Dans cette région de la Russie, les voitures électriques sont déjà moins chères que les Lada: pourquoi ?

La Russie n’est pas (du tout) un bon exemple en matière d’adoption de la voiture électrique. Malgré tout, une région se démarque nettement: le district fédéral de l’Exrême-Orient russe. Là-bas, l’électrique a le vent en poupe, au point de voler la vedette à la Lada, la célèbre « voiture du peuple ».

Dans l’Extrême-Orient russe, et plus particulièrement dans sa ville la plus peuplée, Khabarovsk, la voiture électrique est déjà en train de gagner son pari. En quelques années, elle y est devenue ultra populaire.

Les cinq premiers mois de 2021 en sont la meilleure preuve. Sur cette période, selon les données de l’agence d’analyse Autostat, plus d’un cinquième de tous les véhicules électriques importés en Russie ont été vendus dans la région, alors que celle-ci ne compte que 4% de la population du pays. À titre de comparaison, Moscou, qui abrite deux fois plus d’habitants, n’a représenté que 14% des ventes.

Vous vous en doutez, les habitants de l’Extrême-Orient russe n’ont pas la fibre écologique particulièrement plus développée que leurs autres compatriotes. Comme toujours, dans le secteur des voitures électriques, le nerf de la guerre, c’est l’argent. Les locaux ont l’occasion d’en acheter à des prix défiant toute concurrence: ils en profitent.

De l’électricité à 6 euros par mois, de l’essence à 115 euros

Là où bon nombre de gouvernements tentent de pousser eux-mêmes leur population à sauter le pas vers l’électrique, les autorités de l’Extrême-Orient russe n’en ont pas besoin. Ce sont la très spécifique économie locale et les règles du marché qui sont en train de faire fondre le coût des voitures électriques, explique Bloomberg.

À l’achat, les voitures électriques ne sont pas chères, dans cette région toute proche de l’Asie. Ses habitants peuvent profiter des véhicules d’occasion tout droit venus du Japon à prix réduit. La Nissan Leaf, également ultra-populaire aux Etats-Unis, fait un carton dans l’Extrême-Orient russe. Ses modèles de 2011 à 2013 coûtent entre 400.000 et 600.000 roubles (entre 4.600 et 7.00 euros).

À l’usage, l’électrique s’avère également très compétitive. L’Extrême-Orient russe bénéficie d’une électricité bon marché, subventionnée pour stimuler le développement économique de la région. En parallèle, en raison de la capacité insuffisante des raffineries locales, les prix des carburants sont généralement plus élevés que la moyenne russe.

Un phénomène similaire se produit dans le district fédéral sibérien, un peu plus central. Olga Ivanova, une de ses habitantes, indique qu’elle ne doit payer que 500 roubles par mois (moins de 6 euros) pour recharger sa voiture électrique d’occasion. La deuxième voiture de sa famille, une thermique, nécessite de débourser 10.000 roubles (115 euros) de carburant sur la même période.

Selon l’analyste Vygon Consulting, l’économie moyenne réalisée avec une Nissan Leaf d’occasion dans l’Extrême-Orient russe est d’environ 40.000 à 50.000 roubles (460 à 580 euros) par an, par rapport au coût de la conduite d’une Lada Granta produite dans le pays, la fameuse « voiture du peuple ». Un gain qui se rapproche d’un salaire mensuel dans la région.

Bientôt un effet traînée de poudre ?

Avec un tel avantage financier, il est logique que les voitures électriques pullulent dans les régions orientales russes. « Ces voitures sont presque à tous les coins de rue », témoigne auprès de Bloomberg Dmitry Unagaev, qui travaille dans un atelier de réparation automobile de Khabarovsk. Les gens accrochent même des prises de courant à leurs balcons pour recharger les véhicules, ajoute-t-il.

À priori, cet effet de mode pourrait gagner le reste de la Russie dans les prochaines années.

D’une part car le coût d’achat des voitures électriques devrait baisser au fur et à mesure que le prix des batteries diminuera. Les facteurs externes, tels que la différence de prix entre les carburants traditionnels et l’électricité, devraient eux aussi jouer un rôle au cours de la décennie à venir.

D’autre part, même si le facteur financier demeurera bien sûr primordial, les analystes s’attendent à ce que l’enthousiasme des habitants de l’Extrême-Orient russe gagne l’ensemble de la population. Il apparaît en effet depuis plusieurs mois que le bouche-à-oreille fonctionne, tant dans son format traditionnel que dans sa version moderne, sur les réseaux sociaux.

Le défi s’annonce titanesque. À l’heure actuelle, seul 0,2% de la flotte automobile russe est électrique.

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