pour l’UE, qui souhaite faire baisser ces importations de deux tiers, pour la fin de l’année déjà.

Mais le problème du gaz ne vient pas seul. Le GNL doit être transporté par des navires-citernes spéciaux, des méthaniers. Et qui dit augmentation des livraisons dit augmentation de la demande en navires. Mais ceux qui en commandent devront se montrer patients : les chantiers navals sont déjà surbookés.

Pandémie et porte-conteneurs

K.W. Kim, vice-président de Hyundai Heavy Industries, faisant partie du plus important groupe de construction de méthaniers mondial, Korea Shipbuilding & Offshore Engineering (KSOE),a expliqué à Reuters. qu’avec la pandémie, la demande en porte-conteneurs a explosé. Les carnets de commandes sont ainsi quasi pleins jusqu’en 2025. Dans son agenda serré, il ne reste que très peu de créneaux pour de nouvelles commandes.

Les porte-conteneurs et les méthaniers remplissent chacun 30% des créneaux. KSOE construit habituellement 20 à 22 méthaniers par an. Cette année, l’entreprise connaît les mêmes soucis que quasi partout dans l’économie : pénurie de main-d’œuvre, hausse des prix des matières premières (+15% pour les plaques métalliques), et congestion des chaines d’approvisionnement. Une expansion des activités serait donc actuellement compliquée, ajoute Kim.

KSOE construit également des terminaux flottants et des unités de regazéification, essentielles pour décharger un méthanier. Mais là aussi il faudra prendre son mal en patience : l’entreprise sud-coréenne ne prend actuellement plus de commandes. Elle construit également des pétroliers, et Kim voit que la demande pour des navires de petite taille ou de taille moyenne commence à augmenter, à l’heure où l’Europe cherche à remplacer le pétrole russe également, et qu’un embargo quasi total a été prononcé.

Le prix du transport augmente

« Les propriétaires de navires bénéficient de bons taux d’affrètement », continue Kim. La demande pour le GNL explose, et la volonté de livraison augmente également, mais le nombre de navires ne pourra pas augmenter aussi rapidement pour suivre cette montée en flèche. La rareté fait le prix, et donc les prix du transport du GNL battent des records.

La transition du gaz russe à d’autres gaz restera donc un véritable casse-tête, à plusieurs couches, et il semble que nous ne sommes pas prêts de voir les prix du gaz revenir à leurs niveaux d’avant mi-2021 de sitôt.

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