Aujourd’hui, le jour J pour l’énergie nucléaire en Belgique ? Les enchères pour les nouvelles centrales à gaz se terminent ce soir, la rue de la Loi attend en suspens

Ce soir à 17h00, la première partie de la vente aux enchères des nouvelles centrales électriques, qui doivent remplacer l’énergie nucléaire dans notre pays, se termine. Ce mécanisme de gestion de la demande, appelé mécanisme de rémunération de la capacité (CRM), doit garantir qu’il y aura suffisamment d’électricité après 2025, date à laquelle cinq des sept centrales nucléaires fermeront de toute façon.

Mais Ecolo/Groen – les Verts – veulent plus : le ministre fédéral de l’énergie, Tinne Van der Straeten, espère ardemment « obtenir » 2,3 gigawatts de capacité supplémentaire ce soir, après les offres des producteurs d’énergie. Ensuite, toutes les centrales nucléaires pourront être fermées.

Dans l’actualité : Ce soir, la vente aux enchères du CRM se termine.

Les détails : il s’agit d’un appel d’offres « pour obtenir des subventions » pour construire des centrales électriques.

  • « De combien de subventions avez-vous besoin, pour rentabiliser une nouvelle centrale électrique (au gaz) ou une ferme de batteries ? ». C’est tout simplement la question qui est sur la table depuis des mois, du gouvernement fédéral aux différents grands acteurs du marché. Ils doivent enchérir, dans une vente aux enchères qui se termine ce soir, pour le montant le plus bas possible que le gouvernement « doit » leur donner.
  • Ce n’est pas rien : la construction d’une nouvelle centrale électrique au gaz coûte en moyenne 450 millions d’euros, mais sur 15 ans, ce coût peut être compensé par des subventions à hauteur de 900 millions d’euros, comme l’a calculé De Tijd.
  • Le remplacement de toutes les centrales nucléaires entraînerait la disparition de quelque 6 gigawatts d’électricité, soit 40 % de l’approvisionnement en électricité de la Belgique. À l’origine, il était prévu d’augmenter le nombre de centrales électriques au gaz, mais comme de nombreux parcs de batteries et projets visant à mieux réguler l’offre et la demande ont été ajoutés, il ne reste plus que 2,3 gigawatts de nouvelles capacités à trouver.
  • Le coût final du mécanisme de CRM est déjà déterminé dans une certaine mesure lors de cette première enchère : si les différents soumissionnaires se livrent une forte concurrence, le prix baissera. Mais si peu de joueurs sont intéressés, le CRM risque d’être très élevé. Au total, des montants de 250 millions d’euros par an circulent, mais personne ne peut vraiment prédire comment cela va se terminer.
  • Ce qui joue certainement un rôle, c’est l’incertitude des fournisseurs quant aux autorisations pour les futures centrales électriques. Engie à Vilvorde et RWE à Dilsen-Stokkem n’ont entre autres pas obtenu leur permis ; l’incertitude règne également à Wondelgem et Tessenderlo. Par conséquent, les producteurs potentiels doivent participer à la vente aux enchères avec beaucoup plus d’incertitude : s’ils gagnent, mais ne peuvent finalement pas construire, ils s’exposent à des amendes.
  • Derrière cette incertitude, il y a, selon Ecolo/Groen, une manœuvre de la N-VA au niveau flamand : c’est la ministre de l’Environnement Zuhal Demir (N-VA) qui freinerait des quatre fers.
  • La seule question est de savoir si l’incertitude entourant le permis peut être le facteur décisif : les amendes pour non-livraison sont si marginales (environ 5 millions) par rapport au bénéfice potentiel, qu’il y a de fortes chances que tout le monde se contente de faire une offre.
  • Chose surprenante : la volonté du côté wallon de donner des autorisations semble beaucoup plus facile. La N-VA veut-elle être totalement dépendante de l' »électricité wallonne » pour l’industrie flamande ? » questionne-t-on cyniquement dans les couloirs fédéraux. Il s’agit avant tout d’un bras de fer politique entre la N-VA, qui veut maintenir les centrales nucléaires, en activité et les Verts qui veulent les fermer depuis 2003 déjà.

La situation : Un dossier politique aussi brûlant que l’énergie peut-il être réglé « techniquement », par une vente aux enchères ?

  • Il est inutile de répéter que l’enjeu est important pour Groen et Van der Straeten. Avec la ministre de l’Énergie et Petra De Sutter comme vice-première ministre et ministre de la fonction publique, Groen a envoyé au gouvernement deux novices de la politique.
  • C’est traditionnellement le talon d’Achille des ministres verts : dans quelle mesure se révèlent-ils de « bons administrateurs » ? Pour Van der Straeten, il s’agit donc du grand test : les enchères se dérouleront-elles correctement et, surtout, le résultat sera-t-il favorable en termes de prix pour le gouvernement et, en fin de compte, pour le consommateur ?
  • La solution d’Ecolo/Groen à la question de la sortie du nucléaire, un cheval de bataille absolu dans les cercles verts, a été de l’élaborer de manière très technique dans l’accord de coalition.
  • Mais les autres partenaires gouvernementaux ne voient pas forcément les choses de cette façon : si le prix est trop élevé, et que cela aura in fine un impact sur la facture, le débat reprendra rapidement pour que les deux derniers réacteurs nucléaires, les plus jeunes, restent ouverts.
  • Le fait que des « superprofits » y soient réalisés en ce moment, en raison du prix très élevé de l’électricité, rend d’autant plus intéressant le maintien des centrales nucléaires. Hier, non seulement le PVDA-PTB a suggéré d’écrémer ces superprofits et de réduire ainsi la facture du consommateur, mais aussi le spécialiste de l’énergie de la N-VA, Bert Wollants, qui a également proposé cette voie : il veut une « remise de l’énergie nucléaire » sur les factures.
  • D’ailleurs, les centrales nucléaires ne sont pas les seules à faire des « super profits » en ce moment : l’énergie verte, les éoliennes en particulier, en tire également un maximum de bénéfices. En Espagne, le gouvernement de gauche a également imposé une taxe sur la production d’énergie éolienne, afin d’écrémer ces « superprofits » et de réduire les factures des consommateurs.

En fin de compte : personne ne sait ce qui est vraiment « cher » ou « bon marché » dans ces subventions. Le débat ne se terminera donc pas ce soir, il ne fait que commencer.

  • Ce n’est pas comme si une telle vente aux enchères de CRM avait lieu chaque année. Il est donc difficile d’avoir un cadre de référence. Il y a de fortes chances qu’une interprétation politique de la fin de l’enchère émerge immédiatement.
  • Il est déjà apparu clairement à plusieurs reprises au cours de la discussion qu’il ne s’agissait pas seulement d’un débat technique et commercial, mais qu’il s’agit aussi systématiquement d’une discussion émotionnelle, voire même d’une « guerre culturelle ». Elle est certainement menée par la N-VA dans l’opposition, mais aussi par le MR au sein du gouvernement.
  • La probabilité qu’ils abandonnent soudainement leur opposition à une sortie totale du nucléaire est extrêmement faible, quel que soit le résultat. Il y a, surtout avec les prix de l’énergie qui montent en flèche aujourd’hui, trop de gains politiques à tirer d’une bataille symbolique sur l’énergie nucléaire.

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