Les chercheurs de la société israélienne NT-Tao, comme des dizaines d’autres entreprises, veulent construire un réacteur de fusion nucléaire commercial. Mais il ne ressemblera pas aux machines expérimentales typiques, qui sont souvent plus grandes qu’une maison. NT-Tao veut construire un réacteur suffisamment petit pour tenir dans un conteneur d’expédition.
L’essentiel : l’entreprise veut combiner les deux modèles les plus populaires de réacteurs à fusion nucléaire – le tokamak et le stellarator – pour construire un « soleil dans une boîte ». Pour comprendre ce que cela signifie, il est utile de savoir comment fonctionne un réacteur à fusion nucléaire.
- Dans les réacteurs à fusion nucléaire, l’objectif est de générer la même réaction que celle qui alimente le soleil et d’autres étoiles. Dans le cœur du soleil, les atomes d’hydrogène sont tellement comprimés par l’énorme pression qu’ils fusionnent. Ce processus libère une grande quantité d’énergie.
- Il n’est pas facile d’imiter ce processus sur Terre. En effet, pour obtenir la même pression que dans le cœur du soleil, il faut atteindre des températures de plus de 100 millions de degrés Celsius. À ces températures, la matière contenue dans le réacteur devient si chaude qu’elle commence à former un plasma. Pour contrôler ce plasma, il faut utiliser des champs magnétiques extrêmement puissants.
- Les défis techniques sont énormes. L’humanité tente de développer cette technologie depuis des décennies. Bien que de nombreux progrès aient été réalisés, avec quelques percées majeures ces dernières années, l’industrie de la fusion nucléaire plaisante toujours en disant que « la fusion nucléaire, c’est toujours pour dans 30 ans ».
Donuts
Zoom avant : Les champs magnétiques peuvent être contrôlés de différentes manières. Les scientifiques étudient principalement deux types de réacteurs, la principale différence étant la forme que prend le plasma.
- La forme la plus populaire est le tokamak. Il s’agit d’un réacteur en forme de tore, conçu pour la première fois en 1950 par les scientifiques russes Igor Tamm et Andrei Sakharov. Actuellement, le tokamak est le type de réacteur le plus avancé pour réaliser la fusion nucléaire commerciale. ITER, le plus grand réacteur de fusion en construction, est notamment un tokamak.
- Il existe également le stellarator. Dans un stellarator, le plasma est maintenu dans une chambre de réacteur en forme de donut qui tourne. Cette forme maintient le mélange du plasma, ce qui permettrait de l’utiliser plus longtemps. Cependant, les stellarators sont très complexes et, jusqu’à présent, seule une poignée d’entreprises développe cette technologie.
Une combinaison des deux
L’enjeu : NT-Tao a choisi une troisième voie. L’entreprise souhaite combiner les deux technologies.
- « NT-Tao combine le meilleur de la technologie tokamak existante et le meilleur de la technologie stellarator existante », explique Oded Gour-Lavie, cofondateur de l’entreprise, à la BBC. Dans une autre interview accordée en février, cette fois à Venture Beat, Gour-Lavie expliquait que cette technologie permettrait à l’entreprise de générer un plasma d’une densité 1.000 fois supérieure à celle des autres réacteurs.
- Cette densité plus élevée permettrait au réacteur de fusion de l’entreprise d’être beaucoup plus petit que les modèles habituels. L’objectif final est de construire un réacteur suffisamment petit pour tenir dans un conteneur d’expédition. Les réacteurs pourraient ainsi être installés dans des endroits où l’accès au réseau électrique est limité.
- Le projet a déjà suscité l’intérêt des investisseurs. Lors d’un tour de table organisé au début de l’année, la société a levé 22 millions de dollars, soit l’équivalent d’environ 20 millions d’euros. Au total, 28 millions de dollars ont déjà été investis dans l’entreprise. Le constructeur automobile Honda est l’un des investisseurs.
- NT-Tao est loin d’être la seule entreprise à tenter de développer cette technologie. Ces dernières années, les entreprises spécialisées dans la fusion ont poussé comme des champignons. Les sommes investies dans cette technologie augmentent également d’année en année. En 2020, un total de 2 milliards de dollars avait déjà été investi dans des entreprises de fusion privées. L’année suivante, ce chiffre a augmenté d’environ 50% pour atteindre 3 milliards, puis 4,8 milliards en 2022.
(CP)