Sale temps pour les biocarburants : le Parlement européen veut réduire l’usage du soja dans les moteurs

La décision du Parlement européen d’interdire la vente de nouveaux véhicules à moteur thermique dès 2035 met la pression sur les constructeurs automobiles, mais ne fait pas non plus les affaires du secteur des carburants, et pas seulement fossiles. L’industrie des biocarburants, ces ersatz concoctés à base de produits agricoles, blé, maïs ou tournesol, se retrouve aussi sur la corde raide.

Récemment, ce secteur rappelait que ses carburants d’origine végétale avaient un rôle à jouer dans la transition énergétique des secteurs aériens et maritimes, où l’électricité n’est pas une option aussi facile à mettre en place que dans l’industrie automobile. Mais l’UE garde les biocarburants dans le collimateur : la commission de l’industrie du Parlement européen a voté ce mercredi en faveur d’une restriction de l’utilisation de l’huile de soja comme matière première pour la production de biocarburants, ce qui mettrait cette culture sur le même pied que l’huile de palme dans l’UE rapporte Euractiv.

Une culture accusée de déforestation

Selon les règles de l’UE adoptées en 2019, il est interdit à toutes les matières premières de biocarburants qui dépassent un certain seuil d’émissions de contribuer aux objectifs en matière d’énergies renouvelables dans les États membres de l’UE. Pour garantir une interdiction de facto du soja, la commission de l’industrie a voté pour abaisser le seuil à partir duquel une culture est considérée comme présentant un risque élevé de contribuer à la déforestation à l’étranger.

Or, 73 % des graines de soja utilisées dans la production de biodiesel sont actuellement importées d’Amérique du Sud, selon le groupe de campagne pour la mobilité propre Transport & Environment (T&E). Et ces cultures sont souvent étendues aux dépens des zones naturelles encore préservées, et des forêts primaires en particulier. Or déforestation et cultures intensives sont considérées comme des facteurs aggravants du changement climatique et de la perte de biodiversité.

Les législateurs souhaitent en outre avancer le début de la date d’élimination progressive de l’huile de palme et du soja – actuellement fixée à 2030 – pour qu’elle s’applique dès l’entrée en vigueur de la directive, peut-être dès l’année prochaine.

En attente d’approbation

« L’huile de palme et le soja ne pourront plus être comptabilisés dans le quota de biocarburants de première génération dès l’entrée en vigueur de la directive », a déclaré Markus Pieper, un député allemand qui a piloté la proposition de loi au Parlement. « Nous avons exclu le soja parce que nous avons des doutes sur les conditions durables dans lesquelles les pays du tiers monde le livrent à l’Europe. »

La position de la commission n’a cependant pas encore force de loi, car elle doit d’abord être approuvée par l’ensemble du Parlement européen lors d’un vote en plénière avant que les négociations avec les États membres puissent commencer pour finaliser la loi. Le vote du Parlement devrait avoir lieu lors de la session plénière du 12 au 15 septembre à Strasbourg.

Du côté de l’industrie des biocarburants, on ne veut pas s’étendre sur les accusations de participer à la déforestation – ou aux risques de pénuries alimentaires – tout en soulignant que ces substances végétales restent une option valable pour décarboner les transports là où l’électricité n’est pas envisageable.

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