Comment le Bitcoin éteint les lumières des villes iraniennes

L’Iran est confronté ces dernières semaines à d’importantes pannes d’électricité. Un problème dont se serait bien passé le pays qui se bat déjà contre les sanctions américaines et contre l’une des pires épidémies de coronavirus. Le minage de Bitcoin serait, selon le gouvernement, une partie du problème.

Les pannes d’électricité ne sont pas nouvelles en Iran. Le réseau est désuet et mal géré par les autorités censées le financer. Mais aujourd’hui, le gouvernement iranien préfère blâmer l’extraction de Bitcoin. Il est vrai que cette activité demande de grosses ressources énergétiques. Les transactions de cette monnaie numérique nécessitent de faire tourner tous les ordinateurs nécessaires.

La compagnie d’électricité publique a déjà fait fermer une ferme à cryptomonnaie dans le sud de la province de Kerman à cause de sa forte consommation d’énergie. Pourtant l’entreprise avait bien reçu l’autorisation du gouvernement pour fonctionner. Ses activités entraient dans le cadre strict imposé pour cette industrie.

Électricité bon marché

Les Iraniens travaillant de la Bitcoin rejettent les allégations du gouvernement. Selon eux, le secteur est pointé du doigt pour un problème bien plus large: la mauvaise gestion du réseau et un équipement obsolète dans les centrales.

Le gouvernement est également accusé d’avoir mis en place des tarifs trop bon marché, grâce à d’importantes subventions, ce qui pousse à la consommation.

Reste qu’il n’est pas dans l’intérêt du pays de blâmer les cryptomonnaies. Ce système bancaire alternatif est dans les faits un bon moyen de contourner les sanctions américaines.

Une idée des besoins informatiques d’une ferme à cryptomonnaies (Isopix)

La combinaison d’une électricité bon marché et d’une inflation a créé un terrain fertile pour le minage de Bitcoin et autres cryptomonnaies. La gestion de ces monnaies numériques demande à des ordinateurs puissants de résoudre des problèmes mathématiques complexes pour légitimer les transactions. Pour faire tourner les machines, il faut donc énormément d’électricité. Selon certaines estimations, le Bitcoin consomme bien plus d’énergie que la Belgique en un an.

Pas étonnant donc que les problèmes d’électricité persistent. Des centrales électriques surchargées ont dû fermer ces derniers jours. D’autres ont opté pour un carburant de qualité inférieure pour alimenter le réseau. Mais cela cause des niveaux de pollution très dangereux dans la capitale iranienne, à Téhéran..

Réglementation

Ces dernières années, des entreprises chinoises et russes se sont associées à l’Iran pour les aider à créer des fermes à Bitcoin. Le minage illégal grimpait en flèche lorsque le gouvernement s’est penché sur le dossier. Au départ, les autorités sanctionnaient seulement les personnes qui utilisaient des équipements importés illégalement d’autres pays comme la Chine.

Ensuite, en 2019, le gouvernement a décidé de réglementer le secteur. Il faut désormais demander une licence pour créer une ferme à cryptomonnaie et importer les ordinateurs nécessaires. Les autorités connaissent ainsi l’emplacement de ces entreprises très énergivores et peuvent leur demander des prix plus élevés pour l’électricité.

Minage dans les mosquées

La nouvelle législation pénalise donc ceux qui exploitent les cryptomonnaies sans autorisation. Les autorités offrent même une récompense pour toute information permettant de trouver la localisation d’opérations illicites. Et il s’est vite avéré que les Iraniens avaient pris goût aux Bitcoins. Des fermes de cryptomonnaies ont même été trouvées dans des mosquées.

Le gouvernement iranien cherche d’autres moyens pour contrôler le phénomène. Une législation a par exemple été votée pour limiter l’utilisation de monnaies numériques pour financer les importations et exportations. Cependant, cette loi n’a pas été appliquée dans la pratique, car il n’y a pas de système pour le faire. Le gouvernement avait également annoncé son intention de développer sa propre cryptomonnaie. Mais cette idée reste encore au stade de simple projet.

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