Formation fédérale: comment le triangle PS-MR-N-VA rend les négociations encore plus difficiles

Une série de rencontres a mené à une réunion décisive dimanche dernier. Une réunion au cours de laquelle le Parti socialiste a négocié plus qu’il ne le dit avec la N-VA. Mais le MR s’est senti pris en tenaille. Sans confiance mutuelle au sein du trio, les négociations ont capoté.

En début de semaine, nous vous relations les détails d’une réunion décisive dimanche dernier entre les informateurs et les partis concernés par une coalition ‘Diable rouge’ (PS-sp.a-MR-CD&V-N-VA). Une réunion qui a capoté, menant les deux informateurs chez le roi sans solution.

Georges-Louis Bouchez (MR) et Joachim Coens (CD&V) ont toutefois été prolongés d’une semaine. Si cette décision a été généralement incomprise, il nous revient qu’un accord était bien en négociation ce dimanche. Et que les dés ne sont pas définitivement jetés.

Un double jeu du PS?

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La semaine dernière, un rapprochement entre la N-VA, le CD&V et le sp.a s’est opéré. Car les nationalistes savent que ce n’est qu’avec un front uni qu’ils pourront mettre la pression sur le PS. Le trio a également travaillé sur des textes, avec en coulisses, un rôle important joué par John Crombez (sp.a) et Koen Geens (CD&V).

Plus surprenant est le deal préparé par la N-VA et le PS. Avec pour le Parti socialiste, un grand trophée sur le plan social: une augmentation des retraites – ‘une réforme dont même la FGTB serait fière’ – qui pourrait aussi être bien perçue dans une Flandre qui comprend plus de retraités que de chômeurs.

En contrepartie, un trophée pour la N-VA sur le plan communautaire: des Régions renforcées, notamment via une réforme de la police et de la justice. Deux compétences pour lesquelles le PS n’est pas opposé à davantage de régionalisation. ‘Ils jouent le jeu très intelligemment: ils font payer à la N-VA la régionalisation avec des contreparties sociales, alors qu’ils sont eux-mêmes pour davantage de pouvoirs dans les Régions. Ils sont gagnants sur les deux tableaux’, nous explique une source proche des négociations.

Le MR, par contre, perd deux fois. Socialement et économiquement d’abord, car un gouvernement ‘Vivaldi’ sans la N-VA pourrait leur permettre d’avoir davantage d’influence et de pousser un gouvernement de centre-gauche à droite. Institutionnellement ensuite, car le MR se refuse à davantage de régionalisation. Au contraire, son président s’est même dit attaché à une Belgique unitaire. Ajouter à cela la perte des libéraux flamands dans un potentiel attelage ‘Diable rouge’, c’en était trop pour GLB.

‘Qui est informateur ici? Qui a organisé des réunions avec les cinq partis pendant une semaine? N’ont-ils pas remarqué que l’Open VLD n’était déjà pas là?’ Le président du MR est un peu tombé de sa chaise quand il a entendu les propositions institutionnelles à haute voix, tout en voyant les propositions plus sociales s’écarter du programme de son parti.

Tensions GLB-Magnette

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Du côté des libéraux, on se méfie en fait du double jeu du PS: ‘C’est un pur château de cartes. Le PS n’a pas proposé la réforme de la justice et de la police uniquement pour tirer sur le MR. Était-ce un moyen de faire chuter l’attelage ‘Diable rouge’ dans son ensemble?, s’interroge un acteur clé des négociations.

Il nous revient que la réunion de dimanche était tendue entre Georges-Louis Bouchez et Paul Magnette. La confiance ne règne pas entre les deux égos, et les luttes ancestrales entre les deux partis francophones se sont réinvitées à la table des négociations. ‘Le PS veut absolument éviter d’être vulnérable tant que le MR est présent’, nous explique un initié.

La lutte entre le PS et la N-VA est en fait un jeu en triangle. Car le MR ne veut pas que le PS concède trop à la N-VA et inversement. La sortie médiatique de Paul Magnette contre les ‘mesures imbuvables’ de la N-VA n’était en ce sens qu’un écran de fumée.

Le crash

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Seulement, PS et MR ont un point commun: les deux partis ennemis veulent tous les deux une coalition ‘Vivaldi’ (socialistes, libéraux, démocrates-chrétiens et écologistes) et pas une ‘Diable rouge’. Le premier pour des raisons évidentes, le second pour continuer à peser.

Mais ces hésitations ont poussé Bart De Wever à demander aux deux présidents francophones de jouer cartes sur table: ‘Faites vos jeux, arrêtez ce théâtre’, aurait-il asséné. ‘Si vous voulez faire un gouvernement d’urgence, faites-le. Si vous voulez une ‘Vivaldi’, faites-le. Si Wilmès doit rester au Seize: allez-y. Mais arrêtez de tourner autour du pot.’

Nouveau moment de tension. Le jeu en triangle rend effectivement la situation encore plus compliquée. C’est dans ce contexte que la réunion de dimanche s’est soldée par un nouvel échec.

Et maintenant? Les acteurs sont connus, les points de négociations aussi, il reste à s’entendre. Ce qui est certain, c’est que la lutte entre le MR et le PS ne facilite pas les choses: ‘Nous pensions que c’était difficile entre Elio Di Rupo (PS) et Charles Michel (MR). Mais ces deux coqs…’, déplore une autre source.

En résumé, pour la coalition ‘Diable rouge’, au-delà des négociations serrées avec la N-VA, il faudra que le PS et le MR s’entendent. Pour ce qui est de la ‘Vivaldi’, tout reste entre les mains du CD&V.

Un dernier scénario sans le PS circule également, mais on souhaite déjà bonne chance à ceux qui voudraient le mettre en place.

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