La menace de voir les importations de gaz russe stopper grandit de jour en jour, à mesure que les sanctions européennes infligées à Moscou se poursuivent. Si cela devait potentiellement coûter cher à la Russie, couper ses exportations de gaz naturel vers l’Europe serait un moyen de pression particulièrement fort. Dans les deux camps, les conséquences pourraient être lourdes.
Plus tôt ce mois-ci, Moscou a réduit de 60% les flux de gaz naturel vers l’Allemagne via le gazoduc Nord Stream, forçant le pays à se tourner à nouveau vers le charbon pour compenser. Mais cela a également mis la pression sur les relations entre les membres de l’Union européenne : pour Berlin, la solidarité va-t-elle bien continuer de primer au détriment de l’approvisionnement national ? Une question qui devrait devenir de plus en plus brûlante à mesure que la Russie limitera ses exportations de gaz vers l’Europe.
Dans le cas d’une coupure complète, l’UE n’aura pas d’autre possibilité, elle devra faire des choix et devra réduire sa consommation de gaz naturel jusqu’à 30%, estime Fatih Birol, le directeur de l’Agence Internationale de l’Énergie, qui s’est confié à Bloomberg.
« Selon son calendrier, une coupure complète de l’approvisionnement en gaz russe vers l’Europe pourrait entraîner des niveaux de remplissage du stockage bien inférieurs à la moyenne avant l’hiver, laissant l’UE dans une position très vulnérable », a-t-il indiqué par mail. « Dans le contexte actuel, je n’exclurais pas une coupure complète des exportations de gaz vers l’Europe depuis la Russie. »
Rationaliser les différents secteurs
Les membres de l’UE se pressent à toutes les sources pour remplir leurs stocks de gaz naturel en prévision de l’hiver, mais surtout d’une possible coupure des exportations russes. Il leur faudra encore plusieurs semaines pour y arriver, de sorte que si Moscou coupait prochainement ses robinets, l’Europe serait contrainte de faire des choix et de rationaliser l’accès au gaz naturel.
Les industries seraient très certainement les premières touchées, suivies par les ménages durant la période estivale, afin de remplir les stocks, mais aussi de continuer l’approvisionnement de secteurs capitaux tels que les centres de soin. Il faut également ajouter que les prix deviendraient « considérablement plus élevés ».
L’Europe est en passe d’atteindre les 90% de ses capacités de stockage d’ici le 1er novembre, mais avec une coupure des exportations russes, ce chiffre pourrait ne pas dépasser les 75%, selon Bloomberg. Dans certains pays, le risque de pénuries plane, même si l’Union européenne souhaite conserver une certaine solidarité entre ses membres. Difficile d’imaginer que cette dernière puisse tenir tout l’hiver si le gaz venait effectivement à manquer. Reste à voir si les autres fournisseurs de l’UE parviendront à compenser au mieux l’arrêt des exportations russes.
Du côté de la Russie, fermer les robinets de gaz vers l’Europe pourrait coûter cher. Cela signifierait en effet faire une croix sur une rentrée d’argent non négligeable, bien que l’Europe ait déjà commencé à réduire ses importations et que d’autres pays sont désormais ses principaux clients.