Le compte à rebours avant la décision de la Banque centrale européenne sur les taux d’intérêt de jeudi prochain est lancé. Il est évident que la BCE va relever ses taux d’intérêt pour la première fois en onze ans. La question est : de combien ?
La plupart des maisons de courtage estiment que la BCE relèvera le taux d’intérêt par étapes au cours des prochains mois, en commençant prudemment par augmenter son taux de base de 0 à 0,25% jeudi. Ce n’est qu’en septembre que les gros bonnets suivront, avec une nouvelle augmentation de 50 points de base. La présidente de la BCE, Christine Lagarde, a donné plusieurs indications en ce sens.
« La première hausse des taux d’intérêt depuis 2011 a été si bien préparée et annoncée à l’avance par la BCE qu’elle pourrait déclencher la même réaction sur les marchés financiers que chez les enfants qui savent à l’avance quel sera le cadeau sous le sapin de Noël : la déception », prévoit Carsten Brzeski, économiste chez ING.
Un euro faible
En d’autres termes, la BCE ne pourra surprendre jeudi qu’en augmentant le taux d’intérêt de 50 points de base au lieu de 25. En outre, trois arguments économiques plaident en faveur de ce dernier scénario :
- L’apaisement espéré de l’inflation dans la zone euro ne se produit pas.
- L’euro est tombé à la parité avec le dollar, rendant les produits énergétiques négociés en dollars plus chers pour la zone euro. Une forte hausse des taux d’intérêt renforcerait à nouveau l’euro.
- En septembre, la zone euro pourrait déjà être en récession, ce qui rendrait une forte hausse des taux d’intérêt inopportune. Il est peut-être préférable d’avaler la pilule la plus amère maintenant.
Mais malgré ces arguments, la BCE optera pour une légère hausse des taux d’intérêt jeudi, selon William De Vijlder (BNP Paribas) et Adrian Cooper (Oxford Economics). Selon De Vijlder, c’est même une affaire réglée.
Cooper s’attend encore à des pressions de la part des « faucons », les partisans d’une politique monétaire plutôt stricte. « Il y aura probablement des discussions sur un changement surprise de 50 points de base, compte tenu de la hausse continue de l’inflation, mais nous pensons que l’orientation prospective donnée par la BCE a les mains liées », écrit l’économiste sur Twitter.
De Vijlder attend plutôt avec impatience ce que la BCE dira sur les nouveaux outils destinés à éviter un clivage entre les pays faibles et forts de la zone euro. Cette question est plus que jamais d’actualité, avec l’éclatement d’une crise politique en Italie et le regain de spéculation des médias sur une éventuelle nouvelle crise de l’euro.
En retard sur son temps
Quoi qu’il en soit, une grande majorité d’économistes pensent que la BCE aurait dû relever ses taux d’intérêt beaucoup plus tôt et qu’elle est maintenant en retard sur les faits, selon une enquête de Bloomberg. Alors que les autres banques centrales se sont montrées audacieuses avec des hausses de taux d’intérêt, Francfort a maintenu son taux directeur à 0%.
La semaine dernière, la Banque du Canada a même augmenté son taux d’intérêt d’un seul coup de 100 points de base, le faisant passer de 1,5 à 2,5%. Brzeski : « Il est toujours un peu étrange de voir des augmentations de taux d’intérêt de seulement 25 points de base, alors que d’autres banques centrales ont commencé à augmenter il y a longtemps et que ’75 points de base’ semble être le nouveau ’25 points de base’. »
(CP)