La guerre en Ukraine est un marketing réussi : le « monde entier s’arrache » le drone turc Bayraktar

Les guerres sont une expérience effroyable pour les citoyens, mais pour des constructeurs d’armes et d’armements, il s’agit d’une vitrine bienvenue pour démontrer, sur le terrain, les prouesses de leur matériel. Les drones turcs Bayraktar TB2 se font un nom en combattant les chars russes en Ukraine et suscitent l’intérêt des clients de la marque.

Une des pièces maîtresses de l’armée ukrainienne pour combattre les chars russes, les drones de fabrication turque, Bayraktar TB2, s’approchent silencieusement depuis les cieux, larguent leur munition sur le char, pris par surprises et sans défense, et s’en vont tout aussi calmement.

C’est la guerre et tout ne se passe évidemment pas toujours aussi facilement que cela. Mais le drone suscite de l’intérêt. Depuis le début du conflit, de nombreuses vidéos circulent sur les réseaux sociaux, où on peut voir ces drones, caméra embarquée, détruire des chars russes. Ils se sont ainsi immiscé dans la culture populaire accompagnant cette guerre, avec les fermiers ukrainiens qui enlèvent des chars avec leurs tracteurs, l’île aux Serpents et la petite phrase à l’intention du navire de guerre russe et les appels en visioconférence du président Zelenski devant diverses assemblées. Les soldats ukrainiens lui ont même dédié une chanson :

Moins cher

Au-delà de sa place dans la pop et meme culture autour de cette guerre, le drone est véritablement un atout pour l’armée ukrainienne. Il a une envergure de 12 mètres, peut voler à près de 8 kilomètres de hauteur, porter quatre missiles et jusqu’à 150 kilos en tout. Ses missiles sont également guidés via laser et transpercent facilement le blindage des chars ou des canons anti-aériens. Il peut voler jusqu’à 130 kilomètres par heure et a une autonomie de 150 kilomètres.

Dans le rayon des drones de guerre, il n’est pas le plus sophistiqué. Mais par rapport aux mastodontes américains, il est beaucoup moins cher. Le prix est certainement un avantage pour ce type de matériel, car il est utilisé pour remplacer un avion de chasse par exemple et épargner la vie d’un pilote. La possibilité qu’il soit perdu dans un combat fait donc partie du principe du drone et le prix d’un million de dollars joue ainsi en sa faveur.

La guerre est une vitrine

En tout cas, les affaires fleurissent pour le constructeur, Baykar. Selcuk Bayraktar, patron de l’entreprise et ancien des prestigieuses universités Pennsylvia College et Massachusetts Institute of Technology, présente actuellement un nouveau modèle d’avion téléguidé, Akinci, à une exposition à Bakou. « Le Bayraktar TB2 fait ce qu’il était censé faire – éliminer certains des systèmes antiaériens les plus avancés et des systèmes d’artillerie avancés et des véhicules blindés », y explique-t-il à Reuters. « Le monde entier est un client », clame-t-il, mais sans préciser ses clients.

Le drone Akinci. Crédit: Getty Images

Le président turc Erdogan (dont la fille est mariée à Bayraktar) répète également que la demande internationale pour le TB2 et Akinci est très forte. Le drone est même le plus important produit des exportations turques en matière de défense, que le pays compte bien augmenter.

Baykar en produit 200 par an. Le drone n’en est certainement pas à son coup d’essai : il a déjà été déployé en Irak, en Syrie, en Lybie et dans le Haut-Karabagh. Mais la guerre en Ukraine, plus médiatisée en Occident du moins, lui donne à nouveau une vitrine. Surtout que la Russie, qui mentionne régulièrement ces armements turcs, a déployé l’arme que tous les drones redoutent : les rayons laser. Mais selon le patron, ces armes ne sont pas efficaces, notamment parce que la portée des missiles du drone est plus longue que celle du laser.

En Ukraine, au début de la guerre, une vingtaine de TB2 survolait le ciel et le pays a déjà annoncé en avoir commandé 50 autres. D’autres clients connus de la firme sont l’Azerbaïdjan, l’Éthiopie, la Libye, la Pologne et le Qatar, et encore la Turquie.

TB3, un avion de chasse téléguidé et un taxi volant autonome

Baykar travaille également sur un nouveau drone, le TB3. Il a des ailes pliables et peut décoller sur une distance plus courte, ce qui peut être pratique pour le faire voler à partir d’un navire de guerre par exemple. Son premier vol devrait pouvoir avoir lieu pour la fin de cette année ou le début de l’année prochaine.

Un autre projet encore plus spectaculaire est aussi en cours de développement. Il s’agit d’un drone ressemblant à avion de chasse, appelé MUIS ou Kizilelma. Celui-ci devrait pouvoir effectuer son premier vol l’année prochaine, se réjouit le patron.

crédit: Getty Images

Bayraktar voudrait aussi s’engager dans des projets à des fins civiles. « Si vous regardez à plus long terme, nous travaillons sur des drones taxis – pour cela, nous devons développer une technologie d’autonomie de plus haut niveau – qui est essentiellement de l’IA – mais cela va révolutionner la façon dont les gens seront transportés dans les villes. »

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