Si les gouvernements européens disposent d’armes pour lutter contre l’inflation à plusieurs niveaux – réductions d’impôt, plafonnement des prix, contrôles plus stricts –, le secteur de l’alimentation leur donne du fil à retordre.
L’actualité : bien que l’inflation globale montre des signes de ralentissements encourageants en Europe, à quelques exceptions près, les prix élevés des denrées alimentaires restent tenaces.
- L’alimentation représente une partie des dépenses toujours plus importantes des ménages, alors que les prix des produits alimentaires ont en moyenne grimpé de 19,5 % au sein de l’Union européenne, a calculé Bloomberg sur base des chiffres de la Commission européenne.
- La Hongrie est le pays qui accuse l’inflation alimentaire la plus importante, avec une hausse de 47 %. Chypre est celui qui souffre le moins à ce niveau, avec une inflation alimentaire de 9,1 %.
- En Belgique, elle est de 19,9 % (17,02%, selon Statbel) et en France de 16,1 %.
Le détail : les prix des denrées alimentaires augmentent à un rythme jamais vu dans l’histoire de l’après-guerre, a assuré Maartje Wijffelaars, économiste en chef du groupe Rabobank, rapporte Bloomberg.
- Une situation qui a déjà poussé certains gouvernements à agir, notamment le Portugal en supprimant les taxes sur les produits essentiels ou la France en poussant les supermarchés à réduire leurs marges.
- Et ils pourraient être amenés à intensifier leurs mesures si la situation venait à empirer, alors que les populations grognent déjà leur mécontentement.
« Vous ne pensez pas que cela se produire dans un endroit comme l’Europe, mais avec des prix alimentaires allant de 15 à 20 %, voire plus pour certains produits alimentaires, les gouvernements deviennent de plus en plus nerveux. »
Angel Talavera, responsable de l’économie européenne à Oxford Economics.
Des facteurs multiples
Contrairement au marché de l’énergie, celui de l’alimentation est moins réglementé. Mais ce n’est pas le seul facteur qui explique cette inflation particulièrement forte des prix des denrées alimentaires.
- En amont de l’inflation, le secteur avait déjà rencontré des difficultés, avec notamment des sécheresses, des perturbations dans les flux commerciaux, ainsi que la hausse des prix des engrais – deux facteurs liés à la guerre en Ukraine –, mais aussi des maladies telles que la grippe aviaire.
- La hausse des coûts de l’énergie et de la main-d’œuvre a également joué dans la balance.
Plafonner les prix, la solution ?
- De plus en plus sous pression, les gouvernements européens pourraient être tentés d’appliquer la même solution pour contrer l’inflation alimentaire que celle utilisée contre la hausse des prix de l’énergie, à savoir le plafonnement des prix.
- Mais cette option pourrait s’avérer contre-productive, comme l’a montré le cas de la Hongrie qui a plafonné les prix de l’alimentation début 2022 et qui se retrouve malgré tout aujourd’hui avec une inflation alimentaire de près de 50 %.
- Dans le secteur alimentaire, plafonner les prix de certains produits essentiels signifie vendre à perte pour les détaillants qui seront obligés d’augmenter les prix d’autres produits pour compenser.
Et maintenant ? La position adoptée par plusieurs gouvernements européens est de se montrer plus attentif aux agissements des détaillants, alors que certains les accusent de profiter de l’inflation pour se remplir les poches.
- L’Espagne a par exemple décidé de mettre en place des réunions mensuelles avec les magasins, entreprises de transport et producteurs alimentaires pour s’assurer que les réductions d’impôts se traduisaient bien sur les prix, afin d’alléger le fardeau des consommateurs.
- Reste à voir si la solution se résorbera toute seule, avec le temps, ou si les gouvernements n’auront pas le choix d’agir.