Biden dit vouloir une « taxe minimale sur les milliardaires »… mais il sait très bien qu’il lui est impossible de la mettre en œuvre

Ce mardi, à l’occasion de son discours sur l’état de l’Union, Joe Biden a à nouveau appelé à la mise en place d’une « taxe minimale sur les milliardaires ». Pourtant, selon l’ensemble des analystes, c’est plus de la com’ qu’autre chose.

Pourquoi est-ce important ?

Ce n'est pas la première fois que Joe Biden émet son souhait de taxer davantage les Américains les plus riches. À la Maison Blanche depuis un peu plus de deux ans, il n'y est toutefois jamais parvenu. Et s'il s'agissait avant tout d'un effet d'annonce en vue d'une candidature à l'élection présidentielle de 2024 ?

Dans l’actu : Biden estime que le système fiscal n’est « pas juste ».

  • Dans son discours sur l’état de l’Union, tenu ce mardi, Joe Biden a appelé à instaurer une « taxe minimale » sur les milliardaires.
  • Le président américain a également proposé de quadrupler la taxe sur les rachats d’actions des sociétés (de 1% à 4%).  
  • Jugeant les bénéfices des compagnies pétrolières « scandaleux », il a qualifié le système fiscal américain « d’injuste ». « Pendant des décennies, la classe moyenne a été écrasée », a-t-il ajouté.

Le détail : que veut-il mettre en place ?

  • Lors de son discours, Biden n’a pas donné les modalités de sa proposition de taxe minimale sur les milliardaires.
    • « Aucun milliardaire ne devrait payer un taux d’imposition inférieur à celui d’un enseignant ou d’un pompier », a-t-il déclaré.
    • Plus tôt cette semaine, il avait déploré le fait que les Américains les plus riches n’étaient soumis qu’à un taux moyen de 8% d’impôt sur le revenu.
  • L’an dernier, le président a toutefois été plus précis. Il avait proposé un taux d’imposition minimum de 20% pour les Américains gagnant plus de 100 millions de dollars par an.
    • Cette proposition concernait le « revenu total ». C’est-à-dire les revenus réguliers et les « gains non réalisés » – la croissance des investissements.
  • Pour le quadruplement de l’impôt sur le rachat d’actions, Biden a indiqué que le taux actuel encourageait les sociétés cotées en bourse à utiliser les bénéfices pour augmenter la valeur des actions, plutôt que de verser des dividendes aux actionnaires. Or, ce sont ces derniers qui peuvent être imposés comme un revenu régulier.

Un projet mort-né

Les explications : mission impossible.

  • De l’avis de tous les analystes, Biden ne parviendra pas à mettre en place sa taxe minimale sur les milliardaires.
  • Le fait que la Chambre des représentants soit aux mains des républicains semble un obstacle impossible à surmonter.
    • Le président de la Chambre, Kevin McCarthy, a encore rappelé lundi qu’un « avenir de taxes plus élevées n’était pas une option ».
  • De plus, auparavant, même lorsque la Chambre était à majorité démocrate, les précédentes propositions de Biden sur le sujet sont restées lettres mortes. Certains démocrates n’étaient pas d’accord d’imposer les « gains non réalisés ».
  • Interrogé par CNBC, Steve Rosenthal, chercheur principal au Urban-Brookings Tax Policy Center, a également émis des réserves quant à la légalité de la proposition de Biden.
    • “Je suis assez sceptique quant à l’impôt sur le revenu minimum des milliardaires de Biden – à la fois pour les questions administratives et juridiques”, a-t-il expliqué, jugeant la proposition initiale “très compliquée”.
    • De gros doutes planent autour du fait que l’imposition de gains non réalisés puissent être considérés comme un revenu imposable en vertu du 116e amendement. En outre, la définition du terme « milliardaire » est assez floue, le calcul de leur fortune aussi. Le fait qu’il n’y ait pas de milliardaire dans tous les États est aussi problématique, car ce type d’impôt – s’il passait tous les obstacles précédents – devrait a priori être divisé parmi les États en fonction de leur population.

Le contexte : pourquoi Biden a-t-il fait cette déclaration ?

  • Tout porte à croire que Biden est bien conscient qu’au vu de tous les problèmes épinglés ci-dessus, sa taxe minimale sur les milliardaires n’a aucune chance de voir le jour dans un avenir proche.
  • Pour Rosenthal, il ne s’agit ni plus ni moins que d’une « proposition de loi de communication visant à mettre en évidence certains des problèmes du code fiscal ».
  • S’il ne s’est pas encore officiellement porté candidat, Biden envisage très sérieusement de se représenter pour un second mandat, en 2024. Devenu à 78 ans le président le plus âgé de l’histoire des USA, il est prêt à battre son propre record.
  • C’est donc surtout dans cette visée que Biden a fait cette déclaration, pensent savoir les analystes. Il tente de redorer son blason, là où même les électeurs ne semblent pas vraiment enthousiastes à l’idée de le soutenir pour une deuxième élection consécutive.
  • Sa phrase : « Je me suis présenté pour vraiment changer les choses, pour être certain que l’économie fonctionne pour tous afin que chacun puisse être fier de ce qu’il fait », prononcée ce mardi, annonce d’ailleurs assez clairement ses intentions pour 2024.
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