Des armées du futur plus écologiques, pour mieux gagner les prochains conflits

Des soldats du futur qui respecteraient la nature et la planète pour mieux faire des misères à ceux d’en face ? Cela ressemble aux prémices particulièrement cyniques d’un récit d’anticipation, mais l’enjeu est pourtant bien réel. Car en temps de paix, le principal rôle d’une armée est de se préparer aux guerres futures, et les enjeux énergétiques et environnementaux seront peut-être au centre de celles-ci.

Différentes armées songent de plus en plus à leur bilan énergétique, ainsi qu’au passage à une motorisation hybride pour leurs machines, engins de combat compris. C’est une préoccupation qui a d’ailleurs été inscrite noir sur blanc dès 2020 dans le rapport « Stratégie énergétique de défense » du ministère français de la Défense, par exemple, qui se fixait pour objectif de « faire de la transition énergétique un atout opérationnel pour les armées. »

« L’hybridation des motorisations semble prometteuse pour le milieu terrestre. Dans le champ des carburants de rupture, les biocarburants apparaissent comme la meilleure option à moyen terme permettant de décarboner le secteur aéronautique de défense. Dans le secteur naval, l’optimisation énergétique à bord sera privilégiée. »

Note d’intention du ministère français des Armées

Véhicules hybrides et bases à l’énergie solaire

  • L’objectif premier n’est pas de protéger la planète quand on défend l’Hexagone ; il s’agit plutôt d’améliorer la résilience de l’armée française en cas de difficultés d’approvisionnement, en particulier en carburants fossiles.
  • Et cela passe, en amont, par des efforts de réduction de la consommation, mais aussi par l’adoption de nouvelles technologies, moins gourmandes et/ou utilisant les carburants du futur. Une démarche qui doit être pensée largement à l’avance, quand il s’agit de revoir les besoins d’une armée de plus de 270.000 militaires et collaborateurs civils.
  • La France entend développer d’ici à 2030 une version hybride de ses blindés Griffon et de ses Véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI). Des engins qui, dans le cas du premier, ont d’ailleurs été commandés par des pays voisins comme la Belgique.
  • On peut aussi citer, à l’échelle européenne, les projets de créer des camps de base déployables à l’étranger qui seront moins dépendants des groupes électrogènes utilisant des combustibles, mais plutôt des éoliennes ou des panneaux solaires.
  • Dans ce domaine, les États-Unis ont d’ailleurs une longueur d’avance, et surtout une ambition qui frôle parfois la science-fiction. En janvier dernier a été mis sur orbite le Space Solar Power Demonstrator (SSPD), un premier prototype de panneaux solaire déployé dans l’espace.
  • Celui-ci fait partie d’un programme qui doit, à terme, fournir de l’énergie solaire captée dans l’espace directement aux bases américaines stratégiques, via des ondes. Une manière d’assurer l’approvisionnement de ces bases, coupées du réseau pour raison de sécurités et qui nécessitent donc de grandes quantités de carburant pour faire tourner leurs générateurs.

Un avantage tactique

Consommer moins de pétrole pour tenir plus longtemps en cas de conflit prolongé, où l’approvisionnement peut s’avérer difficile c’est une chose ; une armée doit effectivement penser à ses stocks, comme le prouve l’épineuse question des munitions. Mais passer à la motorisation hybride peut aussi aborder des avantages tactiques.

  • Toutes les armées modernes disposent de technologies basées sur la détection de la chaleur ; cela va des lunettes de vision nocturne des combattants et des systèmes de visée des véhicules de combat, aux capteurs infrarouges des missiles intercepteurs qui traquent avions et projectiles ennemis. Or, passer à la motorisation hybride est un bon moyen de réduire la signature thermique d’un véhicule. Ces moteurs sont aussi généralement bien moins bruyants, rendant là aussi la détection plus difficile.

Mais aussi un futur enjeu stratégique

Il y a quelque temps, le ministère britannique de la Défense s’était lancé dans une collaboration avec un duo d’écrivains pour imaginer une série de nouvelles mettant en scène les guerres et les armées du futur. Et si les progrès de l’armement – et de l’amélioration des capacités physiques humaines – étaient abordés, c’était aussi le cas des raisons de faire la guerre.

  • L’une des nouvelles met en scène une humanité qui s’est affranchie des énergies fossiles. Et qui donc se bat pour le contrôle de nouvelles technologies et des sources d’énergies vertes pour assurer son approvisionnement. Un monde sans pétrole dans lequel les enjeux géopolitiques seraient donc entièrement différents.
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