Alors que bon nombre de pays décident de vacciner les personnes âgées et/ou à risque et leur personnel hospitalier en priorité, la Bulgarie abandonne ce système. À présent, tous ceux qui souhaitent se faire vacciner contre le Covid-19 peuvent prendre rendez-vous. Une première dans l’Union européenne.
Lors de la deuxième vague qui a touché l’Europe, fin 2020, la Bulgarie a affiché des chiffres surmortalité parmi les plus élevés de l’UE. Elle a atteint les 95% en novembre et les 75% en décembre. Au total, depuis le début de la pandémie, le Covid-19 a provoqué plus de 10.000 décès dans le pays.
Avec seulement 1,7% de sa population ayant reçu au moins une dose du vaccin contre le Covid-19, la Bulgarie a en outre un des taux de vaccination les plus bas d’Europe.
La Bulgarie est le pays le plus pauvre de l’UE. Mais cela n’explique pas le fait qu’elle vaccine moins. En tant que membre de l’Union, elle bénéficie, comme tous les autres États membres, de la stratégie d’achats groupés menée par la Commission européenne. Évidemment, elle en subit également les déboires, devant elle aussi faire face aux retards de livraison de Pfizer, AstraZeneca et Moderna. Mais là encore, cela ne justifie pas lenteur de sa campagne.
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Ce qui pose un gros problème à la Bulgarie, c’est le scepticisme de sa population à l’égard du vaccin contre le Covid-19. Comme la plupart des pays, la Bulgarie avait constitué des groupes prioritaires pour recevoir le vaccin. Les trois premiers groupes à avoir pu en bénéficier ont été les suivants :
- Personnel médical, pharmaciens, dentistes et toutes les personnes travaillant dans des cabinets médicaux en tant qu’assistants.
- Employés et clients des institutions sociales, spécialistes en pédagogie et personnes travaillant dans les élevages de visons.
- Personnes chargées de garantir que les activités essentielles à la vie publique puissent avoir lieu.
Problème: il est apparu que bien trop peu de ces personnes éligibles se sont présentées à leur rendez-vous pour recevoir leur vaccin.
Changement de cap
Le quatrième groupe prioritaire qui allait pouvoir accéder aux vaccins était les personnes âgées de plus de 65 ans ou souffrant de maladies chroniques les rendant plus vulnérables au coronavirus. Finalement, il n’en sera rien. La semaine dernière, les autorités bulgares ont décidé d’ouvrir les vannes: toute personne qui veut être vaccinée peut l’être. Tant que des vaccins sont disponibles, bien entendu.
Entre fin décembre et la mi-février, seuls 120.000 Bulgares s’étaient présentés dans un centre de vaccination. En laissant tout le monde se faire vacciner, l’objectif du gouvernement était de passer à 10.000 vaccinations quotidiennes.
L’effet a été immédiat. Dès vendredi dernier, jour où tout le monde a été autorisé à se faire vacciner, de longues files se sont formées auprès des différents centres de vaccination du pays. Certaines personnes ont même patienté plusieurs heures dans le froid afin de recevoir leur vaccin. Et le cap des 10.000 vaccinations quotidiennes est déjà quasiment atteint.
‘Je voudrais remercier toutes les personnes qui ont cru en la science’, s’est réjoui le ministre de la Santé, Kostadin Angelov. ‘À ceux qui n’ont pas été vaccinés, je voudrais dire quelque chose de fort et clair: Bulgares, l’espoir est entre vos mains, la décision vous appartient. S’il vous plaît, faites confiance à la science, faites confiance aux médecins’.
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Critiques
À première vue, cette situation est une très bonne nouvelle pour la Bulgarie. Toutefois, des voix se sont élevées pour dénoncer les dérives de cette suppression des groupes prioritaires.
La précipitation de milliers de Bulgares vers les centres de vaccination a créé de la cohue et de nombreux contacts rapprochés. Ce qui pourrait relancer l’épidémie. En outre, les personnes âgées et fragiles, qui devaient normalement devenir prioritaires en cette fin février, doivent désormais attendre leur tour et voient certains jeunes en bonne santé être vaccinés avant elles.
Certains analystes ont vu dans cette démarche une stratégie politique du gouvernement en place – à la popularité défaillante – pour regagner la confiance des citoyens. Au mépris de la protection des plus fragiles et pour pouvoir rapidement lever des mesures sanitaires déjà parmi les moins sévères d’Europe malgré la gravité de la crise.
Deux récents sondages ont montré que la moitié de la population bulgare ne comptait pas se faire vacciner. Elle serait influencée par les fake news, mais également par sa ‘défiance’ envers les autorités, a estimé Parvan Simeonov, politologue de l’institut Gallup, à l’AFP.
En résumé: ceux qui se précipitent désormais pour se faire vacciner le feraient pour montrer leur loyauté aux autorités. L’autre partie de la population restera campée sur ses positions. Le soudain enthousiasme lié à cette campagne du ‘vaccin pour tous’ pourrait donc rapidement s’estomper. Les plus hauts responsables du pays ont d’ailleurs eux-mêmes reconnu que conserver des chiffres si élevés constituera un ‘sérieux défi’.